Je pense donc je suis...

 

L’homme a édifié un monde industriel et artificiel qui perturbe et détruit progressivement l’ordre de l’univers. Notre civilisation matérialiste s’est substituée aux civilisations traditionnelles, régies par les contraintes de la nature, indispen- sables à l’homme. Elle nous permet de bénéficier d’incontestables bienfaits et progrès ; mais notre monde, urbanisé à outrance, construit de fer et de béton, éclairé au néon, survolé par des avions supesoniques, interconnecté par un inextricable réseau d’informations, est menacé d’apocalypse. Des multitudes de communautés souveraines et rivales s’y affrontent. L’homme est aussi capable de s’auto-détruire par l’arme nucléaire que de créer en marge de la nature grâce au génie génétique, pouvoirs aux conséquences terrifiantes et trop souvent insoupçonnées.

 


Le corps et l’âme ne sont pas deux entités différentes, mais deux manières de percevoir la même chose.
De même, la physique et la psychologie ne sont que deux tentatives différentes
de lier nos expériences au moyen d’une pensée systématique.

                                                Albert Einstein

L’homme a édifié un monde industriel et artificiel qui perturbe et détruit progressivement l’ordre de l’univers. Notre civilisation matérialiste s’est substituée aux civilisations traditionnelles, régies par les contraintes de la nature, indispen- sables à l’homme. Elle nous permet de bénéficier d’incontestables bienfaits et progrès ; mais notre monde, urbanisé à outrance, construit de fer et de béton, éclairé au néon, survolé par des avions supesoniques, interconnecté par un inextricable réseau d’informations, est menacé d’apocalypse. Des multitudes de communautés souveraines et rivales s’y affrontent. L’homme est aussi capable de s’auto-détruire par l’arme nucléaire que de créer en marge de la nature grâce au génie génétique, pouvoirs aux conséquences terrifiantes et trop souvent insoupçonnées.

Jusqu’alors, ce pouvoir de création et de destruction était réservé aux forces suprêmes, que certains appelaient Dieu et d’autres « hasard », mais qui, toutes, dépassaient l’homme. À présent, cet homme nouveau, prométhéen, qui détient un pouvoir effrayant, doit s’appliquer à retrouver les vertus de la Sagesse plutôt que les pouvoirs du sorcier.

Depuis la nuit des temps, l’ordre de la nature a présidé à l’évolution de l’espèce humaine, néanmoins, depuis un siècle, le matérialisme a cru bon d’imposer sa philosophie rationaliste et athée, limitée au monde visible de la matière, qui remet en cause les fondements de la civilisation et rejette l’Inexplicable, l’Insaisissable, c’est-à-dire le Spirituel.

Coupé de ses racines et, paradoxalement, isolé dans une foule sans cesse plus dense et plus anonyme, l’homme se retrouve totalement conditionné par les « normes » de notre société de consommation, partagé entre son travail, les transports et le sommeil, et ses rares loisirs sont accaparés par les médias, télévision, radio et journaux, qui manipulent l’information et le coupent du monde réel.

Pour exister dans ce milieu souvent hostile, l’homme doit s’imposer par la force et l’argent.

Sa « réussite » sociale et ses désirs, toujours plus grands et toujours plus inassouvis, ne lui laissent jamais le temps d’être à l’écoute de lui-même. En fait, il se fuit, écartant toute réflexion sur les vérités fondamentales et une certaine réalité. Les condi- tions de vie actuelles ont plongé les hommes, spécialement ceux qui habitent les grandes cités, dans un état de délabrement psychologique alarmant. Il suffit de connaître la quantité de tranquillisants et d’antidépresseurs absorbés par la population des pays dits « civilisés » pour comprendre que cette situation aberrante est significative de notre décadence et de l’échec de notre société.

Il devient impératif de réagir contre cette « médiocratie » dont parle si bien Arthur Koestler, d’essayer de briser les chaînes que le pouvoir et la société nous ont imposées et de rejeter tous les systèmes qui amoindrissent l’individualité. Pour cela, nous devons accepter de sacrifier notre mode de vie lénifiant qui est une drogue au même titre que l’alcool ou les barbituriques. On prend, de nos jours, un tranquillisant aussi bien parce qu’on ne supporte plus son conjoint que parce que l’on n’a plus envie d’être, chaque jour, confronté à un travail fastidieux.

L’homme est le produit de son milieu, de l’éducation qu’il a reçue, des habitudes et des pensées de la société dont il fait partie. À part quelques rares individus dotés d’une forte personnalité, il obéit aveuglément aux lois que le pouvoir lui impose, aux normes d’une morale que la société a faites siennes. À notre époque, il est même parvenu à étouffer ses velléités, à aligner ses goûts, littéraires, picturaux ou musicaux, aux modèles qui lui sont proposés, craignant trop souvent d’avouer sa véritable pensée au risque de paraître original, donc « anormal ».

Pour penser « juste » de nos jours, il faut penser comme les autres, même si les autres sont loin d’être des modèles du genre. Entrer dans le « moule », s’identifier aux « normes », est le but, avoué ou non, de la plus grande partie de l’humanité. Il y a bien longtemps, déjà, Sénèque constatait : « C’est une erreur de vivre selon le mode d’autrui et de faire une chose uniquement parce que d’autres la font. » Bien plus tard, Anatole France avait, à son tour, remarqué que le courage le plus rare est le courage de penser. Karl Popper, qui s’inscrit dans la lignée des philosophes grecs d’il y a deux mille cinq cents ans, s’insurge à son tour et avec violence contre ces normes, et il conseille d’apprendre à « distinguer toujours et partout le Vrai du Faux ! ». Il estime que les artistes ne sont plus des créateurs mais seulement des « propagandistes organisés comme de véritables partis poli- tiques ». Combien de gens pensent ainsi sans oser l’exprimer ? Sans doute beaucoup mais, comme ils évitent de l’avouer, personne n’en tient compte.

Heureusement, de plus en plus nombreux sont ceux qui s’éveillent et prennent conscience qu’ils doivent se révolter et sortir de la torpeur qui les environne sur le plan spirituel.

Le professeur Michel Bounias1 rejoint la pensée de Popper lorsqu’il constate : « Pendant que l’art commençait à perdre sa faculté d’enfanter de véritables Créatures (pour se contenter de produire des créations, mondiales, s’il vous plaît et sur commande, de surcroît), la Science, la belle Science désintéressée a laissé s’enfermer sa propre créati- vité dans les limites des performances du matériel que lui octroie la Technologie. Et toutes deux, en bonnes filles de joie, serviles et complaisantes à satisfaire le pouvoir (qu’il soit d’essence politique, économique ou religieuse) dont dépendent leurs crédits, se sont mises à répandre sur le monde ses toxines favorites qui se nomment en particulier Croissance et Développement, et dont nous voyons aujourd’hui clairement les effets : une planète à l’agonie sous les chocs militaires, industriels, idéologiques, démographiques pour tout dire que lui livre l’homme, parasite neuronal ! Au fond, si nous en sommes là, c’est parce que la Science est devenue superstitieuse en même temps que la Religion perdait sa foi et compensait le contact perdu avec son Dieu par des allures rationalistes. Or, la Science, qui nous a pourtant offert ce luxe de commencer à comprendre comment la Vie avait pu prendre naissance, ne nous précise pas plus que la philosophie à quoi cela peut bien servir qu’il y ait des Êtres Vivants dans l’univers. Pire, elle a délégué à sa fille, la Technologie, le soin de combler le vide de l’ancienne Spiritualité, et de décider ce qui est Bien et ce qui est Mal (au nom du PNB). »

Mais le manque de personnalité profonde de l’homme moderne n’a rien de commun avec l’individualisme qui prime tout à notre époque. Les valeurs actuelles sont purement individualistes. Le but suprême de ceux qui ont de l’ambition se limite à être reconnu, remarqué, sans essayer pour cela d’être remarquable. Dans sa ruée vers ce qu’il croit être la perfection, notre « Moi-Je » oublie les vraies valeurs, le vrai bonheur, le vrai amour, et méprise les points de repère moraux ou religieux qui motivaient nos ancêtres et donnaient un sens à leur existence.

Nous sommes malades de notre narcissisme et dans notre société actuelle chacun, trop occupé par lui-même, n’a plus le temps de s’occuper de l’autre, oubliant trop souvent que nous ne sommes pas des individus isolés mais une partie de l’espèce humaine, qui est elle-même une partie du cosmos.
Le dualisme corps et esprit introduit par Descartes nous a conduits à une impasse. Il est donc grand temps de changer cette façon de penser. Tout en tirant le plus grand profit des découvertes réelles et bienfaisantes de la science, essayons de les observer dans leur contexte éthique, philosophique et psychologique. Nos besoins spirituels sont aussi exigeants que ceux de notre corps. Refusons de sacrifier notre dignité humaine à l’intérêt économique, notre liberté de penser à l’appât du gain et du pouvoir.

Notre science, si longtemps sûre d’elle, stagne au niveau de la plus basse réalité, dédaignant tout ce qui la dépasse, tout ce qu’elle ne peut expli- quer matériellement. Les scientifiques matéria- listes portent une grande part de responsabilités dans notre monde actuel. Au cours du xixe siècle, ils ont commencé à considérer le monde comme une machine animée par un mouvement perpétuel d’une manière entièrement déterministe. La notion de Dieu n’était plus nécessaire pour comprendre et expliquer le monde.

Lorsque Bonaparte félicita Laplace sur son Traité de mécanisme céleste, il formula une observation : « J’ai trouvé souvent le nom de Dieu dans le livre de Newton, mais je ne l’ai pas rencontré une seule fois dans le vôtre ! » Laplace lui répondit avec sérénité : « C’est parce que je n’ai pas eu besoin de cette hypothèse. » À cette époque, plus personne n’avait besoin de cette hypothèse pour expliquer un univers matériel et physico-chimique. Péremptoire, le chimiste Berthollet venait d’annoncer – avec trop de hâte – que la connaissance de l’univers était pratiquement totale. Cette conception mécaniste du monde, on peut s’en douter, dévalorisa la métaphysique et la philosophie humaniste, et prôna la doctrine nihiliste. Officiellement, l’univers était devenu matière inerte, soumise à des lois aveugles et immuables.

Cette physique mécaniste nous a confortés dans la pensée que l’homme est maître de l’uni- vers qui n’a été créé que par une succession de « hasards ». Bien enracinés dans notre conscience, ces préjugés sont issus d’un anthropomorphisme et d’un égotisme illimités. Nous savons à présent que nous nous sommes égarés en chemin. Nous ne sommes qu’un maillon dans l’évolution du cosmos et, sans doute, nous n’en sommes qu’au début de l’évolution de l’homme dans l’univers.

L’astronomie a détrôné l’homme de la place qu’il croyait occuper au centre de cet univers, alors qu’il n’est qu’un représentant de milliers d’êtres vivants. Cependant, cet homme qui, pour Pascal, n’est qu’un roseau, est un « roseau pensant ». Et c’est la pensée qui doit lui permettre d’améliorer sa condition présente pour parvenir à un degré plus élevé de conscience. L’homme, qui n’est qu’une infime poussière dans l’univers, est cependant le seul être qui se pose des questions et se demande pourquoi et comment il existe.

Depuis environ quinze milliards d’années, la matière évolue vers des états d’organisation de plus en plus élevés. Dans sa vision de l’évolution de la matière, Pierre Teilhard de Chardin pense que l’homme est l’axe principal, la clé de l’évolution vers ce qu’il appelle le point oméga, but suprême de l’évolution de l’homme et du cosmos. Pour Teilhard, l’homme détient l’énergie nécessaire pour participer à l’harmonisation de cet univers.
Le professeur Michel Bounias estimait, quant à lui, que : « L’erreur tragique des religions a peut- être été de laisser croire à l’homme qu’il devait attendre son salut de la miséricorde et de la toute- puissance divines : mais Dieu est entravé par des chaînes dont c’est, au contraire, à nous qu’il échoit de le délivrer. »
Pour le philosophe indien Sri Aurobindo : « L’existence humaine n’a pas encore touché à sa fin. Le stade actuel du développement de l’humanité n’en est pas à sa phase finale. L’homme tel que nous le connaissons n’est que l’ébauche de celui qu’il sera un jour. »

L’univers est en train de naître. Les hommes ne se trouvent donc pas au centre d’un cosmos achevé, mais ils participent à un processus de cosmogénèse. L’homme évolue en même temps que l’univers et l’évolution de son esprit se fait à travers la matière qui l’enchaîne, l’alourdit, le paralyse parfois, le mène à la mort de son corps, mais lui fait connaître des bonheurs exaltants : la beauté, les plaisirs des sens, les sons harmonieux, les odeurs, toutes les joies que la matière lui procure.

Stephen Hawkings, successeur de Newton, est mondialement connu pour ses contributions dans les domaines de la cosmologie et la gravité quantique, en particulier dans le cadre des trous noirs. Il est incontestablement le plus célèbre scientifique depuis Albert Einstein. Pour lui : « L’évolution de notre univers n’est certainement pas le fruit du hasard. Il existait infiniment peu de chances pour que se développe la structure cosmologique telle que nous la connaissons. Elle doit donc répondre à un but dont notre existence même fait partie. »

Mais que représente au juste le phénomène humain ? Selon Teilhard et le fameux biologiste anglais Julian Huxley, l’homme est encore dans son enfance par rapport à son évolution. Il doit devenir « ultra-humain » et coopérer à l’œuvre de Dieu qui ne peut s’achever sans lui. Nous entrons donc dans une nouvelle ère où l’homme, qui détient un savoir nouveau, doit choisir entre sa destruction et son évolution. Espérons que son choix lui permettra de retrouver la réalité ultime de sa vie et de sa propre âme afin qu’il devienne, comme le conseille Nietzsche : « Le point de départ de quelque chose d’autre que l’homme ».

Sylvie Simon

 

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