Mobilisons-nous pour que nos enfants soient soignés demain
Comment soigner 20 millions de Français allergiques sans allergologues ? C’est l’une des questions que la réforme des études médicales du 3e cycle fait émerger. Bien au-delà de la défense d’une profession, il s’agit surtout d’une problématique de santé publique à laquelle le Gouvernement devra apporter une réponse claire et concrète. Au lendemain du printemps et l’occasion de la Journée française de l’allergie, le mardi 22 mars, les allergologues rappellent l’urgence sanitaire face à une pathologie qui ne cesse de se développer, de se complexifier et de s’aggraver et qui touchera, selon l’Organisation mondiale de la santé, 50 % de la population mondiale en 2050.
La disparition volontaire et programmée des allergologues exclusifs
La Commission Nationale des Études de Maïeutique, Médecine, Odontologie et Pharmacie (CNEMMOP), chargée de travailler sur la réforme des études médicales du 3e cycle, devait rendre son avis le jeudi 17 mars. Cet avis n’est pas encore public. Néanmoins, les membres de la Commission ont déjà confirmé aux représentants des allergologues l’intégration de quelques heures de formation complémentaire en allergologie au sein de disciplines généralistes comme la médecine interne ou la médecine générale, en lieu et place de la création d’une vraie spécialité qui permettrait de répondre au besoin urgent de formation de médecins allergologues.
Or si aucune spécialité permettant de pérenniser la formation n’est créée, non seulement de nouveaux allergologues exclusifs ne seront plus formés mais, avec une moyenne d’âge de la profession de 57 ans aujourd’hui, il n’y aura plus d’allergologues exclusifs d’ici 15 ans. Pourtant, les allergies touchent au quotidien près d’1 Français sur 3 et, loin des idées reçues, ce sont des pathologies qui peuvent être graves, allant jusqu’au décès dans leurs formes les plus sévères : allergies alimentaires, allergies aux venins, asthmes sévères notamment. Elles représentent également un coût très important pour la collectivité (arrêts de travail, baisse de la productivité...).
Véritables maladies de civilisation, leur prévalence a considérablement augmenté notamment sous l'effet de la pollution et du réchauffement climatique, passant de 3% de la population touchée en 1968 à 30% aujourd’hui. D’après l’Organisation mondiale de la santé, la moitié de la population occidentale en souffrira d’ici 2050.
Il est donc essentiel de prendre la mesure de cet enjeu sanitaire et de préserver le métier d’allergologue via la création d’un diplôme d’études spécialises (DES) d’allergologie, soit une formation de spécialisation en 4 ans qui permettra de pérenniser la profession et de développer la recherche associée.
L’allergologue, seul professionnel de santé capable de traiter efficacement les allergies
Les allergologues sont aujourd’hui des médecins généralistes ou spécialistes qui ont complété leurs études par 2 ans de formation à l’issue de leur cursus pour devenir allergologues. Ils peuvent suivre un diplôme d’études spécialisées complémentaires d’allergologie et immunologie clinique (DESC de type 1) après leur internat, ou bien suivre une capacité d’allergologie.
Grâce à leur formation transversale, les allergologues sont à même de diagnostiquer et d’accompagner les patients dans le suivi de leurs allergies. À la différence des autres spécialistes, ils
grandissantes.
Les allergologues aujourd’hui sont soit des spécialistes d’organe - pneumologue, dermatologue - soit des allergologues exclusifs, seuls à même de prendre en charge les allergies multifactorielles et les allergies alimentaires, dont le nombre a explosé depuis dix ans. On ne compte que 1 200 allergologues en France soit 1 praticien pour 17 000 patients. Le nombre de patients allergiques, notamment les plus sévères d’entre eux, nécessiterait qu’environ 70 allergologues supplémentaires soient formés chaque année.
Les allergologues ne sont aujourd’hui pas suffisamment nombreux pour accompagner les patients devant l’être. Cela a des répercussions sur la prise en charge des patients : actuellement, les délais d’attente pour consulter un praticien sont de 3 à 6 mois, laissant le temps aux pathologies de se développer et de se complexifier.
Cela a également pour conséquence d’importants coûts directs comme indirects. Par exemple, le coût total moyen de la rhinite en France est estimé à 1,6 milliard d’euros dont 75% de coûts indirects, tandis que l’asthme représenterait 1,5 milliard d’euros dont 35% de coûts indirects.
Pour le Dr Isabelle Bossé, présidente du Syndicat français des allergologues : « Nous sommes déjà aujourd’hui trop peu nombreux pour prendre en charge tous les patients allergiques qui le nécessitent. Demain, avec la réforme, l’allergologie représentera seulement quelques heures de formation complémentaire au sein de disciplines généralistes comme la médecine interne ou la médecine générale. Cela reviendrait à supprimer purement et simplement les allergologues exclusifs. La situation serait alors dramatique pour la prise en charge des personnes allergiques, notamment ceux souffrant des formes les plus sévères, que ce soit les adultes ou les enfants ».
QUELQUES CHIFFRES - 30% de la population française touchée, contre 3,8% en 1968
Les allergies, c’est...
- la moitié de la population mondiale touchée d’ici 2050 selon l’OMS
Les allergies, ce n’est pas un simple nez qui coule, c’est...
- chaque année, 4 crises en moyenne (dont 1 crise grave), 4 recours aux urgences et 1 hospitalisation pour les
patients souffrant de rhinite allergique
- des journées d’école manquées pour 35% des enfants souffrant d’allergies respiratoires sévères
- une baisse de la productivité pour 42% des personnes allergiques dans leur ensemble, qui peut entrainer jusqu’à la perte d’une promotion, un changement de travail ou un départ anticipé à la retraite
... et des coûts réels pour notre système de santé
- 7 millions de journées d’arrêt de travail par an à cause de l’asthme
- 1,6 milliard d’euros pour la rhinite, dont 75% de coûts indirects (absentéisme, baisse de la productivité, traitements symptomatiques inefficaces, baisse de la qualité de vie...)
- 1,5 milliard d’euros pour l’asthme, dont 35% de coûts indirects
En France, on compte environ 1 200 allergologues. Cela représente :
- 1 allergologue pour 17 000 patients
- un déficit d’environ 70 allergologues chaque année
- entre 3 et 4 millions de patients seulement pris en charge chaque année
À propos du Syfal :
Le Syndicat français des allergologues est l’instance représentative des médecins allergologues, qu’ils exercent en libéral ou dans le cadre hospitalier. Le Syfal fait entendre la voix des allergologues auprès des instances professionnelles et des pouvoirs publics. Il s’engage également en faveur de l’amélioration de l’information sur les allergies, qui touchent aujourd’hui près d’un tiers de la population.