Qui est votre chirurgien-dentiste ?



Est-ce un chirurgien qui est dentiste ou un dentiste qui est chirurgien ?

Le chirurgien-dentiste est un professionnel de santé qui pratique l’art dentaire. On l’appelle dentiste par convenance. Son exercice va des soins dentaires les plus simples à des tra- vaux prothétiques et chirurgicaux plus complexes.

Mais pourquoi en avons-nous tellement peur ? Probablement à cause de ses ancêtres ! Voici, pour commencer, une petite histoire de l’art dentaire.

On a découvert les premières traces de traitements dentaires dans les civilisations sumériennes, indoues, chinoises, et égyptiennes, datant de -3000 av. J.-C. Les Égyptiens furent d’ailleurs à l’origine d’une croyance erronée, mais à quel point tenace (jusqu’au Moyen Âge !), selon laquelle les dents seraient rongées par des vers.

Ce n’est qu’à partir de la Renaissance que les connaissances et techniques se multiplient, grâce aux travaux d’anatomie de Léonard de Vinci. Mais, à cette période de balbutiements, les gens se faisaient plutôt « arracher » leurs dents par les chirurgiens-barbiers, dentistes improvisés entre deux coupes de cheveux. Tout le monde devenait tôt ou tard édenté (comment faire autrement...) et la perte des dents n’était d’ailleurs pas perçue comme un grand dommage.

Au siècle des Lumières, les progrès accomplis sont impressionnants et Pierre Fauchard, « dentiste » de Louis XIV, devient le père de l’art dentaire moderne. Dans son ouvrage Le chirurgien-dentiste ou traité des dents, il évoque déjà les relations entre les affections dentaires et les maladies générales, ainsi que les dégâts des déchaussements. Il conseille alors d’utiliser des éponges fines trempées dans de l’eau tiède comme produit d’hygiène dentaire. Il est aussi le premier à étudier les conséquences du tabac récemment importé en Europe, et à confectionner les premières prothèses dentaires à l’aide de scies à menuiserie, de pinces coupantes et de tournevis ! Mais, seule la haute bourgeoisie et l’aristocratie pouvaient se vanter d’en bénéficier.

À cette époque, la profession est en pleine évolution mais tarde à s’organiser. Les techniques sont hasardeuses et rudimentaires, et les dentistes n’ont ni formation, ni expérience. La porte est grande ouverte aux arracheurs de dents !

Nul ne leur échappait ! À la question « ça va faire mal ? », ils répliquaient par un « non » d’une grande confiance, tandis que l’extravagance théâtrale et les roulements de tambours cou- vraient les cris de douleurs. De quoi laisser des traces dans la mémoire collective pour les générations à venir...

Ces charlatans, qui se produisaient sur les places publiques et dans les foires, avaient élu domicile près du pont Neuf à Paris. Vers 1720, le plus célèbre d’entre eux, par sa taille et sa voix puissante, s’appelait le Grand Thomas. On raconte qu’il expédiait ses clients après les avoir « soulagés », chez la mère Ragone, au bas du pont Neuf, qui leur vendait de l’eau de vie. Un autre, Laurent Mourguet, abandonna sa tenaille pour se consacrer aux spectacles de marionnettes, où le célèbre personnage de Guignol prit naissance. Ce n’est que bien plus tard que sa marionnette deviendra le héros de spectacles pour enfants.

Au xixe siècle, l’essor est sans précédent avec la première école dentaire fondée en 1828 aux États-Unis, ainsi que la création de revues et sociétés scientifiques qui marquent l’avènement de toute une profession. C’est aussi l’époque d’un gigantesque marché pour dents d’occasion, en provenance des victimes de guerre, comme celles de la guerre civile américaine ou de Waterloo en Grande-Bretagne.
L’école dentaire de Paris ouvre ses portes en 1880, et le premier diplôme naît en 1892. Les cabinets dentaires commencent à s’implanter dans les villes et à s’équiper de matériels performants.

Les conditions de travail s’améliorent avec l’électricité qui met fin à l’emploi de la bougie, et le scialytique supprimera bientôt les ombres gênantes ; les fauteuils inclinables font leur apparition, le crachoir et la pompe à salive remplacent la cuvette pour cracher, et la salle d’attente voit le jour.

L’innovation majeure est la roulette à pédale. Les premiers tours sont à pieds, puis à suspension, et la vitesse atteint 600 tours par minute. Aujourd’hui, les instruments les plus modernes sont à air comprimé et atteignent 400 000 tours par minute ! Le laser, les ultrasons, l’informatique, les radiographies et photos numériques ont envahi les cabinets.

La profession s’est aussi structurée au fil du temps avec la création de l’Ordre des chirurgiens-dentistes en 1941, et l’Académie dentaire en 1956. Quant aux études, elles commencent par une difficulté de taille : le concours, commun avec celui des études de médecine. Puis le parcours est ensuite de longue haleine : cinq ans supplémentaires avant de pouvoir exercer.

Il est aussi possible d’opter pour un 3e cycle, afin de se spécialiser dans des domaines plus complexes, comme la parodontie (traitement des déchaussements), l’implantologie, l’endodontie (traitements des racines), la pédodontie (soins des enfants), l’occlusodontie (mécanique de l’engrènement dentaire), ou l’orthodontie (réalignement des dents). L’art dentaire est donc devenu une discipline médicale scindée en de nombreuses spécialités, et les praticiens ne cessent d’affiner leur formation en se perfectionnant.

   Franck Amoyel   
                                                                              

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