Une enquête de Medscape
Paris, le 12 décembre 2024 - Malgré les avancées sociétales et l’essor du mouvement #MeToo, le harcèlement sexuel reste un problème dans le milieu médical. Une enquête menée en 2024 par Medscape (site d’information pour les professionnels de santé) auprès de 1000 soignants exerçant en France, met en lumière des données alarmantes concernant les comportements inappropriés à caractère sexuel. Or, le harcèlement sexuel, sous ses diverses manifestations, exerce une double influence préjudiciable qu’il est impératif de reconnaître. Il affecte profondément le quotidien des professionnels de santé dans l’exercice de leurs fonctions et, par extension, altère la qualité des soins dispensés aux patients.
Victimes, formes et impacts du harcèlement sexuel dans le secteur médical
En France, près d’un médecin sur 16 affirme avoir été victime de harcèlement sexuel sur son lieu de travail au cours des trois dernières années, tandis que près du double des soignants déclarent avoir été témoins de comportements inappropriés. Certaines catégories sont plus vulnérables : 10 % des médecins de moins de 45 ans et 8 % des femmes médecins rapportent avoir été victimes entre 2021 et 2024. Par ailleurs, seulement 2 % des répondants reconnaissent avoir été accusés de harcèlement sexuel au cours des trois dernières années. Dans la totalité des cas, les auteurs présumés sont des hommes, souvent des confrères occupant une position hiérarchique équivalente ou supérieure.
Les comportements inappropriés dans le cadre professionnel prennent différentes formes. Les plus courants incluent des commentaires à caractère sexuel, suivis de contacts physiques non consentis et de propositions explicites ou implicites de relations sexuelles. Plus gravement, une tentative de viol est signalée dans environ 1 cas sur 11, et un viol dans 1 cas sur 16.
Les répercussions sur les victimes sont profondes :
Les témoignages explicitant les faits de harcèlement sont nombreux et relatent des formes variées mais toutes aussi impactantes pour le professionnel. Ainsi, une gynécologue rapporte « deux rapports sexuels imposés » par un confrère avec lequel elle a dû continuer de travailler pendant un an… Une diabétologue relate des « caresses sur les seins, baisers volés, propositions de contacts plus intimes, demande d’acte sexuel de la part d’un confrère du service » auquel elle s’était « formellement opposée ». Une urgentiste rapporte le cas « d’un ambulancier SMUR qui proposait explicitement de coucher avec » elle. Une chirurgienne dénonce « un anesthésiste qui a harcelé verbalement la moitié du personnel féminin au bloc opératoire et dans les services, et corporellement les plus jeunes »… jusqu’à ce qu’il parte à la retraite.
Des signes d’évolution, mais encore beaucoup à faire
La moitié des victimes n’ont pas signalé les faits. Parmi celles qui l’ont fait, seules 15% se sont tournées vers les ressources humaines. La peur des représailles et le manque de soutien de la part des collègues sont des barrières majeures à la dénonciation. Aussi, 92% des répondants indiquent qu’il n’existe pas de formation obligatoire sur le harcèlement sexuel dans leur lieu de travail. Et près de la moitié des médecins ignorent même les procédures à suivre en cas de harcèlement.
Malgré tout, 47% des médecins estiment que le harcèlement sexuel est pris plus au sérieux qu’il y a cinq ans, grâce notamment à la médiatisation et à une prise de conscience collective. Les soignants plébiscitent la mise en place de formations spécifiques, la désignation de référents en harcèlement sexuel et des sanctions plus sévères pour les auteurs.
Une mobilisation générale pour sensibiliser les professionnels de santé, renforcer les outils de prévention et assurer un environnement de travail respectueux et égalitaire reste essentielle pour préserver les soignants comme les patients indirectement impactés.
Méthodologie
Cette enquête a été réalisée à partir des réponses de 990 professionnels de santé français, dont 818 médecins et 172 infirmiers(ières) recueillies entre le 30 avril et le 8 septembre 2024.
51% des médecins répondants étaient des femmes, 52% exerçaient dans un établissement hospitalier et 69% étaient salariés. 72% travaillaient à temps plein (20% moins de 35 heures et 8% étaient à la retraite). 78% étaient âgés de plus de 50 ans et 24% exerçaient en Île-de-France. Parmi les répondants, 15% étaient des médecins généralistes, 10% des psychiatres, 8% des urgentistes, 8% des anesthésistes et 4% des cardiologues. Les autres spécialités étaient réparties de manière égale, en moyenne entre 1 et 4%.
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