La médecine traditionnelle coréenne et la médecine traditionnelle chinoise

  Actrice portant le costume traditionnel d’une mudang quand elle officie

Actrice portant le costume traditionnel
d’une
mudang quand elle officie

 

© Grancher

Des concepts mythologiques, philosophiques et scientifiques complexes sont à la base des nombreuses traditions médicales en Asie et sur l’ensemble de la planète.

La médecine traditionnelle chinoise (TCM) est enracinée dans la vision taoïste de la nature et de l’humanité telle qu’elle apparaît dans le plus ancien ouvrage de médecine chinoise traditionnelle : le Classique interne de l’empereur Jaune ou Classique interne de Huangdi Nei Jing8. La théorie du yin-yang  et la théorie des cinq phases sont les principes fondamentaux du taoïsme mis en œuvre dans le développement de la TCM.

Les fondements de la médecine traditionnelle coréenne (TKM) ont été influencés par les mêmes théories philosophiques que la TCM. Cependant, la TKM se caractérise par un système médical qui bifurque tel un embranchement à partir du tronc commun de la TCM en intégrant d’autres principes et aspects issus de philosophies orientales distinctes.

Des concepts philosophiques centraux sont au cœur de la TCM. Premièrement, le qi est vu comme la substance fondamentale de l’univers. Deuxièmement, la TCM se focalise sur l’univers physique et sa nature plutôt que sur les êtres vivants et la nature humaine. Troisièmement, la dynamique de l’univers est animée d’un perpétuel changement issu de l’alternance des énergies yin et yang et des cycles des cinq phases. Par conséquent, ces changements peuvent être observés et prédits. Quatrièmement, la santé et la longévité d’un individu sont principalement déterminées par sa conformité à respecter les lois de la nature. En d’autres termes, l’idée taoïste de Wu Wei11 est au cœur des principes de traitement et de la médecine préventive dans la TCM.

La médecine constitutionnelle Sasang (SCM)
Les principes de la médecine constitutionnelle Sasang (SCM), formalisés par écrit pour la première fois dans le Dongui Susebowon, sont fondamentalement basés sur un point de vue néoconfucianiste de la nature et de l’humanité. La médecine constitutionnelle Sasang s’appuie sur les quatre concepts suivants :
• l’importance et la primauté de l’homme et des êtres vivants sur la nature. Les êtres humains existent aussi sur le propre plan de l’humanité, un plan indépendant de la nature. Ils sont alors influencés par deux facteurs : le contexte sociétal et les relations humaines, qui comprennent la relation à soi et les relations interpersonnelles ;
• la philosophie Sasang organise et classe tous les phénomènes, y compris l’énergie, la matière de l’univers, la vie et le vivant, à travers une boussole à quatre axes, quatre habitus : l’activité humaine, l’esprit (caractère), le corps (forme et constitution physique) et la matière (constituants, biologie, physiologie). La théorie Sasang établit les êtres humains sur deux niveaux : l’esprit et le corps. L’esprit est ensuite subdivisé en quatre expressions : la disposition innée de sa nature émotionnelle (seong-jeong12) s’exprime en douleur, colère, joie et contentement (plaisir). Le corps est lui aussi divisé en quatre systèmes en considérant les quatre principaux organes : les poumons, la rate-pancréas, le foie et les reins. Cette théorie quaternaire systémique forme le contour de l’étude de la physiologie et de la psyché humaine par la SCM ;
• la SCM prend en compte la variabilité individuelle. Les caractéristiques mentales et physiques d’un individu peuvent se manifester à un niveau plus large que ce premier découpage en quatre classes différentes. La mise en évidence de caractéris- tiques physiques d’un corps humain prédéterminées congénita- lement au sein des quatre organes permet de comprendre l’équilibre fonctionnel, la physiologie et les pathologies d’un individu ;
• la SCM s’efforce de préserver la santé et la longévité à travers l’identification et la gestion constitutionnelle des individus en préconisant le mode de vie et les changements de com- portement adaptés à chaque catégorie. Ainsi, les aliments et les remèdes convenables seront différents en fonction des constitutions ou types.
La SCM s’étend bien au-delà d’une simple prescription médicale. Elle souligne l’importance de l’auto-observation, de la responsabilisation de chacun dans la préservation de sa santé et de la prévention de la maladie. La clé se trouve dans les recommandations des modes de vie compatibles avec la constitution à laquelle nous appartenons.

La notion de constitution en Occident et en Orient
Chaque culture a défini, en fonction de sa propre vision et compréhension du monde, une manière de regrouper les êtres humains selon des trames, motifs invariants, ressemblances, liés à la comparaison de leurs caractéristiques morphologiques, biologiques, physiologiques, psychologiques. Le tableau ci-après synthétise les différentes tentatives de ces « mises en boîtes » et permet de se familiariser avec cette notion de constitution. Leurs diversités historiques illustrent le fait qu’une personne n’intègre jamais parfaitement bien un moule catégoriel.

La « constitution » peut être définie comme l’ensemble des attributs physiques et des caractéristiques fonctionnelles qui sont globalement forgés par des déterminants héréditaires et les facteurs environnementaux. Le « type » est une catégorie de per- sonnes qui se ressemblent sur un grand nombre de caractéristiques et qui se différencient d’une autre catégorie de personnes.

Depuis Hippocrate, l’influence du climat joue un grand rôle dans les manifestations des symptômes à l’origine d’un déséquilibre organique pouvant conduire à une maladie. Certaines constitutions sont plus sensibles à certains déséquilibres saisonniers que d’autres et expriment, selon les circonstances climatiques, des pathologies de types très différents. Établir le diagnostic constitutionnel d’un patient peut être une entreprise très délicate. Il passe, en général, par de longs questionnaires appréhendant toutes les dimensions des plans d’existence d’un individu. Faire référence à une catégorie de constitution signifie se concentrer, mettre l’accent sur une ou deux tendances dominantes issues d’une observation attentive du patient. Les praticiens doivent cependant se méfier de ne pas tomber dans le piège réducteur d’exclure toutes les autres possibilités de diagnostics après avoir fait un choix constitutionnel... N’oublions pas que les êtres humains sont des assemblages complexes, organiques, subtils et dynamiques, qui ne peuvent pas être si facilement réduits à une case.
Les catégories ou motifs constitutionnels les plus connus proviennent des médecines traditionnelles chinoise, indienne, grecque... Les différentes constitutions sont classées en trois « dosha » en médecine ayurvédique, trois « diathèses » en homéo- pathie ou oligothérapie, six « typologies » en médecine énergé- tique chinoise... et quatre en médecine Sasang coréenne.

Selon la constitution de chaque individu :
• les problèmes de santé sont différents d’une personne l’autre, dans le même contexte ;
• les troubles présentés sont plus ou moins forts ;
• les capacités d’élimination des toxines, de réaction aux soins
et d’adaptation aux divers stress varient.

La recherche médicale démontre, par exemple, que les types d’enzymes fabriquées par le corps ou encore les capacités immunitaires ne sont pas fixés définitivement et peuvent varier largement d’un individu à l’autre.

Pierre  Ricono         
                                                                              

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