Par Katia Bougchiche
C’ est dans la petite ville ésotérique de Glastonburry en Angleterre que je suis tombée, en me promenant, sur. le livre de La double déesse de Vicki Noble. Quelques années auparavant, alors que je déjeunais avec une amie et lui exposais mes problèmes personnels, elle m’offrit mon premier livre de la même auteure, Femme Shakti. Son cadeau allait m’accompagner alors que j’effectuais un voyage aux sources du chamanisme au Pérou et que j’étais en recherche de mes pouvoirs personnels. Il a été depuis un puits d’inspiration, de réflexion et de références pour accéder aux différentes facettes de mon féminin et aux richesses qu’elles contiennent.
C’est que Vicki Noble a le don de nous emmener aux racines du pouvoir du féminin et de ses ramifications dans l’espace et dans le temps : elle collectionne les références archéologiques avec une précision de chercheur et l’émotion d’une passionnée. Elle ne fait pas que nous replacer dans la saga des femmes de pouvoir - reines, déesses, prêtresses, femmes chamanes - mais elle nous relate l’art de vivre de ces communautés de femmes par les symboles et les objets de leur temps. Cette capacité à retrouver et poser les jalons de notre d’une initiation spirituelle.
Curieuse, attentive, connectée, elle déchiffre les traces que les prêtresses, les dakinis, les tantrikas et les femmes souveraines ont laissé sur leur passage pour nous en faire une lecture éclairante quant à notre héritage, le féminin dans son expression double et pleine.
Dans La double déesse, son propos est de nous emmener à toucher notre nature duelle dans sa complexité et son intégralité. Le féminin est double, cyclique et la correspondance entre le cycle des femmes et le cycle lunaire est l’initiation fondamentale à cette compréhension. Le croissant de la lune, sa complétude au moment de la pleine lune, sa décroissance et son absence durant 3 jours avant la nouvelle lune sont une métaphore de l’énergie féminine qui connait des allers et venues dans les profondeurs de la psyché, des morts symboliques, des rencontres terrifiantes avec le démembrement et le morcellement de la personnalité et tout aussi régulièrement, une renaissance et un renouveau propre à la transfiguration. Ce phénomène est un préalable à toute révélation de soi et au pouvoir intérieur véritable.
L’ouvrage La double déesse nous initie à cette double dynamique de la nature féminine, de flux et de reflux, de naissances et de morts, de saignements et de fécondité. Les sculptures, les figurines, les bijoux répertoriés, issus des civilisations matriarcales et transmettant cet enseignement, ont vocation à nous rappeler à notre essentiel, à une profondeur et à une puissance inestimable de notre identité de femme.
Dans les sociétés matriarcales, on y apprend que la gouvernance n’était pas l’apanage d’une seule femme mais pouvait être tenue par deux sœurs ou deux régentes et, cette forme de gouvernance reflétait la capacité à la coopération et à la solidarité. Les figurines de double déesse, partageant un seul bas de corps ceinturé et au visage double, illustrent cette disposition à un partage de la fonction royale et à la souveraineté du féminin quand ce dernier s’ancre dans sa nature plurielle sans honte et sans culpabilité.
En reprenant les mythes fondateurs de l’énergie féminine et de son génie, Déméter et Perséphone, Innana et sa descente aux enfers auprès de sa sœur, le propos de La double déesse prend tout son sens. Les fouilles archéologiques ne nous sont signifiantes que quand elles s’accompagnent d’une réflexion sur nous-mêmes et d’excavations de nos potentiels, de nos dons, de nos terreurs.
Nous sommes transformées avec chaque archétype que nous rencontrons comme la mue de notre utérus lors de nos menstruations et retrouvons une partie de nous-mêmes dans le miroir que La double déesse nous tend.
Dans ce cheminement visant à restaurer notre intégralité physique, psychique et spirituelle, la double déesse nous apporte des réponses fondamentales. Il s’agit avant toute chose de créer des alliances : celles de femmes de plusieurs époques et civilisations qui ont rempli leur fonction de prêtrises ou de femmes souveraines en utilisant les objets de pouvoir à même d’opérer une transformation du monde et d’elles-mêmes, en transmettant à leur fille et à leur sœur les secrets de l’énergie féminine, ses symboles, et en les accompagnant lors de leur descente mensuelle dans les tréfonds de leurs entrailles, dans le dédale de leur psyché.
Car cet ouvrage nous ramène sans cesse à ce lien qui unit les femmes dans leur bassin et qui les rend si similaires : la synchronisation au cycle lunaire, la physiologie qui leur est propre et qui leur donne à vivre des marées émotionnelles, le lien unique qui les ancre à la terre – cet élément fondamentalement soutenant – à la grande déesse-mère et à leur farouche besoin de vie sauvage et de liberté. L’énergie féminine détient une connaissance cellulaire, instinctive, intuitive, viscérale de la nature et de son environnement immédiat. Les femmes-oiseaux, les chamanes de l’air et de la pluie sont autant d’exemples jalonnant l’histoire des femmes à la conquête et à l’exploration de leur dimension stellaire et à l’expression de leur pouvoir oraculaire.
La double déesse est donc tout autant un livre de recherches reprenant l’étude des civilisations matriarcales les plus impor- tantes de notre histoire et leur héritage qu’une initiation aux deux visages du féminin comme voie d’accès à sa souveraineté de femme, et l’alliance des forces des femmes dans le lien de sororité ou dans la transmission matrilinéaire.
Au fil des pages, nous découvrons une boîte à trésors où la rigueur de la recherche s’allie à la sagesse intrinsèque d’un féminin sensible et visionnaire. Nous y comprenons l’importance de la transmission, orale, créative ou écrite pour témoigner, enseigner, léguer, inspirer, révéler et donner à voir le puits de nos ressources, nos pouvoirs surnaturels et la richesse insoupçonnée de l’alchimie qui y est à l’œuvre.
Vicki Noble nous livre ici une œuvre de longue haleine, pour laquelle huit années de labeurs et de filatures ont été nécessaires. Nous traversons avec elle les âges et l’évolution des fonctions spirituelles féminines les plus signifiantes : de la prêtresse, à la fée, la sorcière, la tantrika, la dakini ou la chamane, la reine, aucun visage de la déesse n’est laissé en jachère et toutes retrouvent ici leurs lettres de noblesse. Les visages de la déesse se rassemblent, s’agencent pièce après pièce et tissent la fresque de l’histoire des femmes, le tissu vibratoire de leur transmission spirituelle, un habit d’ombres et de lumières, archaïque et moderne, fait de glaise, de sang, de pierres précieuses, de larmes, d’amour et de plumes.
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