Insecte du Carbonifère (320 Ma) portant à l’insertion de ses ailes un acarien ;
il s’agit de la plus ancienne association connue d’acarien avec son hôte
© Photo et dessin : MNHN / N. Robin, O. Béthoux ; données 3D : D. Germain, A. King
Les travaux d’une équipe internationale impliquant des chercheurs du Centre de recherche sur la paléobiodiversité et les paléoenvironnements (CR2P : Muséum national d’Histoire naturelle, CNRS, UPMC ; Sorbonne Universités) ont mis en évidence la plus ancienne association symbiotique entre un acarien et un autre organisme. Cette association date de 320 millions d’années (Ma), la faisant reculer de plus de 230 Ma par rapport aux connaissances actuelles. Cette étude vient d’être publiée dans la revue Current Biology.
Le phénomène de symbiose, c’est-à-dire l’association prolongée de deux organismes d’espèces différentes, est très ancien et aujourd’hui indispensable au bon fonctionnement des écosystèmes. Actuellement les acariens sont impliqués dans une grande variété de relations symbiotiques. Ces arthropodes majoritairement microscopiques sont connus séparément depuis le Dévonien (390 Ma). Dans le registre fossile, l’observation de leurs associations avec de plus gros organismes se limitait à des occurrences préservées dans l’ambre et relativement récentes (85 Ma), notamment du fait de la rareté de spécimens plus anciens suffisamment bien conservés. L'ancienneté et l'origine de ces associations interspécifiques étaient donc jusqu’à présent totalement méconnues.
Des chercheurs du CR2P (Paris), de la Capital Normal University (Pékin), de la Russian Academy of Sciences (Moscou), du laboratoire IPANEMA et du Synchrotron SOLEIL (Saint-Aubin) ont découvert et étudié un acarien, localisé sur le thorax d'un représentant disparu du groupe des sauterelles, grillons et criquets, provenant de la localité de Xiaheyan (Chine ; Carbonifère, 320 Ma). Cet acarien de seulement 0,8 mm de long, exceptionnellement bien préservé, a été analysé en utilisant diverses techniques d’imagerie, notamment la tomographie par contraste de phase au Synchrotron SOLEIL. Les données morphologiques obtenues, très détaillées, ont permis de l’identifier comme une nouvelle espèce, nommée Carbolohmannia maimaiphilus.
L’excellente préservation des spécimens et l’abondance hétérogène des espèces d’insectes environnantes indiquent que les individus de ce niveau géologique ont été enfouis très rapidement, suggérant que l’association acarien-insecte existait du vivant des deux organismes. De plus l'acarien se trouve dans une position particulière, au niveau des ailes de l'insecte, soit une position protégée mais peu adéquate à une activité de charognard (l’acarien se serait alors plutôt situé au niveau de la face ventrale de l’abdomen, moins dur et plus riche en nourriture), ce qui renforce l’idée que cette association était effective ante-mortem. Outre la localisation de l’acarien, l’étude de sa morphologie a révélé qu’il ne présentait aucune adaptation particulière renseignant un éventuel parasitisme.
Les caractéristiques de l'association observée indiquent donc un cas de phorésie, association pour laquelle le gain pour l’acarien est le transport et la protection assurée par l’hôte, ce dernier ne subissant en retour aucun effet néfaste. Cette découverte démontre que ce type d’association, fréquente notamment au sein des groupes d’acariens les plus diversifiés, a émergé très tôt au cours de l'évolution de ces animaux.
RÉFÉRENCE :
A Carboniferous mite on an insect reveals the antiquity of an inconspicuous interaction, Ninon Robin, Olivier Béthoux, Ekaterina Sidorchuk, Yingying Cui, Yingnan Li, Damien Germain, Andrew King, Felisa Berenguer, Dong Ren. Current Biology, 5 mai 2016.
Muséum national d’Histoire naturelle