Douleur ponctuelle ou douleur chronique ?


Chronique ou ponctuelle ? C’est une question particulièrement importante, autant en ce qui concerne la compréhension de la douleur que les stratégies à mettre en œuvre pour la soulager. Ainsi, la douleur provoquée par une brûlure ou une ecchymose est appelée à se dissiper spontanément, au fur et à mesure que les tissus lésés se cicatrisent. Les soins, qui visent à « accompagner » et à favoriser cette récupération, peuvent donc rester, eux aussi, ponctuels.

La situation est différente quand la douleur devient chronique, soit que son origine ne puisse être corrigée (comme dans certaines douleurs articulaires inflammatoires), soit que la douleur se soit inscrite au point de persister après que sa cause a été soignée. La prise en charge de la souffrance doit alors être plus globale. En plus des soins antalgiques ponctuels, certaines modifications de l’hygiène de vie (alimentation, activité physique...), la pratique d’exercices antistress (respiration, relaxation...) et une meilleure gestion des émotions permettent de mieux supporter la douleur, d’en limiter l’ampleur et de diminuer la fréquence des poussées.

Dans ce cas, il faut agir sur plusieurs niveaux en même temps, même en dehors des poussées douloureuses, en mettant en place des habitudes quotidiennes mieux adaptées à la situation, y compris dans des domaines qui n’ont pas une relation directe avec la douleur. Un exemple : on sait à quel point la douleur chronique, peut trans- former une vie, voire la faire glisser progressivement vers une simple « survie ». Elle crée de nombreuses perturbations, notamment au niveau du sommeil. Or, le sommeil a une forte dimension de réparation neuro-physio-biologique. Un bon sommeil est donc essentiel dans la lutte contre les douleurs chroniques*.

Une autre question intrigue les chercheurs : pourquoi certaines douleurs peuvent devenir chroniques chez les uns et céder rapide- ment chez les autres ? La réponse est à chercher dans les méandres de notre cerveau. Une étude, réalisée par une chercheuse en neurosciences** de l’Université Northwestern à Chicago, Vania Apkarian, montre clairement des différences dans les voies de circulation de l’information entre les différentes zones du cerveau impliquées dans la douleur, scanners à l’appui. Ce qui fait dire à la chercheuse que l’on pourrait aujourd’hui, en observant le cerveau des patients, savoir lesquels vont développer une douleur chronique, et lesquels vont voir leur souffrance s’atténuer puis disparaître dans un temps raisonnable.

Cette « prédiction », qui n’existe aujourd’hui qu’à titre expérimental, serait difficile et onéreuse à mettre en place. Elle serait pourtant utile afin que les personnes concernées puissent se « préparer » mentalement et émotionnellement à la souffrance. Car on sait à présent à quel point l’équilibre mental et psycho-émotionnel module la perception de la douleur. Mais n’allons pas trop vite...

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Témoignage
Jacques, 46 ans : « J’ai réappris à dormir et ma douleur a commencé à refluer »
« Je souffre de polyarthrite chronique depuis plus de quinze ans. La douleur est quasi permanente. c’est très usant. J’ai fini par perdre l’appétit et le sommeil, sans compter une déprime contre laquelle je n’avais pas la force de lutter. J’ai consulté différents médecins, sans grand résultat. Jusqu’à ce que je rencontre un sophrologue. un ami dentiste m’avait parlé de l’efficacité de cette technique qu’il utilisait pour éviter l’anesthésie dans les interventions légères. À ma grande surprise, ce thérapeute m’a dit que nous allions d’abord travailler sur mon sommeil. Il est vrai que j’étais dans un état d’épui- sement intense, je ne dormais que deux ou trois heures par nuit même lorsque la douleur ne me réveillait pas. Il m’a expliqué qu’il fallait d’abord que je retrouve mon énergie physique et psychique, avant de penser à lutter contre la douleur. en deux semaines, mon sommeil s’est rétabli et j’ai retrouvé un tonus dont j’avais oublié l’exis- tence. Je parvenais mieux à gérer ma douleur. J’avais moins mal. ensuite, nous avons pu travailler directement sur ma souffrance et ma manière de la vivre. ce travail m’a vraiment changé la vie. même si la maladie est toujours là, elle ne domine plus ma vie ! »

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Docteur Yann Rougier / Marie Borrel

 

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