Le trouble borderline en France, symptôme d’un lien social perverti

 

Approche psychosociale de la société française contemporaine
 

Le terme « borderline » est aujourd’hui devenu une sorte de « fourre-tout » sociétal, une forme d’appellation générique qui signifie tout et n’importe quoi. Mais la réalité est tout autre. C’est d’abord un véritable fléau responsable de plus de 2 000 suicides par an en France, qui touche plus de 3,5% de la population active, c'est-à-dire près de 2,5 millions de personnes, en particulier les adolescents et les jeunes adultes.  A la différence des symptômes du trouble bipolaire, les personnes qui souffrent du trouble de la personnalité borderline éprouvent au quotidien des états émotionnels (peur, colère, tristesse, honte…) incontrôlables, intenses, qui surviennent brusquement et submergent l’individu. Ils s’accompagnent d’un immense sentiment de vide intérieur, de désespoir, de solitude, d’irritation ou d’anxiété. Les origines du trouble borderline sont multiples et sont généralement liées à une somme de dysfonctionnements familiaux.

 

Pierre Nantas, psychothérapeute, revient sur les 9 symptômes qui définissent, selon le DSM V, le trouble de la personnalité borderline. En observant la société française contemporaine d’un point de vue sociologique, on ne peut s’empêcher de constater qu’elle présente, elle aussi, un grand nombre de similitudes avec ces mêmes symptômes. Opinion.

 


Tout au long de ce point de d’expert, le spécialiste du trouble de la personnalité borderline tente une approche psychosociale de la société française contemporaine :
 

 

1/ Une partie importante de la population Française s’estime abandonnée ou exclue.

Le symptôme : Peur de l’abandon. La personne fait des efforts effrénés pour ne pas se sentir seule, rejetée ou abandonnée, qu’il s’agisse d’un scénario réel ou imaginé.         

2/ Quitter son corps pour se sentir vivant

Le symptôme : Les comportements addictifs (alcoolisation massive, drogues dures, jeu vidéo, relations sexuelles à risque), en particulier chez les adolescents et les jeunes adultes, les troubles du comportement alimentaires (anorexie et/ou boulimie), les conduites à risques.

3/ De la névrose existentielle à la crise d’identité

Le symptôme : Sensation de vide intérieur. Impression douloureuse de ne plus rien ressentir, de ne plus exister, sentiment chronique de vide.

4/ Jouer avec la mort, au risque d’y laisser la vie

Le symptôme : Actes autodestructeurs. Répétition de comportements, de gestes ou de menaces suicidaires, ou d’automutilations.

5/ La recrudescence des violences urbaines

Le symptôme : Hétéro-agressivité. Colères intenses et inappropriées, souvent incontrôlables, qui s’expriment par des violences verbales sur les personnes ou physiques sur les objets.

6/ L’exigence narcissique des réseaux sociaux induit la perturbation de l’identité des individus et favorise l’émergence d’une société en faux-self.

Le symptôme : Perturbation de l’identité. Instabilité de l’image, de la notion de soi, besoin de reconnaissance exacerbé.

7/ Réussir ou disparaître. L’élimination progressive des classes moyennes débouche sur un modèle social qui exacerbe les extrêmes. A terme, n’y aura plus que des très riches et des très pauvres.

Le symptôme : Une dysrégulation émotionnelle. Sensibilité exacerbée, vision dichotomique (tout blanc ou tout noir), changements d’humeur subits et imprévisibles, réactions émotionnelles intenses, dépression et anxiété, difficulté (à trop ou pas assez) gérer sa colère.

8/ La théorie du complot

Le symptôme : Sentiment de paranoïa. Dans une situation de stress, la personne a le sentiment que l’on cherche à lui nuire ou a l’impression d’être déconnectée de la réalité.

9/ La société contemporaine favorise les modes de relations interpersonnelles instantanées, intenses, instables et éphémères.

Symptôme : Problèmes relationnels : Modes de relations interpersonnelles instables et intenses