En avril 2008, des chercheurs de l’université d’Umea (Suède) annoncent la découverte d’un épicéa âgé de 9550 ans, le plus vieil arbre existant jusqu’à présent. Tout comme celui-ci, la famille existe depuis fort longtemps, mais sa structure s’est fortement modifiée au cours des années. Au moment où la religion catholique dominait, les gens se mariaient « pour le meilleur et pour le pire », donc « jusqu’à ce que la mort les sépare », ce qui représentait deux parents et plusieurs enfants et petits-enfants. Très souvent, les grands-parents vivaient également avec un des enfants ou l’un d’entre eux demeurait à la maison et continuait le travail des parents tout en ayant sa propre famille. Donc, les grands-parents de cette époque vivaient directement avec quelques-uns de leurs petits-enfants, mais ils avaient tendance à travailler jusqu’à leur mort, ayant une espérance de vie plus courte qu’aujourd’hui.
Depuis la fin du xixe siècle, plusieurs changements, dont la loi sur le travail pour les enfants, l’instruction obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans ainsi que le mouvement des familles vers les centres urbains, ont contribué à diminuer la taille des familles. On a pu constater une diminution du taux de fécondité et du nombre de mariages avec une augmentation du nombre de familles monoparentales. Lorsque la Seconde Guerre mondiale fut déclenchée, les familles se retrouvant sans mari, sans père, sans frère ni fils, les femmes durent travailler dans les milieux auparavant réservés aux hommes. Dans l’après-guerre, le monde occidental a constaté une augmentation du taux de divorce et de remariage expliquée par les mariages hâtifs afin d’éviter aux hommes d’aller à la guerre, ainsi que le remariage de veuves de guerre.
Entre 1946 et 1965, c’est la période du baby-boom où les gens en général se marient plus jeunes et ont une plus grande famille (environ 3 enfants par femme).
C’est vers les années 1960 que la pilule contraceptive fait son apparition, mais elle ne devient légale en France qu’en 1967. Ceci explique en partie la diminution du nombre d’enfants ; entre 1975 et 1991, le taux est de 1,8 enfants par femme. Dans ces mêmes années, on constate une augmen- tation du nombre de divorces.
Selon l’INSEE (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques), en 2011, un enfant sur dix (11 %) vivait dans une famille recomposée en France métropoli- taine, ce qui représente 1,5 million de jeunes de moins de 18 ans sur les 13,7 millions de Français de moins de 18 ans vivant alors en famille en France métropolitaine. La majorité d’entre eux (940 000) vivaient avec un parent et un beau-parent alors qu’un tiers (530 000) de ces enfants vivaient avec leurs deux parents et leurs demi-frères ou demi-sœurs, d’après l’étude. Il y avait 720 000 familles recomposées en France en 2011, ce qui représente 9 % des familles comptant au moins un enfant mineur.
Il fut une époque où le mariage précédait la naissance du premier enfant. En 2009, c’est l’inverse. Les habitudes ont changé : jusqu’à la fin des années 1960, la forme d’union la plus fréquente des couples était le mariage et peu de naissances survenaient en dehors (7 % en France). À partir des années 1970, le nombre d’enfants nés hors mariage en France a progressé de manière spectaculaire. En 2009, un peu plus de la moitié des enfants sont issus de parents non mariés.
En France, le taux de fécondité reste élevé : en 2012, les nouveau-nés ont été aussi nombreux à voir le jour dans l’Hexagone qu’en 2011 (792 000 en 2012 pour 793 000 en 2011) et l’indicateur de fécondité s’est maintenu à 2 enfants par femme. La moyenne d’âge à l’accouchement s’élève (30,1 ans en 2012).
Est-ce que ces données signifient que nous en sommes à accorder de l’importance à la famille ? En voyant le grand nombre de publications, d’associations et de regroupements pour les familles, les parents et les grands-parents, on dirait bien que oui. Tôt ou tard, il y aura fort probablement un retour aux « racines ». D’ailleurs, au cours d’une conférence, le docteur Michel Lemay, pédopsychiatre au Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine de Montréal, utilisait la belle image de la spirale pour illustrer le retour des modes tout en ayant des acquis de plus. Cela peut s’appli- quer tant sur le plan psychologique que sur le plan familial ; il y a un retour aux familles, au fait d’avoir des enfants, mais les acquis antérieurs permettent aux femmes et aux couples de choisir et peut-être de dire non lorsque c’est nécessaire.
Quelques statistiques
Selon l’INSEE, en 2011, les personnes de 65 ans ou plus représentaient le sixième de la population française. Si les tendances démographiques récentes se maintiennent, la France métropolitaine comptera 73,6 millions d’habitants au 1er janvier 2060, soit 11,8 millions de plus qu’en 2007. Le nombre de personnes de 60 ans ou plus augmentera, à lui seul, de 10,4 millions entre 2007 et 2060, si bien qu’une personne sur trois aura ainsi plus de 60 ans. Jusqu’en 2035, la proportion de personnes âgées de 60 ans ou plus progressera fortement. Cette forte augmentation est transitoire et correspond au passage à ces âges des générations du baby- boom.
La population des aînés est majoritairement composée de femmes. En 2013, les femmes représentaient 58 % des Français de 65 ans et plus. Fait encourageant, l’écart entre l’espérance de vie des hommes et des femmes diminue. En France, l’espérance de vie moyenne est légèrement supé- rieure à 80 ans, est à la hausse et s’accompagne d’une meil- leure qualité de vie (meilleure forme physique).
Malgré tous les changements dans sa structure au cours du siècle dernier, la famille demeure toujours bien vivante au sein de la société. Les années à venir continueront de voir arriver une cohorte particulière de grands-parents : les baby-boomers, en pleine transition vers cette nouvelle étape, qui le deviendront autour de l’âge de 50 ans. Contrairement à leurs prédécesseurs, ils auront moins de petits-enfants, en moyenne quatre, puisqu’ils auront mis au monde environ deux ou trois enfants. Dans cette génération, 80 % des grands-pères et 60 % des grands-mères auront un conjoint à la naissance de leur premier petit-enfant 3.
Selon l’INSEE, en 2011, la France métropolitaine compte un peu plus de 15,1 millions de grands-parents, soit 2,5 millions de plus qu’en 1999. Parmi eux, 14,7 millions vivent à domicile en ménage ordinaire, et entre 400 000 et 500 000 en collectivité. Les grand-mères (8,9 millions) sont plus nombreuses que les grands-pères (6,2 millions).
Les relations entre grands-parents et petits-enfants se sont modifiées au fil du temps. Les grands-parents ont actuellement plus de possibilités qu’avant, et la hausse de l’espérance de vie permet aux enfants, aux parents, aux grands-parents et même aux arrière-grands-parents de passer plus d’années ensemble. Cette situation en entraîne une autre : les baby-boomers se retrouvent un peu coincés en « sandwich » entre s’occuper de leurs propres parents vieillissant tout en prenant encore soin d’enfants qui n’ont toujours pas quitté la maison et consacrer du temps à leurs petits-enfants.
Un nombre croissant d’enfants naissent de partenaires en union libre, ce qui signifie qu’une minorité significative de personnes deviennent grands-parents par le biais de relations de cohabitation ou d’union de fait de leurs enfants.
Les grands-parents ont de plus en plus de place dans notre société ; ainsi, en France, la fête des grands-mères a commencé en 1987. La fête des grands-pères est célébrée le premier dimanche du mois d’octobre, elle existe depuis 2008 mais il s’agit d’une fête qui n’est pas enregistrée sur le calendrier officiel.
Toutes ces statistiques nous dressent un portrait de notre société, mais elles ne sont là qu’à titre de référence puisqu’elles ne tiennent pas compte des différences individuelles. Toutefois, ce que je tiens à faire ressortir ici, c’est la multitude de grands-parents qui sillonnent notre société : naturels, adoptifs, de familles recomposées. Ils occupent une place importante, tant sur le plan statistique que sur le plan psychologique des familles, de par leurs histoires, leurs témoignages et leurs regards admiratifs envers les petits. C’est pour eux que ce livre est écrit et pour faciliter leur apport aux familles, ce que vous découvrirez dans les prochains chapitres.
Nathalie Parent
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