Ruptures : pourquoi on n’arrive pas à y croire

 Parce-que nier l’évidence est un processus psychologique qui se met naturellement en place pour soulager une souffrance trop forte. On se dit que « ce n’est pas possible » le temps de reprendre son souffle, de retrouver un peu d’énergie. On pense aussi que l’amour est encore si présent (le nôtre) que cette relation ne peut pas s’arrêter. Nous imaginons que notre force de conviction, que nos déclarations d’amour, que nos explications vont venir à bout de ce « malentendu ». Il faut dire que l’on continue à repasser en boucle le film des bons souvenirs, des moments « magiques »... Gare aux fantasmes ! Ils sont nos pires ennemis. Ils nous aveuglent sur la réalité d’une relation désormais boiteuse ; boiteuse parce qu’elle ne repose plus que sur nous. À moins que l’on nous aime encore...


Parce-que nier l’évidence est un processus psychologique qui se met naturellement en place pour soulager une souffrance trop forte. On se dit que « ce n’est pas possible » le temps de reprendre son souffle, de retrouver un peu d’énergie. On pense aussi que l’amour est encore si présent (le nôtre) que cette relation ne peut pas s’arrêter. Nous imaginons que notre force de conviction, que nos déclarations d’amour, que nos explications vont venir à bout de ce « malentendu ». Il faut dire que l’on continue à repasser en boucle le film des bons souvenirs, des moments « magiques »... Gare aux fantasmes ! Ils sont nos pires ennemis. Ils nous aveuglent sur la réalité d’une relation désormais boiteuse ; boiteuse parce qu’elle ne repose plus que sur nous. À moins que l’on nous aime encore...

Ceux qui sont déjà passés par bien des ruptures savent qu’il entre dans l’amour une bonne part d’attirance mais surtout une grande part de fantasmes. L’amour arrive quand les deux rêvent dans la même direction : « Nous sommes faits l’un pour l’autre, nous aurons des bébés, une famille, je serai ta Jane tu seras mon Tarzan, tu seras ma muse et moi ton Picasso... » Ces rêves sont si beaux – en tout cas à nos yeux – qu’on ne peut pas croire que l’autre quitte le navire à savoir le couple qui les porte. Comment peut-on renoncer à être Jane, Tarzan, Picasso...


CE N’EST QU’UNE CRISE...
Face à la brutalité de la rupture et à la puissance d’une souffrance crue, certains mécanismes psychologiques se mettent en place d’eux-mêmes pour atténuer la douleur. Le plus connu s’appelle le déni. Il se résume en une seule phrase : « Je n’arrive pas à y croire ! » Autrement dit, nous traversons une mauvaise passe mais tout va s’arranger. Ce n’est qu’une crise de plus. Ce déni est normal s’il dure le temps d’encaisser le choc et de se rendre à l’évidence mais certains n’arrivent pas à franchir cette étape cruciale. On peut s’enliser des années dans l’espoir vain qu’il ou elle reviendra. Si cette illusion (car c’en est une dans la majorité des cas) s’éternise, il peut s’avérer utile de consulter un psy pour savoir si l’on vous fait marcher ou si vous souffrez d’une sorte de « fixation » amoureuse à dénouer...


On voit des amoureux transis s’accrocher à un souvenir minime indéfiniment remâché et bâti autour d’un regard, d’un frôlement de mains de grands romans d’amour qui, dans la réalité, n’ont parfois jamais commencé. Cependant nos rêveurs ont vu « des signes », laissant leur entourage perplexe voire éberlué. Ainsi ce célibataire de 50 ans amoureux de... sa coiffeuse. Il lui fait des cadeaux, en offre à son petit garçon, vient se faire couper les cheveux deux fois par mois, l’admire en se cachant dans les recoins du centre commercial où elle travaille. Elle est toute sa vie ! Mais cinq ans plus tard, hormis ces quelques cadeaux, il ne sait toujours pas si la jeune femme est dans les mêmes dispositions. Un ami le convainc finalement de le laisser lui poser la question : aime-t-elle son client ? Mais non, pas du tout. Elle voit bien ses avances. Elle le trouve « bien gentil », pas plus. D’ailleurs, elle a autre homme dans sa vie...

L’amoureux semble soulagé : « Au fond, c’est mieux comme ça ! Maintenant, je sais à quoi m’en tenir ! » Il décide de reprendre sa vie en main, de cesser de rêver, de changer de coiffeuse... Son entourage applaudit mais quelques semaines plus tard, il revient la voir, persuadé que « quelque chose est encore possible ». Il l’aime tant ! Elle ne peut pas rester indifférente... Sans l’aide d’un psy, ce triste Roméo chantera toute sa vie : « J’ai encore rêvé d’elle. Elle n’a rien fait pour ça... Donnez-moi l’espoir. Prêtez-moi un soir, etc. »

Une bonne part de fantasmes
Il entre dans l’amour une bonne part de fantasmes. Quand on idéalise mais aussi quand on désidéalise. Sinon, comment notre Roméo pourrait-il idolâtrer sa coiffeuse et croire sincèrement qu’elle est la femme de sa vie ? Ils n’ont échangé que des banalités, ils ne se sont jamais embrassés. Et pourtant, durant toutes ces années, il n’a cessé de la prendre dans ses bras, de lui faire l’amour, de lui prêter des gestes doux, des paroles tendres... en rêves. Sa Juliette, c’est lui qui l’a fabriquée à partir de trois fois rien. Pas étonnant qu’elle soit « faite pour lui » comme dans la chanson. Elle est devenue la femme de sa vie intérieure pas celle de la réalité. Aimer quelqu’un, revient à vivre avec lui, qu’il soit là ou pas. C’est en faire l’homme ou la femme de ses pensées et se laisser habiter par cette image qui prend la place qu’on veut bien lui donner. Roméo ne vit pas un instant sans elle. Il est prisonnier des rêves qu’il s’est fabriqués. Il n’est pas heureux. Il se rend bien compte que sa vie n’avance pas et ses amours non plus. Qu’il perd son temps, son existence à... rêver. Mais quand il arrête, il éprouve un tel sentiment de vide et de désespoir qu’il retourne bien vite à ses fantasmes. Comme les adeptes de secte, les toxicomanes, il s’est laissé envahir par une drogue qui a pour nom passion.

Et si nous n’arrivions pas à y croire pour les mêmes raisons ? Pour continuer à avoir de l’espoir, pour ne pas affronter le vide, le sentiment d’amputation qui nous accable si on nous retire notre merveilleux support de rêve. Parfois nous avons fait tant de bêtises pour cet amour qu’il serait trop atroce de devoir s’en passer. Adeline a quitté son mari mais aussi ses enfants qu’elle a laissés à leur père pour vivre une folle passion qui l’a embarquée... au Mali. Elle a changé de vie, oublié le passé, son éducation et même sa couleur de peau. Jusqu’au moment où elle s’est aperçue qu’elle était à côté de sa plaque. Son homme n’avait pas qu’elle en tête. Elle n’était pas prête à le partager et elle pensait à sa fille qui passait son bac, mais comment revenir avec ce poids de remords et de honte ?

On n’arrive pas à réaliser quand il serait trop dur de ne plus y croire...
La seule solution consiste à être soutenus par des amis, un thérapeute et cela sérieusement pour ne pas s’effondrer devant ce qu’on appelle alors « tout ce gâchis ». Heureusement, Adeline avait une sœur qui a fait le pont entre elle et ses enfants, entre elle et leur père. Elle l’a hébergée, sans jamais la juger ni la culpa- biliser pour qu’elle ose peu à peu se regarder en face. Pour qu’elle ait le courage d’affronter les siens, et sa honte surtout.

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QUELLE PLACE POUR L’AMOUR ?
Le mal d’amour est proportionnel à la place donnée à ce sentiment. Si nous avons laissé l’autre nous envahir comme un adorable Alien. Si nous sommes devenus fusionnels, fondus en lui, vivant pour elle... Ceux qui se donnent totalement au point de ne pas équilibrer leur vie entre différents pôles : le travail, les amitiés en dehors du couple, le sport, les loisirs... risquent de se trouver bien démunis quand le couple cassera (si cela arrive, bien sûr). Dans ces cas-là, la rupture a des conséquences dramatiques puisque nous n’avons aucun recours, aucun appui. Certains deviennent comme fous. Pour créer du lien malgré l’autre, ils le surveillent, le harcèlent, infiltrent sa nouvelle vie. À moins qu’ils n’attentent dans les cas extrêmes à la vie de leur ex-amoureux ou à leur propre vie. Parmi les 160 000 tentatives de suicide enregistrées chaque année, et les 12 000 qui hélas ont une issue fatale, quel pourcentage relève du mal d’amour ?
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La dernière raison pour ne pas vouloir y croire, c’est de sentir que nous sommes toujours aimés. En vingt ans, Laetitia en a fait des crises ! Elle s’est même mariée à un autre... pendant dix ans et aux États-Unis mais Bruno et elle se connaissaient depuis l’adolescence. Il a été son premier amour. Il voit bien qu’elle fond quand il prend une voix tendre, quand il la regarde avec ses yeux doux, quand il l’appelle de ce surnom qui lui rappelle son enfance, son père : « Ma Puce... » Comme d’habitude, elle reviendra bien qu’il la traite par-dessus la jambe, bien qu’il la trompe, bien qu’il oublie les anniversaires alors qu’il sait être sa seule famille...

Seulement voilà, Bruno se trompe. Cette fois Laetitia le quitte pour de bon. Et pourtant, il a raison, elle l’aime toujours, mais quelque chose a radicalement changé. Et ce quelque chose est qu’elle ne veut plus souffrir, qu’elle ne veut plus être traitée comme un chien. C’est une décision qu’elle a prise, et elle est irrévocable. Car elle a compris – c’est tout récent – qu’on ne fait pas l’amour avec des si... Si seulement il était plus gentil... Si seulement, il me disait qu’il m’aime... On fait l’amour avec des oui. Et comme il ne cesse de lui dire non, elle va passer son chemin. Continuer de l’aimer parce qu’elle ne peut pas faire autrement (pour l’instant) mais sans le voir, sans l’entendre, sans « aller chercher des baffes ». Elle ne va plus rien attendre, garder de lui un souvenir charmant, comme on aime le chocolat mais sans en manger parce qu’on sait que c’est mauvais pour sa ligne. Eh bien, elle va continuer de l’aimer mais sans en croquer parce qu’elle sait qu’il est mauvais pour son bonheur...

Bruno n’arrive pas à y croire car il n’a pas compris que cette fois, elle ne VEUT plus l’aimer !

 

Patricia Delahaie
 

                        
                                                                              

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