Stress : les équipements qui nous permettent de nous adapter aux situations extérieures n’ont pas évolué depuis des millénaires


Les équipements qui nous permettent de nous adapter aux situations extérieures n’ont pas évolué depuis des millénaires. Lorsque nous subissons un stress, notre système sympathique ordonne ainsi un ensemble de réactions internes censées nous permettre de l’affronter. Ce qui, pour nos lointains ancêtres préhistoriques, se résumait en une alternative simple : fuir à toutes jambes ou se battre. Outre l’accélération du rythme cardiaque dont nous avons parlé, d’autres réactions s’installent. Dans nos poumons, les bronchioles se dilatent pour augmenter les échanges gazeux et fournir un surplus d’oxygène à l’organisme. La sécrétion de salive diminue et nous avons la bouche sèche. Toutes ces manifestations sont permises par des échanges de neurotransmetteurs et de messages hormonaux. Elles sont destinées à nous permettre de réagir rapidement pour sortir de la situation stressante.

Ce dispositif correspond à la manière dont nos lointains ancêtres devaient réagir face au danger. Lorsque le tigre aux dents de sabre qu’ils étaient en train de chasser chargeait dans leur direction, ils n’avaient qu’un seul choix : l’affronter ou détaler à toutes jambes. Notre corps n’en a rien oublié. Il continue, via la branche sympathique du système nerveux autonome, à répondre de la même manière lorsque nous sommes en situation de tension. Le problème, c’est que les stress que nous subissons aujourd’hui demandent des réponses bien différentes. Lorsque l’on s’engueule avec son conjoint, il n’est plus question de quitter les lieux en courant ou de lui mettre son poing dans la figure. La plupart du temps, le dispositif du système nerveux autonome n’est plus d’une grande utilité. Les muscles, par exemple, n’ont pas besoin d’un surplus de sang et d’oxygène, puisque leur mobilisation ne permettra pas de résoudre la situation.

Pire : lorsque nous ne pouvons ni fuir ni combattre (ce que faisaient nos ancêtres), nous nous retrouvons piégés dans ce que le Pr Henri Laborit* appelait « l’inhibition de l’action ». L’orage intérieur d’hormones et de neurotransmetteurs, destiné à nous permettre de réagir, risque alors de se retourner contre nous. Lorsque le stress est violent ou durable, les réactions inutiles mises en place par notre système sympathique finissent par produire des effets délétères qui ne parviennent plus à être compensés par le système parasympathique. Ce déséquilibre fait alors le lit des maladies psychosomatiques (problèmes digestifs, insomnies, douleurs diffuses, dérèglements hormonaux...). Nous y reviendrons.

Et le nerf vague dans tout cela ? Il joue un rôle essentiel. Car, rappelons-le, c’est lui qui achemine en priorité les informations du système parasympathique. En le stimulant régulièrement et en prenant soin de lui (voir les gestes pratiques dans le chapitre 4, p. 85 du livre présenté ci-dessous), nous pouvons atténuer les dysfonctionnements et les déséquilibres entre les deux branches du système nerveux autonome, pour notre plus grand bien.

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L’IMPACT PHYSIQUE DES ÉMOTIONS
La joie, la peine, la colère... nous semblent relever de notre vie psychique. De fait, nous possédons tous une sensibilité émotionnelle qui nous est propre et qui colore nos ressentis et nos comporte- ments. Pourtant, si l’on en croit le célèbre neurologue portugais Antonio Damasio, directeur de l’Institut pour l’étude neurologique de l’émotion**, c’est dans le corps que naissent nos émotions. Paradoxe ? Pas tant que cela ! Car nos états émotionnels ont bel et bien un fondement physiologique, qui fait intervenir toutes les structures dont nous venons de parler : le système nerveux, mais aussi les organes sensoriels, les neurotransmetteurs, le cerveau... Et le nerf vague.

Les chercheurs ont identifié six émotions de base, que l’on retrouve dans toutes les sociétés, toutes les civilisations, à toutes les époques : la joie, la colère, la peur, la tristesse, le dégoût et la surprise. Certains en ajoutent d’autres, comme la honte. Ensemble, elles constituent la toile de fond de notre vie intérieure, mais aussi de notre fonctionnement physiologique et biologique. Car les émotions, lorsqu’elles sont violentes, brutales et/ou répé- tées, contribuent aux déséquilibres qui peuvent s’installer entre les deux branches du système nerveux autonome. Ce qui, à la longue, affecte le fonctionnement du nerf vague.
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* Le Pr Henri Laborit était médecin, chirurgien et neurobiologiste. Il fut l’un des pionniers des neurosciences appliquées. Ses travaux les plus connus concernent l’accumulation du stress toxique (pour le corps et l’esprit) dû à « l’inhibition de l’action ». Il a notamment publié Éloge de la fuite, réédité aux éditions Folio en 1985.
** À l’Université de Californie du Sud, aux États-Unis. Il est l’auteur de nombreux ou- vrages qui ont fait grand bruit, notamment L’erreur de Descartes, publié par les éditions Odile Jacob en 2010.

Dr Yann Rougier / Marie Borrel

 
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