C’est dans les védas, textes sacrés de la tradition indienne, que l’on trouve le terme de mandala avant de le rencontrer dans le bouddhisme. Le terme concerne l’organisation de la structure du Rig Veda, structure articulée sur dix « recueils », appelés cycles ou mandalas.
En sanskrit (tradition indienne), le terme de mandala signifie cercle. Les mandalas sont connus dans la tradition indienne sous forme de diagrammes symboliques, illustrant pour la plupart les textes sacrés.
Les Tibétains lui donnent la signification de cercle, de centre, d’essence.
C’est, actuellement, la tradition bouddhiste tibétaine qui rend le mieux compte de l’art sacré du mandala. Le mandala n’est pas une œuvre d’art au sens occidental du terme : il n’y est nullement question d’esthétique, même si ces diagrammes sont très harmonieux. Le mandala répond à des codes très élaborés et s’inscrit dans une pratique spirituelle où il n’y a pas de place pour une libre interprétation de l’artiste.
Durant sa réalisation, des moines prient et psalmodient les mantras ; d’autres, véritables artistes, tracent le mandala, qui outre la concentration demandée, est une méditation en relation avec les fondements du bouddhisme.
Le mandala est ce qui entoure, contient, rassemble, protège l’es- sence. Cette essence est le plus souvent la divinité, le Bouddha, soit, symboliquement, l’esprit du méditant.
Sa Sainteté le Dalaï-Lama donne une précision supplémentaire quant à la notion d’ « entourer » : il y ajoute celle d’ « extraire ». L’usage du terme de mandala est différent en fonction des contextes. Certains consistent en une offrande aux êtres supérieurs et à l’ensemble du système cosmique ; certains se réfèrent plus à la concentration ; d’autres encore développent l’esprit d’Éveil par la méditation... La pratique de chacun permet d’en extraire la signification. Peint, dessiné ou tracé au sable, ce n’est pas sa représentation en tant que telle qui en fait un mandala, mais le fait qu’il permet d’entrer en soi-même, de cheminer vers l’essence de son être.
En fonction des contextes auxquels il s’applique, il peut être associé à une initiation, soit secrète soit publique comme pour le mandala de Kalachakra, ou être associé à une offrande. Selon les cas on offre le mandala à la divinité ou aux éléments. Dans la pratique bouddhiste, il existe aussi l’offrande du mandala qui est une offrande en imagination aux différents bouddhas et qui se pratique par un mudra1 des mains.
Le sens le plus courant du mandala est celui qui désigne la repré- sentation d’un ensemble de divinités composé de la divinité principale et de son entourage. Cet ensemble est réparti dans une structure carrée faisant office de demeure et que l’on appelle palais.
Le Bouddha ou la divinité principale est au centre et représente l’essence du mandala. Elle est au centre d’un espace s’ouvrant sur les quatre directions par quatre portes. L’organisation est structurée en plusieurs étages représentant les composants de l’univers. De multiples détails y sont figurés sous forme de symboles ou de déités relatifs au mandala de la divinité principale. Cette structure carrée est entourée de cercles qui font office de protection et de purification. Sur le plan graphique ces cercles s’inscrivent dans la tradition spirituelle et sont en lien avec les attributs du Bouddha. Symboliquement, en termes de cheminement intérieur, ils représentent la purification des émotions et de l’esprit nécessaire avant toute progression sur la voie de l’Éveil. Les portes symbolisent les quatre pensées incommensurables du bouddhisme (l’amour, la compassion, la joie, l’équanimité). Les huit piliers intérieurs représentent l’octuple sentier... La représentation des mandalas reflète les éléments des fondements du bouddhisme.
Lorsqu’on regarde un mandala, on va le voir en trois dimensions. Selon la manière dont on va le regarder, soit le centre va nous apparaître dans la profondeur, soit en avant. De même, en fonction de la manière dont on va le contempler, notre regard sera attiré par une couleur en particulier (celle d’une porte). Le travail entrepris sera différent en fonction de la porte sur laquelle notre regard va se porter en premier.
La réalisation de certains mandalas se fait avec du sable, comme pour celui de Kalachakra. Réalisé pour le bonheur et le bien de tous les êtres, œuvre de compassion appelée « la cité suprême de la grande libération », il est une prière aux trois plans du corps, de la parole et de l’esprit.
Au plan corporel, il est une prière par les mains qui accomplissent des gestes minutieux et ritualisés. Les mains des moines deviennent les mains de la sagesse et de la compassion qui œuvrent à la réalisa- tion du mandala, symbole de l’état d’Éveil.
Au plan de la parole, sa création est accompagnée d’une longue prière à Kalachakra matin et soir, avant et après la session, et de la récitation du mantra1 pendant toute sa réalisation.
Dans les lieux où est exposé ce mandala de sable, le public reste des heures à le contempler. Il s’opère une véritable transformation, même chez un public non initié aux enseignements tantriques. Cette transformation est révélatrice de l’impact de ce mandala. Il rayonne d’une vitalité intense et particulière qui apporte calme et paix à ceux qui le contemplent.
Le terme de mandala traduit cette vitalité intrinsèque et repré- sente la quintessence contenue dans le réceptacle du mandala. La traduction tibétaine du terme sanskrit de mandala, signifiant « centre – périphérie », restitue cette dynamique d’interaction, d’interterdépendance propre au mandala et aux fondements du bouddhisme.
Après cette cérémonie du mandala, on procède à sa destruction. Défaire un mandala c’est symboliser l’impermanence, un autre des principes de base du bouddhisme.
Le vrai mandala répond à une codification stricte, s’inscrit dans des formes symboliques et correspond à une initiation.
L’Occident a vu dans les mandalas l’aspect esthétique et les utilise comme support de détente en les coloriant, mais un travail avec le mandala s’inscrit dans un processus de croissance et de maturation intérieurs. C’est Carl Gustav Jung, psychologue et psychiatre suisse, qui, dans l’exploration des profondeurs de l’inconscient, a découvert des formes géométriques proches de celles des mandalas. Aussi, pour lui, le mandala est le symbole de l’individualisation ; il est à la fois chemin vers le centre en même temps qu’il exprime celui-ci, il nous permet de cheminer vers le centre et de retrouver la voie vers le Soi dans les moments chaotiques.
Le mandala exprime notre totalité.
Le Soi est au centre, les éléments de la psyché entre la périphérie et le centre : la globalité de la personne s’organise autour du Soi, centre du mandala. Le support du mandala par sa fonction unifica- trice permet de rassembler les différents matériaux psychiques, de les organiser et d’apaiser les tensions entre les contraires : la personne ressent un apaisement après ce travail.
C’est en regard de cette démarche psychologique que le travail avec le mandala vous est proposé.
1. « Mudra » signifie geste, sceau. Les mudra sont des gestes où deux parties du corps sont reliées (doigts entre eux ou main et autre partie du corps). Ces gestes, outre un sens symbolique, mettent en relation des points énergétiques et favorisent certains états.
Laurence Luyé-Tanet
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