
La métaphysique, telle qu’Aristote l’a inaugurée, se définit comme l’étude de « l’être en tant qu’être ». S’engager dans une formation en métaphysique, c’est avant tout plonger dans cette interrogation primordiale sur la nature même de l’existence. Loin de se limiter à un simple exercice abstrait, cette démarche veut sonder les principes premiers qui régissent tout ce qui est, en dépassant les apparences sensibles pour atteindre l’essence même des choses. À l’aube de son travail, l’étudiant apprend donc à considérer la métaphysique comme une science de l’être, c’est-à-dire comme une quête de compréhension de l’ensemble des réalités qui se tiennent au-delà du domaine empirique. C’est dans cet esprit que la formation initie aux concepts d’acte et de puissance, de substance et d’accident, mais aussi à la distinction essentielle entre ce qui est contingent et ce qui est nécessaire.
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Au cœur de tout parcours métaphysique se trouvent trois questions fondamentales : comment définir l’Être, existe-t-il un non-être et, enfin, quelle marge de vérité offre cette discipline par rapport aux sciences empiriques ? Dans la première interrogation, l’apprenant découvre la pluralité des sens que l’on peut attribuer à l’Être : réalité première d’une substance, concept universel ou même attribut suprême de la divinité. Aristote mettait en avant, quant à lui, la notion de l’Être comme « ce dont on ne peut penser le contraire », un principe qui se décline selon des catégories diverses, de la matière première à la forme intelligible. La question du non-être invite à déterminer si quelque chose qui n’est pas peut exister comme tel, ou si, au contraire, tout non-être n’est que simple privation de l’Être véritable. Cette réflexion conduit à établir la différence entre l’Être en acte, qui subsiste pleinement, et l’Être en puissance, qui apparaît comme la possibilité d’être.
La seconde problématique majeure repose sur le contraste entre la science et la métaphysique. Là où la science se fonde sur l’observation, l’expérimentation et la validation empirique, la métaphysique cherche à dépasser ces limites pour atteindre des causes premières, invisibles à l’œil nu. Ainsi, si la physique décrit le mouvement des corps et la chimie étudie la composition des substances, la métaphysique s’interroge sur les raisons ultimes de ces mouvements et sur ce qui rend possible toute substance. Le scientifique dresse des lois qui s’appliquent à un champ d’observation donné, tandis que le métaphysicien s’aventure à formuler des propositions qui s’appliquent à l’ensemble de ce qui est, qu’il s’agisse de l’ordre cosmologique, de la réalité de l’esprit ou de la notion même de nécessité. Dans ce cadre, la formation en métaphysique enseigne à adopter une posture analogue à celle de Descartes lorsqu’il différenciait la métaphysique comme « subjecte » des autres sciences, car elle vise la connaissance des réalités premières, inaccessibles à la méthode strictement expérimentale.
La métaphysique spirituelle s’attache à interroger la dimension transpersonnelle ou transcendante de l’être. Elle ne se contente pas de décrire l’Être en acte et les causes premières, mais cherche à élucider la nature de l’âme, le rapport entre le corps et l’esprit, ainsi que l’existence possible d’un Au-delà. Dans ce contexte, la formation propose une approche plus spéculative qui s’appuie sur les traditions mystiques, la philosophie de l’esprit et, parfois, les grandes religions. L’étudiant étudie alors les démonstrations classiques de l’existence d’un principe immatériel, d’un « premier moteur immobile » ou d’une conscience universelle, tout en confrontant ces hypothèses aux objections formulées par les sceptiques. Par ce biais, la métaphysique spirituelle ouvre une voie vers l’intuition de réalités qui échappent aux seules catégories rationnelles, invitant à un exercice de méditation conceptuelle où la raison dialoguera avec l’intuition.
Le parcours de formation en métaphysique se construit progressivement, en alternant lectures des grands auteurs – Aristote, Thomas d’Aquin, Descartes, Kant, Heidegger – et exercices analytiques visant à cerner les présupposés de chaque courant. Les séminaires offrent un espace de discussion où l’étudiant confronte sa compréhension aux points de vue divergents, tandis que des travaux de recherche individuelle encouragent la formulation de problématiques originales. L’objectif est de développer à la fois une rigueur conceptuelle capable de manipuler des notions abstraites, et une ouverture intellectuelle permettant d’accueillir la dimension transcendantale de l’expérience humaine. À chaque étape, la formation insiste sur la nécessité d’établir un lien entre le raisonnement logique et la quête du sens, car la métaphysique ne saurait se réduire à un simple exercice formel.
S’engager dans une formation en métaphysique, c’est se donner les moyens de sonder la question de l’être dans sa totalité, d’interroger simultanément les réalités sensibles et les principes transcendants. En partant des définitions d’Aristote, en s’appuyant sur les débats entre béhavioristes et cognitivistes pour illustrer la distinction avec les sciences empiriques, et en explorant la métaphysique spirituelle, le stagiaire construit une compréhension globale des enjeux qui traversent la philosophie depuis ses origines. À l’issue de ce parcours, la métaphysique apparaît non seulement comme une discipline théorique exigeante, mais aussi comme une invitation à repenser notre rapport à l’existence, à la liberté et à la transcendance. L’étudiant, désormais formé à cette « science de l’être en tant qu’être », pourra poursuivre une démarche philosophique, enseigner ou exercer toute fonction où la réflexion sur les principes premiers trouve sa juste place.