DU LAIT DE NOS GRANDS-MÈRES A CELUI DE NOS JOURS

Depuis des millénaires, en Occident, l’allaitement maternel ne répond pas automatiquement au choix des mères mais bien à celui de la société. Vers la fin de la 2ème guerre mondiale, en Europe, par exemple, un grand nombre de femmes se retrouvent obligées de travailler dans les industries, afin de remplacer les hommes disparus à la guerre. On a besoin de nourrir une famille, des enfants, de se vêtir.


Depuis des millénaires, en Occident, l’allaitement maternel ne répond pas automatiquement au choix des mères mais bien à celui de la société. Vers la fin de la 2ème guerre mondiale, en Europe, par exemple, un grand nombre de femmes se retrouvent obligées de travailler dans les industries, afin de remplacer les hommes disparus à la guerre. On a besoin de nourrir une famille, des enfants, de se vêtir. La pauvreté fait des ravages. Il est normal d’aller gagner un peu d’argent pour survivre. Des crèches sont créées et répondent efficacement aux besoins des mères de famille qui ont un emploi. Le lait de vache a été conditionné afin de permettre aux bébés de se nourrir. Il s’agit du « lait maternisé », grâce auquel la mortalité infantile n’augmente pas. Les médecins commencent à avoir confiance en cette poudre magique et la préconisent. Des biberons de plus en plus pratiques et sophistiqués apparaissent sur le marché. Le nombre de femmes qui allaitent baisse de moitié. Le biberon prend le dessus et connaît la faveur populaire.

Depuis 1950, la plupart des femmes accouchent en milieu hospitalier. L’assistance médicale est omniprésente pour la mère et l’enfant. Le père lui, mis de côté, vient contempler sa progéniture à travers la vitre de la pouponnière. Des horaires stricts sont mis en place pour manger, dormir, et pour les soins. L’éducation est précoce et rigide. Allaiter toutes les 3-4 heures pour permettre au bébé de bien digérer et laisser le lait remplir les seins, afin de préparer la prochaine tétée. Voici les quelques règles à observer à l’époque.


Ma première grossesse s’est déroulée pendant l’année 1981, j’avais 20 ans. J’ai accouché par césarienne. J’ai laissé le personnel soignant s’occuper de notre petite fille. Je me fiais aux « Reposez-vous, on s’en occupe ! » qui étaient parmi les phrases clé en vigueur dans les maternités à l’époque. Quand j’ai commencé à allaiter, j’étais en pleine «montée de lait», je trouvais ça épatant, mes seins gonflés, le lait qui déborde... Mais, nouveau conseil, on me recommanda de ne pas lui donner le sein à moins de trois heures d’intervalle, pas plus de cinq minutes pour éviter les crevasses. Et forte de ces bons (mauvais) conseils, je suis rentrée à la maison. En fait, ma fille ne pleurait pas, ne réclamait pas le sein, des tétées toutes les 4 heures et à la pesée hebdomadaire, la courbe a commencé à s’infléchir. J’ai commencé à lui donner le biberon. En octobre 1983, nouvel accouchement, toujours par césarienne, même philosophie à la maternité, même consignes pour le retour. Mais, à la maison, j’ai très vite rencontré un bébé pleureur, j’étais perdue. Je croyais que je n’avais pas assez de lait, et que c’est ce qui causait son chagrin. J’ai commencé à sevrer ma petite fille... Quelle galère ! Elle ne supportait pas le lait artificiel, on a joué aux apprentis sorciers, le pédiatre et moi, ... avant qu’enfin (comme pour les pleurs), elle ne se résigne à accepter le mode de vie qu’on lui imposait. Il eut été si simple de m’installer dans le rocking- chair, de nous laisser vivre, elle et moi, simplement, l’un tout près de l’autre, de me relaxer en sa compagnie et de laisser monter le lait, mon lait, le seul qu’elle voulait, le seul qui lui convenait.

                                                             Nancy


Comment la mère et le bébé peuvent-ils dans ces conditions établir un lien et comment la sécrétion lactée peut-elle prendre place facilement, quand on sait qu’un sein trop peu stimulé donne moins de lait ? Le corps médical, très attentif aux besoins nutritionnels du bébé, donne vite des compléments de lait industriel sans se soucier de l’importance d’une mise au sein précoce, efficace et fréquente du bébé pour un démarrage adéquat de la lactation. Le processus de l’allaitement artificiel est en place. Et la mère, qu’en pense-t-elle ? N’aimerait- elle pas prendre son bébé dans les bras et le mettre plus souvent au sein ? A son envie, s’oppose souvent la crainte des crevasses et celle de gâter trop son enfant. On ne parle même plus de l’allaitement maternel. Seules, les mères motivées et enthousiastes persévèrent presque en cachette. Gare à celles qui montreraient un sein nourricier en public. Et pourtant, sur les plages, la nudité est banalisée.

Anna  Rousseaux de Léo

 

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Fleur de lait, l'allaitement