Réunie le 13 janvier 2016, sous la présidence de M. Philippe Bas (Les Républicains – Manche), la commission des lois a examiné le rapport de M. François Zocchetto (UDI‑UC – Mayenne) sur le projet de loi relatif à l’information de l’administration par l’institution judiciaire et à la protection des mineurs. Déposé par le Gouvernement à la suite de la censure par le Conseil constitutionnel, pour des motifs de procédure, de dispositions similaires introduites, sans véritable débat, dans la loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l’Union européenne, ce projet de loi organise la possibilité pour les parquets de communiquer à l’administration certaines décisions prises par l’autorité judiciaire, qu’il s’agisse d’une condamnation ou de l’existence de poursuites pénales.
La commission des lois a rappelé qu’une proposition de loi présentée par Mme Catherine Troendlé (Les Républicains – Haut‑Rhin), et dont le rapporteur était déjà M. François Zocchetto, a été adoptée par le Sénat le 20 octobre dernier et regretté que le Gouvernement ait préféré élaborer son propre texte au lieu d’inscrire cette proposition de loi à l’ordre du jour prioritaire de l’Assemblée nationale. Une telle procédure eut été plus expédiente et plus respectueuse des initiatives du Parlement.
Si la commission des lois a souligné que la communication d’information après une reconnaissance de culpabilité ne posait pas de difficultés, elle s’est toutefois interrogée sur le bien-fondé d’une transmission portant sur les procédures en cours qui heurte directement le principe constitutionnel de la présomption d’innocence. Après en avoir longuement débattu, la commission a accepté le principe d’une communication au stade de la mise en examen ou de la saisine d’une juridiction de jugement, à la condition expresse que celle‑ci soit assortie de réelles garanties pour la personne concernée (droit de présenter des observations, obligation de confidentialité pour les personnes destinataires de l’information, faculté de recours auprès du président de la juridiction dans le cas où le parquet omet d’informer l’administration d’une décision favorable à l’intéressé, etc.).
En revanche, la commission des lois a unanimement considéré que le texte portait une atteinte excessive à la présomption d’innocence en autorisant le procureur de la République à informer l’administration à l’issue d’une garde à vue ou d’une audition libre, qui constituerait un stade trop précoce d’information et s’effectuerait dans un cadre procédural non contradictoire, ne permettant pas à la personne mise en cause de bénéficier de ses droits à la défense. Elle a donc supprimé cette possibilité.
La commission des lois a par ailleurs repris des éléments de la proposition de loi relative à la protection des mineurs contre les auteurs d’agressions sexuelles, votée par le Sénat le 20 octobre 2015, dont elle a déploré qu’elle n’ait pas été inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.
Enfin, la commission a relevé qu’en tout état de cause, les dispositifs prévus par le projet de loi, qui confient à nouveau des missions supplémentaires au ministère public, ne sauraient être pleinement applicables sans un renforcement conséquent des moyens humains et matériels des parquets.
Communiqué du Sénat