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« Bon courage ! Je vous plains... » Je repars de l’école avec, en tête, cette maudite phrase prononcée dans la classe de mon aîné, par une maman, le jour de la rentrée. Cette femme, je ne la connais pas, elle a l’air sympa, ouverte. Je suis sûre qu’elle n’a pas voulu être blessante, qu’il s’agit presque de solidarité, voire de bienveillance. « Moi j’en ai déjà deux, alors je vais m’arrêter là, je ne prends pas le risque d’en avoir un troisième, je ne suis pas maso ! »
J’ai souri, ne sachant pas quoi répondre. Repensant à toutes ces innombrables fois où, enceinte, quand on me demandait le sexe de mon bébé et que je répondais « un garçon », on me répondait, pour l’aîné : « Vite, il faut faire une fille, c’est tellement mieux pour une maman ! », et, déjà, des « Oh non, vraiment pas de chance ! » ou « Ça va être sportif ! Bonne chance ! » pendant la grossesse de mon deuxième fils. Alors, pour mon troisième garçon, j’étais heureusement blindée (mais l’est-on vraiment ?!) pour accueillir les « Mais c’est vraiment sûr que ce n’est pas une fille ? », « Il faut changer de mari et en prendre un qui sait faire des filles, pour le quatrième enfant... ». Mention spéciale, quand même, à cette caissière du Monoprix qui s’était apitoyée sur mon sort en murmurant, mais quand même assez haut pour que toute la file des clients derrière moi entende : « Trois fils ? Comme la nature est mal faite ! »
Aujourd’hui, mon troisième garçon a huit mois et c’est toujours la même rengaine : on me plaint. De quoi ? De ne pas avoir de fille ? D’avoir une famille unisexe ? Franchement, les « Une mère est tellement plus comblée avec une fille ! » commencent à me peser... Comme si avoir un fils, aujourd’hui, en France, était un second choix.
Drôle de constat dans une société qui, par ailleurs, ne cesse de questionner la notion de genre et de remettre en cause la différenciation fille-garçon.
Pourquoi de telles réactions ? Serait-ce si différent d’élever un garçon ? Serait-ce plus difficile ? Moins joyeux ?
Les garçons, en France, aujourd’hui, ne sont pas à la fête. À l’école, ils passent pour des cancres en devenir ! Dès la maternelle, les institutrices constatent des retards de langage, de l’indiscipline (bagarres et compagnie), une moins grande capacité à suivre. Je me souviens de l’irritation de la maîtresse de mon aîné qui, lors de notre entretien à son sujet, alors qu’il était en première année de maternelle, avait soupiré : « J’ai trop de garçons dans ma classe, c’est infernal ! Les garçons, “ça” bouge tout le temps et “ça” tient moins bien son stylo ! » Avec mon compagnon, nous étions déjà, alors, parents de deux fils et avions compati poliment.
J’ai besoin d’écrire ce livre par réaction, peut-être aussi par esprit de contradiction. Certainement pas par sexisme primaire, au contraire ! Il s’agit pour moi de répondre, justement, au sexisme de tous ces stéréotypes qui collent, aujourd’hui encore, à la peau des garçons. De les mettre en question, de les pousser jusque dans leurs retranchements.
Je n’ai d’autre objectif que comprendre, chercher et partager des clés pour mieux vivre la relation mère-fils. Trouver des outils pour aider nos fils à s’épanouir loin de toute étiquette.
En tant que journaliste, c’est sur le terrain que je suis partie mener l’enquête. Je suis allée à la rencontre d’autres mères de garçons et je les ai écoutées. Ensemble, nous avons partagé nos joies et nos déboires et, surtout, les solutions que nous avons trouvées, adoptées, bricolées au fil du temps pour nos questions sur l’éducation de nos petits hommes.
Élever un garçon, pour une mère, et peut-être tout particulière- ment aujourd’hui, est un défi. Il faut trouver la bonne distance, leur apprendre à être forts, confiants, indépendants, virils, mais pas trop ! Il faut en faire des féministes convaincus mais pas des êtres émasculés. En tant que maman, il faut réussir à apprivoiser tout en inventant un nouveau lien plus libre, plus complice aussi. Car les garçons d’aujourd’hui ne sont plus les mêmes qu’hier.
Face à la multitude d’ouvrages angoissants qui fleurissent au sujet des garçons, de chiffres et d’études qui parlent de leur mal-être à l’école, de leur mal-être tout court, j’ai aussi interrogé des experts. Des orthophonistes, des directrices de crèche, des instituteurs, des pédiatres, des animateurs, des sociologues. Et des psys aussi, bien sûr. Qui tous nous ont apporté leur éclairage, leur explication, mais aussi des conseils et des solutions aux problèmes que nous pouvons rencontrer.
Je n’ai pas voulu faire un essai, ni une enquête en trois parties du type « thèse antithèse synthèse » avec démonstration et conclusion...
À vous de vous approprier ce livre, présenté sous forme d’abécédaire. Lisez-le comme si on avait une conversation entre mères de garçons, et piochez parmi les entrées qui répondent à des questions précises, au jour le jour.
Ce livre est dédié à mes fils, mais, aussi, à toutes les mères de fils, et aux pères, qui cherchent à élever leurs garçons en les protégeant le mieux possible de toutes les injonctions de la société actuelle.
Merci à toutes celles qui ont nourri mon enquête de leurs témoignages sincères et m’ont aidée à faire de ce livre un recueil d’hommages et de déclarations d’amour de mères à leurs fils.
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