Qu’est-ce qu’être « en bonne santé » ?

Depuis les années 2000, des espérances de vie « en bonne santé », dites aussi « corrigées de l’incapacité », ou « sans incapacité », sont également calculées.
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Depuis les années 2000, des espérances de vie « en bonne santé », dites aussi « corrigées de l’incapacité », ou « sans incapacité », sont également calculées.

En réalité, on a en quelque sorte couplé la notion d’espérance de vie à la naissance à celle de la morbidité (étude des maladies), qui rejoint la notion de qualité de la longévité d’un individu.
Ainsi, l’OMS publie depuis 2001 une statistique appelée « espérance de vie en bonne santé » (EVBS) 1, qui ne tient pas compte des années de vie durant lesquelles les individus souffrent de maladies prolongées ; cette restriction est basée sur la déclaration des limitations d’activité.
De plus en plus de pays utilisent aujourd’hui les espérances de vie en bonne santé pour surveiller la santé de leur population.
C’est un indicateur très logique puisqu’il tient compte non seulement de la durée de la vie mais aussi de sa qualité.
la véritable bonne santé, c’est d’être en pleine possession de ses moyens physiques et intellectuels, sans avoir à prendre de précautions autres que celles exigées par un mode de vie sain.
Cette définition est différente de celle que donnait l’OMS dans sa constitution de 1946 : « un état de complet bien-être physique, mental et social ». En effet, une telle dénomination peut être valable à 20 ans et l’être sans doute un peu moins à 70 ; il convient donc de la moduler, peut- être en adoptant celle, prémonitoire s’il en est, d’Hippocrate de Cos, qui la désignait en son temps comme étant « la capacité de s’adapter aux in délités du milieu ».
L’espérance de vie en bonne santé définit une existence sans limitation d’activité dans les gestes de la vie quotidienne, donc sans incapacité.
Cette notion d’« incapacité » permet de mesurer les difficultés et les limitations rencontrées dans les activités du quotidien (au travail, au domicile, pour les soins personnels, etc.) à cause d’un problème de santé.

On peut donc décompter les années de vie avec et sans « limitations dans les activités usuelles ».
La différence calculée entre l’espérance de vie à la naissance et l’espérance de vie en bonne santé mesure le nombre d’années, le plus souvent les dernières de l’existence, pendant lesquelles un individu peut voir survenir la maladie.
À l’heure actuelle, une grande quantité d’individus meurt encore sinon d’une maladie, du moins accompagné par une ou plusieurs maladies, qui pourraient, dans leur majorité, être supprimées ou atténuées par le dépistage, la prévention et la bonne hygiène de vie.

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Que retenir ?
> La notion de « bonne santé » module celle d’espérance de vie.
> Elle concerne « l’absence de limitation dans les activités usuelles »
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Que faut-il surveiller ?
À chaque époque de la vie, un certain nombre de troubles ou d’anomalies, sans être vraiment maladifs, peuvent interférer avec l’espérance de vie.
Une surveillance attentive doit pouvoir les déceler pour y parer.

Sur un organisme en période de croissance, comme c’est le cas de l’enfant, il faudra insister sur :

> le bilan sensoriel : bilan auditif pour déceler l’existence d’une surdité congénitale ou la survenue d’une fragilité de l’oreille interne ; la surveillance ophtalmologique régulière permettra de déceler strabisme ou troubles de l’accommodation nécessitant correction ;
> le bilan biométrique : pour surveiller la croissance et déceler les maladies ou malpositions, surtout au niveau de la colonne vertébrale ou concernant un surpoids débutant ;
> le bilan bucco-dentaire : prévient, par la survenue des caries ou de malpositions de l’articulée dentaire, la bonne sortie des dents définitives.
On n’omettra pas de surveiller le développement du langage, le bon déroulement de la puberté, sans oublier le bilan avant la pratique d’un sport, qui est parfois nécessaire.
Le suivi peut être assuré par un médecin de protection maternelle et infantile puis de médecine scolaire… sans oublier le pédiatre ;
les résultats seront soigneusement notés dans le carnet de santé sans oublier le tableau de vaccination.

Chez l’adolescent
L’adolescence est la période de tous les dangers…
Il faudra donc être particulièrement attentif au vagabondage nutritionnel de l’adolescent sous forme de repas irréguliers, nourriture trop riche en graisses et en sucre…
Ceci va de pair avec une surveillance du poids car le surpoids lié au stress de l’intégration dans le groupe n’est pas rare à cet âge.

Des entretiens réguliers, ne serait-ce que familiaux, permettent de dépister stress, fatigue ou difficulté d’intégration sous forme d’anxiété ou de déprime.
Il faudra prendre en compte et en charge certaines maladies de peau :
avant tout acné, mais aussi psoriasis ou eczéma qui peuvent avoir un retentissement psychologique important, surtout chez les filles.
Les premières expériences sexuelles, vues sous l’angle d’une éventuelle prise de pilule ou de la prévention des MST, doivent faire l’objet de toutes les attentions.
De même, la survenue de troubles comportementaux, associés à de la fatigue ou de la morosité, doit faire aborder le problème des addictions, certes alcool et tabac, mais aussi cannabis ou autres drogues.
Là encore, il faudra veiller à ce que le bilan pré-sportif soit bien réalisé car il peut survenir qu’une malformation, cardiaque entre autres, soit révélée plus tardivement, dans cette tranche d’âge.
Le suivi médical de l’adolescent est fréquemment assuré par la médecine universitaire qui a pris le relais de la médecine scolaire… sans oublier le médecin traitant.

Chez l’adulte
En pleine période d’activité, il faudra surveiller :
> l’hygiène alimentaire, afin d’éviter la prise de poids progressive au fil des ans avec ses complications possibles : diabète, athérome, etc. ;
> déceler précocement et surveiller la survenue, pas toujours évidente, d’une fatigue dont la méconnaissance peut amener au surmenage puis à l’épuisement (c’est le burn-out des Anglo-Saxons) ;
> éviter le « quarté perdant » : tabac, café, alcool, tranquillisants ;
> surveiller tout particulièrement la vision si l’on travaille toute la journée « à l’écran », ainsi que les troubles biomécaniques qui peuvent en résulter, au niveau de la colonne cervicale tout particulièrement ;
> la survenue de maux de ventre devra faire rechercher un retentissement digestif du stress : colite spasmodique et ulcères d’estomac ;
> de la même manière, la survenue de douleurs thoraciques ou d’un essoufflement fera rechercher, dans le même contexte, une hypertension ou des troubles coronariens ;
> bien sûr, la reprise d’une activité sportive après la quarantaine, même si elle est souhaitable, devra faire l’objet d’un bilan cardiocirculatoire soigneux ; la même remarque s’impose devant la nécessité d’une intervention chirurgicale, surtout sous anesthésie générale ;
> enfin, certaines entreprises facilitent la réalisation d’un bilan préretraite, ce qui permet de faire le point à cette période charnière dans la vie.

Chez le sénior
Chez l’individu fragilisé par le temps qui passe, deux types d’affection doivent être décelés précocement dans cette tranche d’âge.
> Les troubles cardio-circulatoires : devant des troubles précédemment cités, il faudra savoir dépister hypertension artérielle, insuffisance cardiaque, menace d’infarctus ou d’AVC, sans oublier varices et phlébite qui, contrairement à ce que l’on pense souvent, sont communes aux deux sexes.
> Certaines maladies invalidantes :
- maladies ostéo-articulaires, arthrose tout particulièrement, mais aussi rhumatismes inflammatoires ;
- maladies neurologiques : maladie d’Alzheimer, maladie de Parkinson…
sans oublier l’emphysème pulmonaire, conséquence de bronchites répétées.
> Certaines maladies digestives : constipation, survenue d’un cancer colique.
Penser au dépistage précoce chez les femmes d’une tumeur utérine, du sein ou de l’ovaire.

Le surpoids est assez fréquent ; il est davantage la conséquence de la sédentarité que de l’hypercalorisme.
Ne pas oublier de prendre en charge un terrain anxio-dépressif, fréquemment majoré par le contexte du troisième âge.
Cette surveillance attentive, qui relève du bilan de santé, amène du dépistage à la prévention de survenue ou d’aggravation d’affections
plus marquées, aidant ainsi l’individu à franchir les différentes étapes de morbidité liées à la tranche d’âge.

 

 
Dr Jean-Loup Dervaux

 

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