La santé et les compétences scolaires des enfants des pays riches déjà mises à mal, pourraient encore s’aggraver en raison de la COVID-19

Paris, le 22 septembre 2020

 

© UNICEF/UNI361462/Highway Child

 

 

 

 

Un récent rapport d’UNICEF(1) classe les Pays-Bas, le Danemark et la Norvège en tête des 38 pays de l'UE et de l'OCDE en termes de bien-être des enfants, et place la France au 7e rang tout en pointant les disparités et fragilités de la situation française.

 

A la veille de la Journée du refus de l’échec scolaire et en s’appuyant sur le dernier Bilan publié récemment par le Centre de recherche Innocenti d'UNICEF, UNICEF France alerte sur les menaces importantes qui guettent les enfants des pays riches : le suicide, le mal-être, l'obésité et le manque de compétences sociales et scolaires sont devenues des caractéristiques bien trop courantes de l'enfance dans les pays riches.

 

Le rapport utilise les données pré-COVID-19 pour classer les pays de l'UE et de l'OCDE en fonction de la santé mentale et physique des enfants et de leurs compétences scolaires et sociales. Sur la base de ces indicateurs, les Pays-Bas, le Danemark et la Norvège occupent le haut du classement et sont les trois meilleurs endroits pour être un enfant parmi 38 pays riches.

 

La France se place au 7e rang en ce qui concerne le bien-être et la santé mentale des enfants, et au 5e concernant les compétences des enfants. Elle ne se situe qu’en 18e place en ce qui concerne la santé physique. Ces résultats moyens concernant la santé physique des enfants en France s’expliquent principalement par le taux d’obésité des jeunes de 15 à 19 ans, avec près d’un jeune sur trois en situation de surpoids ou d’obésité en France.

 

Malgré ce classement général plutôt positif pour la France, les indicateurs proposés pour analyser le contexte socio-politique en faveur de l’enfance sont plutôt moyens ou faibles, comparés aux 38 autres pays. Par conséquent, les résultats encourageants de la France vis-à-vis du bien-être des enfants paraissent fragiles, et pourraient se détériorer à l’avenir. Le contexte de la COVID-19 pourrait contribuer à cette dégradation, dans la mesure où les investissements pour l’enfance pourraient diminuer du fait de la pression économique ambiante.

 

Parmi les éléments de contexte proposés par le rapport, certains indicateurs sont particulièrement préoccupants pour les enfants français :

 

        Les politiques et services liés à la petite enfance constituent un domaine à améliorer. En effet, comparé aux autres pays étudiés, la France dispose de relativement peu de semaines de congés maternel et paternel (26e position sur 41). Les résultats sont également mitigés concernant l’accueil et l’éducation de la petite enfance. La part de parents d’enfants de moins de 3 ans, qui déclarent que leurs besoins de garde d’enfants ne sont pas satisfaits, est supérieure à la moyenne européenne (22e place sur 29), et les parents français sont moins satisfaits que leurs homologues européens à l’égard des services de garde d’enfants. En revanche, la préscolarisation est largement développée, la France se situant en 5e position sur 41 en ce qui concerne le taux d’enfants ayant participé à des activités d’apprentissage organisées un an avant leur entrée à l’école obligatoire.

 

        Les taux de vaccination constituent un vrai point noir de ce rapport, situant notre pays en dernière position du classement, au regard du pourcentage d’enfants ayant reçu leur deuxième dose du vaccin contre la rougeole. Ce taux a chuté de manière significative entre 2010 et 2018.

 

        Les bons résultats généraux de la France concernant le bien-être des enfants occultent une certaine fragilité de la qualité des relations autour de l’enfant. Les parents français sont relativement peu nombreux à déclarer qu’ils peuvent compter sur l’aide d’un membre de la famille, d’un ami ou d’un prestataire de service (27e position sur 29), et ils évaluent leur rapport avec le personnel de l’école de leur enfant plus faiblement que dans les autres pays (23e position sur 29). Notre pays est également mal classé en ce qui concerne le bien-être affectif à 15 ans en fonction de la qualité des relations familiales (24e position sur 35).

 

        Plus inquiétant encore, un enfant sur cinq vit une situation de pauvreté (dans une famille dont les revenus se situent en dessous de 60 % de la médiane nationale). Ce pourcentage, bien que dans la moyenne des 38 pays, s’est dégradé de 5 points de pourcentage dans la dernière décennie. La France occupe la 9e position en ce qui concerne les taux de chômage.

 

Les défis à relever pour l’enfance en France sont importants. Certaines de ces données traduisent des avancées pour les enfants mais aussi des difficultés persistantes et qui risquent de s’aggraver aux cours des prochaines années.

 

Face aux défis actuels et à venir, UNICEF France appelle au renforcement de la gouvernance de l’enfance, idéalement sous la forme d’un ministère de l’enfance, qui réunirait l’ensemble des missions et programmes qui la concerne. Une politique ambitieuse pour l’enfance doit passer par une action publique coordonnée, stable et prévisible. Elle devrait également s’appuyer sur des données pertinentes et récentes concernant les différents aspects de la vie des enfants, qui manquent aujourd’hui en grande partie. L’absence d’une gouvernance claire et de données précises concernant l’enfance contribuent malheureusement à « invisibiliser » les problématiques qui concernent les enfants, en particulier les plus défavorisés.

 

Ces efforts permettraient de maintenir les facteurs de bien-être des enfants français décrits dans le rapport, et de réduire l’impact de la COVID-19 sur les enfants en France. « Ce n’est pas aux enfants de payer le lourd tribut de la pandémie », déclare Sébastien Lyon, directeur général d’UNICEF France.

 

Principales conclusions du Bilan :

 

        Santé mentale : dans la plupart des pays, moins des quatre cinquièmes des enfants déclarent être satisfaits de leur vie.

        La Lituanie a le taux le plus élevé de suicides chez les adolescents - une des principales causes de décès chez les 15-19 ans dans les pays riches - suivie de la Nouvelle-Zélande et de l'Estonie.

        Santé physique : les taux d'obésité et de surpoids chez les enfants ont augmenté ces dernières années. Environ 1 enfant sur 3 dans tous les pays est soit obèse, soit en surpoids, les taux en Europe du Sud augmentant également fortement. Dans plus d'un quart des pays riches, la mortalité infantile est toujours supérieure à 1 pour 1000.

        Compétences : en moyenne, 40 % des enfants de tous les pays de l'OCDE et de l'UE n'ont pas acquis les compétences de base en lecture et en mathématiques à l'âge de 15 ans. Dans la plupart des pays, au moins 1 enfant sur 5 manque de confiance en ses aptitudes sociales pour se faire de nouveaux amis.

        Bien-être : en raison de l'épidémie de COVID-19, au cours du premier semestre 2020, la plupart des pays couverts par le rapport ont fermé les écoles pendant plus de 100 jours, tandis que des politiques strictes de confinement à la maison ont également été mises en œuvre. Le rapport note que la perte de membres de la famille et d'amis, l'anxiété, les restrictions liées au confinement à la maison, le manque de soutien, les fermetures d'écoles, l'équilibre complexe entre le travail et la vie de famille, le faible accès aux soins de santé, combinés à la perte économique causée par la pandémie sont catastrophiques pour le bien-être des enfants, affectant leur santé mentale et physique et leur développement.

        Pauvreté : avant la pandémie de COVID-19, le taux moyen de pauvreté relative des enfants dans les 41 pays était de 20 %. Sans mesures correctives immédiates, celui-ci augmentera.

 

Le rapport et l’analyse complémentaire appellent aux étapes suivantes pour améliorer le bien-être des enfants :

 

        Prendre des mesures décisives pour réduire les inégalités de revenus et la pauvreté et veiller à ce que tous les enfants aient accès aux ressources dont ils ont besoin.

        Combler rapidement l’importante lacune des services de santé mentale pour les enfants et les adolescents.

        Élargir les politiques favorables à la famille pour améliorer la conciliation travail-vie de famille, en particulier l'accès à des services d’accueil de la petite enfance de haute qualité, flexibles et abordables.

        Renforcer les efforts pour protéger les enfants contre les maladies évitables, notamment en inversant les récentes baisses de la vaccination contre la rougeole.

        Améliorer les politiques COVID-19 qui aident les familles avec enfants et garantir que les budgets qui soutiennent le bien-être des enfants sont entièrement protégés contre les mesures d'austérité.

 

« Beaucoup de pays parmi les plus riches du monde, qui disposent pourtant des ressources nécessaires, sont en échec pour protéger le bien-être de leurs enfants. À moins que les gouvernements ne prennent des mesures rapides et décisives, dans le cadre de leurs réponses à la pandémie, nous pouvons nous attendre à une flambée des taux de pauvreté infantile, à une détérioration de la santé mentale et physique et à un fossé croissant de compétences parmi les enfants », prévient Sébastien Lyon.

 

(1) « Des mondes d'influence : Comprendre ce qui détermine le bien-être des enfants dans les pays riches »

 

 

 

La série des Bilans Innocenti d’UNICEF - qui existe depuis 20 ans - utilise des données nationales comparables pour classer les pays de l’UE et de l’OCDE en matière d’enfance.

 

Accéder au rapport : ici

 

 

 

À propos d’UNICEF

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