Gérer un covid long

Par le Docteur Fabrice Goudot
Chirurgien orthopédique, a participé à la gestion de crise du Covid
à l’hôpital Raymond Poincaré de Garches
(établissement référent en infectiologie)

Je suis chirurgien orthopédique. J’opère pour partie à la clinique Jouvenet (Paris 16e) et pour partie à l’hôpital de Garches (je travaille souvent là-bas en collaboration avec les infectiologues pour les patients souffrant d’infections articulaires). Au début de la pandémie, lors du premier confinement en mars 2020, les consignes des autorités étaient claires : on n’opère pas, sauf les urgences (fractures, tumeurs). Du jour au lendemain, je suis passé d’un emploi du temps très dense à zéro activité. Impossible de rester comme ça ! Je me suis donc proposé pour aider mes collègues dans le pavillon en face du bloc opératoire : l’unité de maladies infectieuses. J’ai alors participé au dépistage : je me suis retrouvé en premier ligne, pour trier les personnes saines, les malades « légers », les malades « graves ». À l’époque, le dépistage était réservé aux soignants. Il fallait tous les jours changer de protocole, de ceci, de cela, se réinventer : on apprenait à (un peu) connaître le virus, à se comporter pour se préserver. Parallèlement, l’administration de l’hôpital était totalement dépassée, du coup c’est le corps médical qui a repris la main sur le fonctionnement hospitalier : on retrouvait un esprit de camaraderie, tout le monde se retroussait les manches pour travailler ensemble, c’était un super-boulot !

En grattant un peu, même chez les patients considérés comme guéris, il peut rester des symptômes
On savait déjà que le virus ne se contentait pas d’aller dans les voies respiratoires, car les patients se plaignaient également de fourmillements, de troubles digestifs, cutanés, maux de tête... Mais, petit à petit, on a vu que, chez certains patients, les symptômes duraient plus longtemps, disons, chez un patient sur dix. Et si l’on regardait encore plus attentivement, on pouvait observer que, même chez les patients apparemment guéris, des difficultés persistaient. Par exemple, personnellement, j’ai attrapé le Covid en mars 2021. À l’époque je faisais du sport, je courais pas mal. J’ai eu un Covid relativement léger – fatigue, fièvre, toux... - et qui n’a duré que quatre jours. Aujourd’hui encore, en septembre 2021, j’ai commencé à reprendre la course à pied, mais c’est plus difficile ! Je m’aperçois qu’en fait, je n’ai pas entièrement récupéré. Et si ces réminiscences de virus ne me gênent pas vraiment dans mon quotidien, cela ne veut en aucun cas dire qu’il en va de même pour tout le monde.

Covid-long : la double peine
Parmi mes patients, qui viennent forcément me consulter pour raisons chirurgicales – qui ont à la base des problèmes articulaires –, certains ont attrapé le Covid et ont développé une forme grave, nécessitant parfois une hospitalisation. Ceux-là ont vu leurs problèmes moteurs s’aggraver, avec une rééducation et une récupération bien plus lentes et complexes. On a dû reporter leurs interventions initialement prévues car, à cause de leur Covid-long, ils n’étaient pas en état d’être opérés. Double peine pour eux, qui souffraient alors de leurs douleurs « d’avant » et de celles du Covid-long en prime, sans possibilité d’opération à court et moyen termes. Parmi les symptômes dont ils se plaignaient aussi, il y a essentiellement une grande fatigue, des difficultés à bouger. Comme si tout demandait plus d’énergie. Naturellement, tout cela a un impact sur le quotidien, les jours et les nuits, bref, ce que l’on appelle la qualité de vie. Une notion essentielle !


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