Marc Veyrat contre Guide Michelin : les clés d’un procès inédit

 

Par Oliver Gergaud,

 Professeur d’économie à KEDGE Business School

 

 

A la veille de l’audience en référé de la procédure judiciaire qui oppose le chef savoyard, Marc Veyrat, au Guide Michelin, Olivier Gergaud, Professeur et Directeur du Centre de recherche Food, Wine & Hospitality management, de KEDGE livre son analyse du procès et de la situation à l’origine du litige.

 

Une procédure en référé qui pourrait tourner à l’avantage du chef Veyrat

Marc Veyrat, le chef du restaurant la Maison des Bois à Manigod a déposé plainte contre le guide Michelin le 23 septembre dernier en réaction à la perte de sa 3ème étoile en janvier dernier. La procédure d’urgence dont fait l’objet le procès pourrait connaitre une fin heureuse pour le chef étoilé via deux mesures en sa faveur :

  • Le juge des référés peut prescrire des mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage. Cela prendrait la forme d’une indemnisation de l’éventuel préjudice économique subi et du préjudice psychologique vécu par le chef et ses équipes.
  • Le Guide Michelin pourrait également être obligé de restituer l’étoile perdue au restaurant ou bien d’accéder à la demande de Marc Veyrat de ne pas figurer dans la prochaine édition du guide.

 

Une situation de crispation autour du guide qui tend à se généraliser

Le chef savoyard n’est pas le premier à demander au guide de ne plus figurer dans sa sélection. Avant lui des grands chefs comme Bras, Roellinger, Senderens, Westermann ou Robuchon avaient souhaité ne plus figurer sur le Michelin afin de mettre un terme à la pression excessive que le guide exerce sur eux. L’expertise du guide devient la cible d’un nombre toujours croissant d’acteurs du monde de la gastronomie et notamment des chefs. Très récemment c’était au tour du chef coréen du Ristorante Eo, Eo Yun-gwo, d’assigner Michelin en justice pour avoir intégré contre son gré son restaurant dans le guide en déclarant "Je ne veux pas de l'aide d'une entreprise opaque et subjective". A l’origine, les chefs ont besoin des guides pour faire reconnaître leurs établissements. Or, Michelin, le guide historique de référence depuis 1926, année d’invention du système des étoiles a plusieurs défauts. Il n’a pas de véritable concurrent et ses étoiles dépendent du luxe de l’établissement.

 

Olivier Gergaud explique « Les chefs doivent emprunter pour investir des sommes importantes dans cette quête aux étoiles et en cas de rétrogradation par le guide, ils se retrouvent souvent dans une impasse financière :  moins de clients pour rembourser les dettes et pas de couvertures par les sociétés d’assurances dans ce cas de figure ».  

 

Réinventer un système d’évaluation pour sortir du problème

Pour atténuer la dépendance des étoiles au cadre de l’établissement, Olivier Gergaud propose une solution qui consiste en la création de catégories (e.g. gastronomie luxe, gastronomie, bistrot/brasserie, cuisines exotiques, etc.) au sein desquelles les restaurants recevraient des étoiles. Les chefs pourraient ainsi choisir leur catégorie en toute sérénité et exercer leur métier sans pression, puisque libérés de la contrainte d’investir dans le décorum.

 

En savoir plus sur Olivier Gergaud

Olivier Gergaud est professeur d’économie à KEDGE Business School et chercheur affilié du LIEPP à Sciences Po Paris. Il est également directeur Centre de recherche Wine & Spirits et titulaire de la Chaire Consommation Responsable Il a obtenu son doctorat à l’Université de Reims en 2000 et son habilitation à diriger des recherches à Sciences Po Paris en 2009. Ses domaines de recherche concernent l’économie de la culture, l’économie du vin, l’économie du sport, l’économie des comportements pro-sociaux et l’économie du restaurant. Olivier a été professeur invité dans plusieurs universités européennes (Sciences Po Paris, Université libre de Bruxelles) et nord-américaines (NYU, UCLA, HEC Montréal). Il a reçu différents prix honorifiques, notamment le prix du Président lors de la 12e conférence internationale de l’Association for Cultural Economics International (ACEI) et un accessit pour le prix de thèse de l’Association française de science économique (AFSE).

 

A propos de KEDGE Business School :
KEDGE Business School est une Ecole de management française de référence présente sur 4 campus en France (Paris, Bordeaux, Marseille et Toulon), 3 à l’international (2 en Chine à Shanghai et Suzhou, et 1 en Afrique à Dakar) et 3 campus associés (Avignon, Bastia et Bayonne). La communauté KEDGE se compose de 12 600 étudiants (dont 25% d’étudiants étrangers), 183 professeurs permanents (dont 44% d’internationaux), 275 partenaires académiques internationaux et 60 150 diplômés à travers le monde. KEDGE propose une offre de 36 formations en management et en design pour étudiants et professionnels, et déploie des formations sur-mesure pour les entreprises au niveau national et international. Membre de la Conférence des Grandes Ecoles et accréditée AACSB, EQUIS et AMBA, KEDGE Business School est une institution reconnue par l'Etat français, avec des programmes visés, et labellisée EESPIG. KEDGE est classée par le Financial Times 35ème meilleure Business School en Europe et 36ème mondiale pour son Executive MBA.
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