RAPPORT DE L'ACADEMIE NATIONALE DE MÉDECINE : SOIGNER LES MALADIES MENTALES / PLAN DE MOBILISATION NATIONALE


Les malades mentaux demeurent les invisibles de nos sociétés, la maladie mentale restant marquée, dans notre imaginaire collectif, par l'étrangeté et l'idée du handicap. Trop nombreux sont ceux qui paient un lourd tribut à la stigmatisation et au renoncement thérapeutique. Pourtant des progrès considérables ont déjà été accomplis durant les 50 dernières années. L'identification des désordres neurobiologiques sous-jacents à ces maladies, la mise en évidence du poids de l'environnement dans leur déclenchement annoncent des avancées majeures en matière de recherche et surtout de traitement.

 
Les données de l'épidémiologie, le poids et le coût des maladies mentales rendent indispensable une évolution radicale des investissements en recherche et dans l'organisation graduée de l'offre de soins. Pour la psychiatrie du XXIème siècle, l'objectif n'est plus de prendre en charge et d'accompagner les malades mais de guérir les maladies mentales.
Pour y parvenir, une mobilisation nationale et internationale à l'image de celle qui fut engagée il y a quelques années contre le cancer est indispensable.
 
Proposition de méthode et Recommandations de l'Académie Nationale de Médecine pour un Plan National pour la Santé Mentale et la Psychiatrie.

Aucune action ponctuelle ne pourrait satisfaire l'ambition imposée par la situation de la psychiatrie dans notre pays : une mobilisation nationale s'impose ,à l'instar de ce que fut le plan cancer,adossée à une méthode et une approche exhaustives. Une vaste concertation associant médecins, psychologues, professionnels de santé, acteurs sociaux, représentants des patients et des familles devrait en être le préalable.
Sur cette base, une équipe pluridisciplinaire pourrait être chargée de proposer aux pouvoirs publics une stratégie d'ensemble, allant de la recherche aux soins et à l'insertion sociale.
Pour mettre en œuvre ce plan et sensibiliser la société à la réalité des maladies mentales, il faut une structure visible et totalement dédiée, un Institut National pour la Santé Mentale et la Psychiatrie.

Sans préjuger de ce que seraient les principales mesures d'un plan national, l'Académie nationale de médecine considère qu'il devrait prendre en compte les 5 priorités suivantes.

 
1-Placer la recherche en psychiatrie au rang de priorité nationale et internationale.
 
2-Mettre en place un dispositif de première écoute et d'orientation s'appuyant sur un réseau renforcé de Maisons des adolescents.
 
3-Eriger l'éducation de la population et des professionnels sociaux et sanitaires à la santé mentale et aux signes des maladies mentales au rang de priorité

4-Soutenir le rôle sentinelle du médecin généraliste pour la détection des maladies mentales et l'orientation des patients vers une offre de soins graduée du soutien psychologique à la prise en charge des cas les plus complexes.

5-Créer un Institut National pour la Santé Mentale et la Psychiatrie comme catalyseur d'une ambition nationale.

A l'image de l'InCa pour le cancer, l'Institut devra être l'outil de la mise en œuvre d'un plan national pour la psychiatrie avec une attention particulière à la structuration des réseaux de recherche et de soins en vue d'une généralisation des bonnes pratiques et de l'accès de tous et en tout lieu à des soins et des prises en charge d'excellence. L'Institut devra également jouer un rôle central en terme de diffusion de la connaissance des maladies mentales auprès de la population.

 
La réussite d'un tel institut suppose une adhésion de la communauté psychiatrique : il doit être mis en place en étroit partenariat avec, notamment, les professionnels hospitalo- universitaires de la psychiatrie.


L'Institut devra également lancer la mise en place de projets pilotes de coordination des acteurs au plan local. A ce titre, dans le cadre territorial des départements-candidats, les différents acteurs (système de soins, départements, régions, services de l'Etat, associations...) pourraient s'engager dans la mise en place des ordonnances de vie permettant aux malades les plus touchés d'avoir accès à un traitement personnalisé ainsi qu'à une prise en charge sociale susceptibles de favoriser l'indispensable insertion dans la vie collective.
Ces projets pilotes conduits par les acteurs sanitaires et sociaux ainsi que financiers devront faire l'objet d'une évaluation externe sur une base médicale mais aussi économique : l'enjeu est dedémontrer que l'amélioration de la qualité des soins et des prises en charge permettra de dégager des marges de manœuvre financières.