
A l'heure où la crise sanitaire met en lumière une profonde défiance dans les vaccins dans un contexte de diffusion croissante des récits complotistes (ex : « Hold-up »), la question se pose de savoir quelle peut être la part d'irrationalité dans le succès des discours « antisciences » en général et dans le vaccinoscepticisme en particulier. Or, à l'occasion du lancement d'un site dédié aux arts divinatoires, l'Ifop a réalisé une enquête qui montre une croissance continue du nombre d'adeptes des parasciences (voyance, sorcellerie, astrologie...) qui, si elles font parfois sourire certains, méritent d'être analysées très sérieusement quand on sait que l'engouement pour le paranormal apparaît étroitement lié à l'adhésion aux thèses complotistes et antivaccinistes..
Publiée par la Fondation Jean Jaurès, cette note de Louise Jussian (Ifop) montre notamment comment la croissance du nombre d'adeptes des parasciences - comme la voyance, la sorcellerie ou l'astrologie - prend, dans le contexte de crise sanitaire actuele, une tournure inquiétante au regard de leur étroite corrélation avec l'adhésion aux thèses complotistes
LES CHIFFRES CLÉS
- la croyance dans l'astrologie a augmenté de 8 points par rapport à 2000, atteignant aujourd'hui les 41%
- la croyance dans les prédictions des voyant(e)s a également crue de manière continue en vingt ans (plus 8 points) pour s'élever aujourd'hui à 26%.
- Alors qu'à peine 1 Français sur 6 croyaient dans les envoutements et la sorcellerie il y a 40 ans (18% en 1981), cette forme de parasciences séduit maintenant près de 3 Français sur 10, soit 28% (+ 10 points depuis 1981).
Graphique : Le niveau de croyance dans les parasciences, évolution depuis 1981
Graphique : Taux d'adhésion aux thèses antivaccinistes en fonction de la fréquence de consultation de l'horoscope
Le point de vue de Louise Jussian, chargée d'étude à l'Ifop
La croyance dans le paranormal apparaît donc comme une pratique de plus en plus ancrée en France, notamment chez les plus jeunes, les femmes, et les antisystèmes (lepénistes, mélanchonistes...) qui se saisissent en particulier des outils fournis par ces disciplines. Ce phénomène vient contrebalancer l'idée de « l'apogée » matérialiste et scientifique de nos sociétés contemporaines qui aurait dû être renforcée par l'augmentation du temps de scolarisation. Si ce phénomène peut surprendre, il n'est pas isolé et revêt les mêmes caractéristiques que la diffusion des idées complotistes : parasciences et complotisme étant des phénomènes culturels relevant des même leviers sociaux et comportementaux, et répondant au même rejet des institutions (politique, médiatique, religieuse...). Tous deux signes d'une irrationalité de la simplicité comme moyen de pallier le déficit de confiance dans les diverses institutions censées être des guides, ces deux phénomènes sont aujourd'hui confrontés à la crise du Covid-19, catalyseur de ces courants de pensées. Parasciences et complotisme semblent être mobilisés par les mêmes personnes pour atteindre les mêmes fins : la réassurance.