
En France et dans le monde, la pénurie de greffons d’origine humaine (allogreffes) aboutit, chaque année, à de nombreux décès de patients en liste d’attente d’une greffe d’organe.
Les progrès récents de la « bio-ingénierie moléculaire » ont permis, aux États-Unis et en Chine, la création de porcs transgéniques façonnés pour la transplantation d’organes chez l’homme (xénogreffes) et visant à surmonter les obstacles immunologiques et infectieux (en particulier rétroviraux) à l’origine du moratoire européen de 1999. Plusieurs xénogreffes récentes de rein (1), de cœur (2), et de foie (3) ont montré des résultats encourageants. Deux essais cliniques concernant la greffe de rein de porc transgénique, validés par la Food and Drug Administration, ont ainsi débuté en janvier de cette année aux États-Unis.
Malgré ces résultats encourageants, les obstacles à franchir pour faire de la xénogreffe d’organe une alternative réelle à l’allogreffe restent nombreux, principalement concernant la production de porcs transgéniques dans des fermes « pharmaceutiques » et la maîtrise du rejet des xénogreffons (production de greffons peu immunogènes et mise au point de traitements immunosuppresseurs adaptés). En France, certaines équipes possèdent des atouts dans ces domaines (4,5), ainsi qu’une expérience dans les biotechnologies adaptées à la production de xénogreffons porcins (6).
Ainsi, si la France et l’Europe veulent s’engager pleinement dans cette voie et éviter un décrochage en sciences biomédicales, ainsi que la soumission à des contraintes en termes d’accès aux xénogreffons, différentes conditions doivent être remplies du point de vue du soutien à leurs équipes de recherche, de la définition du cadre éthique et réglementaire de l’utilisation des xénogreffons, et de la réponse aux questionnements anthropologiques posés par cette innovation de rupture.
Face aux nouvelles promesses qu’offre la xénogreffe d’organes et aux défis qu’elle pose, l’Académie nationale de médecine, qui vient d’y consacrer une séance plénière et publier un rapport dédié (7), appelle à la mise en place d’un plan national « xénogreffes » et recommande :
– d’investir massivement de manière urgente et coordonnée dans la recherche sur les xénogreffes (prévention du rejet, recherche en sciences sociales et humaines) ;
– de faciliter la création en France de porcs transgéniques et d’une ferme « pharmaceutique » capable de les élever, dans le respect du bien-être animal, pour fournir des organes dans des conditions conformes aux exigences de sécurité sanitaire ;
– de compléter, dès à présent, les dispositions réglementaires permettant d’utiliser en France des organes et des tissus de porcs transgéniques chez l’Homme ;
– de définir un cadre éthique et sociétal pour utiliser les organes de porcs transgéniques afin que, dans un contexte de pénurie d’allogreffes, leur utilisation, si elle est rendue possible, offre une chance supplémentaire aux patients.
>>> Version intégrale du communiqué : https://www.academie-medecine.fr/wp-content/uploads/2025/05/Xenogreffes-dorganes.-communiqueBD.pdf