Le cerveau et les fausses croyances

le rôle premier du cerveau humain est de nous maintenir en vie, il possède une impulsion primaire qui se nomme instinct de survie
Comme le rôle premier du cerveau humain est de nous maintenir en vie, il possède une impulsion primaire qui se nomme instinct de survie et qui le pousse automatiquement à éviter les dangers potentiels qui risqueraient de nous mettre en péril. Pour un enfant, la douleur occasionnée par une très grande peine ou un sentiment de détresse est aussi effrayante et sans doute même plus qu’un danger de mort réelle. Il a l’impression inconsciente qu’il ne pourrait survivre à la souffrance. Son cerveau met donc tout en branle pour lui épargner cette impression et il le fait de manière mécanique, automatique. Parce qu’elle s’installe durant l’enfance, au moment où la logique n’est pas encore développée, chaque fausse croyance-équation contient intrinsèquement une impression inconsciente de danger pour la survie et cette menace perdure même à l’âge adulte, tant que la croyance demeure.

Une fausse croyance-équation relative à la perception de la vie peut être soit positive : la vie égale facilité, soit négative : la vie égale difficultés. Ainsi, la personne abritant la fausse croyance-équation qui dit que la vie égale facilité tient pour acquis que la vie doit toujours être facile et, par conséquent, elle subit difficilement l’existence des obstacles et des complications. La personne qui, au contraire, a développé la fausse croyance-équation que la vie égale difficultés considère que la vie est difficile à tous les instants et que les moments qui semblent faciles doivent sûrement cacher des problèmes à venir.

Voyons le processus de développement de croyances-équations opposées avec les exemples de deux jeunes enfants dont l’un est persuadé que la vie égale satisfaction alors que l’autre croit profondément qu’elle égale insatisfaction.

Henri, un garçon de huit ans, a acquis la certitude que la vie égale satisfaction. Pour ses parents, il est vraiment le centre du monde et ils répètent constamment qu’il est extraordinaire qu’il mérite ce qu’il y a de mieux. Il est habillé telle une carte de mode, croule sous les jouets et les cadeaux et fréquente une école privée réputée. Lorsque surviennent des décisions scolaires qui apportent de la déception ou de l’insatisfaction à Henri, ses parents s’opposent au professeur et même à la direction, prenant toujours le parti de l’enfant. Il a ainsi développé la croyance que la vie devrait TOUJOURS lui apporter la satisfaction. Il n’a pas appris à composer avec les déplaisirs inhérents à toute vie et il les considère «anormaux». Puisque ses parents partent toujours en guerre contre ceux qui refusent de le satisfaire, il a appris que l’insatisfaction est une ennemie à abattre et que, de ce fait, elle représente un danger. Pour lui, la satisfaction est synonyme de vie et de normalité, alors que l’insatisfaction est anormale et menaçante. Sa logique naissante l’amène à développer une équation inconsciente :

Parce que l’insatisfaction apporte la déception et la souffrance, elle représente un danger.
‚Quel est le meilleur moyen de ne pas être déçu et donc de ne pas souffrir ? Obtenir ce que l’on veut.
‚Et pour obtenir ce que l’on veut, il faut demander, exiger et ne pas accepter de refus.

Pour Henri, l’insatisfaction égale donc danger, ce qui amène son cerveau à mettre tout en branle pour s’assurer que sa vie soit toujours satisfaisante et donc, sécuritaire.

Nous retrouvons exactement le cas contraire dans l’exemple de Sophie, une fillette de neuf ans qui a développé la croyance que la vie égale insatisfaction. Elle est très méfiante et a une forte tendance à la bouderie. Sa mère exprime constamment ses insatisfactions et met l’enfant en garde contre toutes les déceptions qu’elle aura à affronter dans la vie. Lorsque la petite se plaint de son professeur, du service de garde ou des autres élèves, sa mère lui rappelle que la vie est ainsi et qu’elle n’a pas à se surprendre puisque les gens sont toujours décevants. Sophie essaie d’assimiler les enseignements maternels, mais elle ne peut s’empêcher d’être peinée lorsque surviennent des déceptions, ce qui la fait souffrir et la pousse à un certain découragement. Sa logique naissante l’amène à développer une équation inconsciente :
‚ Quel est le meilleur moyen de ne pas être déçue et donc de ne pas souffrir ? Ne pas avoir d’attentes.
‚Et si l’on sait que la vie sera toujours décevante et insa- tisfaisante ? On n’attend rien et, donc, on n’est pas déçu et on ne souffre pas.
Sans même en être consciente, Sophie a enregistré une fausse croyance qui dit que la vie égale insatisfaction et croit dorénavant que l’insatisfaction la protège de la souffrance. Parce qu’ils risquent de créer des attentes et de l’espoir, et ultimement de la déception, la satisfaction et le plaisir deviennent des menaces à son équilibre psychologique et son cerveau cherche à éviter ces états ou, à tout le moins, à ne jamais mettre l’accent sur eux. Tant qu’elle demeure persuadée que la vie est toujours insatisfaisante, elle n’espère rien et croit ainsi se protéger de la souffrance et même de la détresse. Lorsqu’elle râle ou boude, elle se sent en sécurité, en contrôle et bien vivante. Elle se sent donc vivante dans l’insatisfaction.

Aussi illogiques soient-elles, ces croyances-équations forcent le cerveau à réagir en fonction de la programmation qu’elles contiennent. C’est une simple question de recherche d’équilibre, de survie psychologique.

De la même manière, si on démontre à un enfant que la quiétude est synonyme de sécurité ou que la turbulence est dangereuse, il deviendra convaincu que la vie doit égaler le calme. L’instinct de survie qui le guide le poussera à rechercher la pondération pour s’assurer de demeurer en vie. Il peut se sentir en danger lorsqu’il se trouve en situation d’agitation et devenir possiblement incapable de relever les défis de la vie qui exigent parfois d’être très actif. Il fera tout en sorte pour saboter différentes situations d’action perçues par lui comme trop périlleuses.

Si au contraire il développe la croyance que la vie égale batailles continuelles, parce qu’il a construit sa fausse croyance-équation sur des situations ou des phrases telles qu’il faut toujours lutter pour avoir ce que l’on veut ou encore que, dans la vie, il n’y a rien de facile, son instinct de survie l’incitera à rechercher la confrontation. C’est en combattant qu’il se sentira vivant. Pour cette raison, il aura l’impression d’être en danger lorsqu’il se trouvera en période d’accalmie et il provoquera alors divers problèmes ou même des catastrophes afin de se sentir rassuré par les nombreuses batailles à mener.

Lorsque de telles tumeurs psycho-cancéreuses se généralisent à l’ensemble du fonctionnement, elles risquent de mener à une fatigue extrême, au découragement, à la dépression et même au désespoir qui, chacun à leur manière, représentent une menace de mort psychologique.

 

 

Louise Red

 

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