Lorsque l’on commence à s’interroger sur l’origine des croyances, on ne peut être que frappé par le nombre réduit des guides ou maîtres spirituels qui ont marqué l’humanité. En effet, les enseignements prodigués successivement par Krishna, Zoroastre, Moïse, Lao-Tseu, Bouddha, Jésus et Mahomet sont à l’origine de la majeure partie des croyances partagées par l’humanité depuis près de 4000 ans. Et pourtant, les chercheurs, en science des religions, dont le regard extérieur nous est précieux par leur neutralité, notent que nous ne disposons de presque aucun élément objectif pour attester l’existence des premiers d’entre eux. Cela explique qu’ils soient souvent considérés comme des figures mythiques. Ainsi, aucune source historique ne peut étayer l’existence de Krishna qui, pour de nombreuses traditions hindouistes, serait la huitième incarnation de Vishnou. Quant à Moïse, il serait un personnage légendaire dont l’histoire aurait été mise par écrit lors de l’exil, à Babylone, de la communauté juive. Son histoire serait fondée sur de plus anciens écrits sumériens ayant trait au fameux roi Sargon qui aurait été, lui aussi, sauvé des eaux. Il en va de même pour Zoroastre, Lao-Tseu et Bouddha, pour lesquels les informations objectives qui permettraient de confirmer leur existence manquent cruellement. D’autant plus que les biographies, proposées par les traditions religieuses qui s’y réfèrent, sont souvent empreintes de surnaturel, ce qui incite de nombreux chercheurs à penser qu’elles feraient plutôt référence à des personnages fictifs ou composites au service de desseins religieux.
En ce qui concerne Jésus-Christ, un consensus se dégage pour attester de sa probable existence. Il est vrai que pour lui, nous disposons d’une documentation supérieure, mais l’objectivité oblige à constater que ces éléments se résument, somme toute, à peu de chose, et que sa biographie est finalement très mal connue. Hormis les quelques références qui lui sont faites, par l’historien juif Flavius Josèphe, la principale source d’information pour les chercheurs demeure les textes des évangiles, qu’ils soient canoniques ou apocryphes. Or ces textes, rédigés entre 50 et 150 ans après la mort du Christ, ont davantage vocation à être un enseignement religieux plutôt qu’un reportage, ce qui rend leur interprétation historique souvent hasardeuse. Enfin, pour ce qui concerne Mahomet, nous ne disposons de presque aucune information fiable, jusqu’à sa révélation à l’âge de quarante ans. En revanche, pour ce qui est de sa vie de prophète, qu’il entama alors, différentes sources documentaires objectives sont accessibles. Ces éléments furent, le plus souvent, recueillis par certains enfants de ses compagnons, mais ils ne furent mis par écrit que plusieurs dizaines d’années après sa mort.
Mais si la plupart de ces maîtres spirituels sont considérés comme des figures mythiques, nous sommes alors plongés en plein paradoxe. En effet, quand bien même Krishna, Moïse, Zoroastre ou encore Lao-Tseu ou Bouddha n’auraient pas existé, nul ne peut contester la réalité de leur influence considérable, dans des civilisations, que ce soit en Inde, au Moyen-Orient, en Iran ou en Chine, qui atteignirent leur apogée ou leur âge d’or sous l’influence des enseignements qu’on leur prête, alors même que l’Europe était plongée, et pour longtemps encore, dans la barbarie. Cela laisse le chercheur perplexe quand il envi- sage la manière dont ont pu être rapportés les propos qui leur sont attribués. Que ces maîtres aient signé leur œuvre en leur nom propre ou qu’ils aient choisi de nous la livrer sous un pseu- donyme en lien avec un personnage dont la sagesse faisait alors autorité. Que les écrits qui leur sont attribués aient été rédigés, à titre posthume, par un disciple direct. Ou encore qu’ils ne les aient pas signés délibérément, sans que l’on comprenne bien pourquoi, tout cela nous ramène au paradoxe suivant. Comment des personnalités en nombre si réduit, et dont l’existence est elle-même couramment mise en doute, ont-elles pu avoir une telle influence civilisatrice ? Influence que n’ont approchée aucun des nombreux penseurs, et philosophes qui ont marqué l’humanité depuis, et dont l’existence nous est, elle, attestée.
L’infinie diversité des religions et des croyances 1
À ce paradoxe se joint immédiatement une question. Comment les enseignements de ces quelques précepteurs ont-ils pu susciter une postérité aussi multiple et divisée ? Pour s’en convaincre, il suffit d’observer l’infinie diversité des traditions, Églises et autres organisations spirituelles qui revendiquent leurs héritages tout en assurant, chacune, y être la plus fidèle et donc détenir ainsi la Vérité. Afin de nous faire une opinion sur ce point, passons en revue rapidement les religions majeures qui se revendiquent de leurs enseignements.
• Le judaïsme
Pour le regard extérieur, le judaïsme semble être une religion très unitaire. En réalité, il a toujours été partagé entre différents courants. Ainsi, du temps de l’occupation romaine, il se divisait déjà, en Palestine, entre pharisiens, sadducéens, zélotes et esséniens. De nos jours, les Juifs sont regroupés en trois familles principales. Celle du judaïsme orthodoxe, celle du judaïsme réformé ou progressiste apparu au xixe siècle, et celle du judaïsme massorti, encore appelé conservatism judaism aux États-Unis. Ce dernier est une forme contemporaine qui propose une pratique moins contraignante que celle des orthodoxes et qui tente de s’adapter à l’évolution du monde moderne. Tous ces courants se subdivisent eux-mêmes en de nombreuses sensibilités souvent déterminées par l’influence d’une forte ou charismatique personnalité rabbinique. S’ils partagent des valeurs communes et reconnaissent toute la valeur de la Torah, ces mouvements diffèrent sur un certain nombre de points, par exemple sur la critique des écrits bibliques qui, pour certains, sont pris à la lettre tandis que d’autres tentent de les interpréter. Ces sensibilités s’expriment également dans des pratiques religieuses spécifiques, dans la compréhension de la nature du Messie, ou encore dans l’interprétation donnée aux temps messianiques.
• La chrétienté
Afin d’apprécier la diversité des Églises chrétiennes, qui regroupent 33 % de la population mondiale, nous les survolerons dans l’ordre chronologique de leurs apparitions. Nous trouvons tout d’abord la communauté des Églises orthodoxes qui regroupe 250 millions de fidèles. Elle est constituée de quatorze Églises 2, restées fidèles aux sept premiers conciles auxquelles il faut adjoindre les trois restées fidèles aux deuxième et troisième conciles 3. Rappelons que la rupture entre les Églises d’Orient et d’Occident fut consommée en 1204. De cette scission émergea la branche majeure de la chrétienté actuelle, l’Église catholique apostolique et romaine dirigée par le pape. Elle regroupe plus d’un milliard de fidèles mais, contrairement à l’idée que l’on s’en fait généralement, elle n’est pas unique. En effet, outre l’Église latine qui regroupe la plupart des catholiques, le Vatican fédère une trentaine d’Églises catholiques orientales. Si celles-ci reconnaissent la primauté de l’évêque de Rome, elles sont cependant de droit propre. Ainsi, le mode de désignation de leur chef est divers puisque les Églises patriarcales 4 élisent elles-mêmes leur patriarche, qui demande ensuite au pape la communion ecclésiastique. Quant aux Églises archiépiscopales 5, elles ont le même processus d’élection, mais qui doit être confirmé par le souverain pontife. Les Églises métropolites 6, pour leur part, voient leur chef, le métropolite, désigné par le pape parmi une liste de trois noms proposée par les évêques. Enfin, une douzaine d’Églises grecques ont un primat désigné par Rome 7. On peut aussi noter que toutes ces Églises catholiques orientales ont des rites liturgiques spécifiques 8, qu’elles adhèrent, parfois partiellement, aux dogmes de l’Église romaine tandis qu’elles autorisent, pour la plupart, l’ordination d’hommes mariés. Quant au protestantisme, qui regroupe plus de 800 millions de croyants, il se développe à partir de 1517, à la suite de la publication par Martin Luther de ses fameuses thèses destinées à contribuer à la réforme de l’Église, à lutter contre les abus ecclésiastiques et le commerce des indulgences. Coïncidant avec l’aspiration de nombreux princes allemands de s’émanciper de la tutelle de l’empereur, elles se répandent rapidement en Europe. Elles se traduisent par la création de multiples Églises issues des courants réformés traditionnels, qui se revendiquent de Luther mais aussi de Zwingli et Calvin en Suisse, tels que les presbytériens, les luthériens et les anglicans. Mais ces Églises protestantes traditionnelles ne représentent plus désormais qu’un tiers de la communauté protestante. Car en parallèle se dessinèrent des courants plus radicaux dans la réforme, dont les adeptes, souvent persécutés, se réfugièrent pour beaucoup en Amérique du Nord. Désormais largement majoritaire au sein du protestantisme, leur mouvance regroupe ce que l’on a coutume d’appeler les Églises évangéliques, parmi lesquelles on peut citer les baptistes, les méthodistes, les adventistes ou les anabaptistes, dont font partie, par exemple, les mennonites et les singuliers amishs.
La majorité de ces courants protestants traditionnels et évangéliques se retrouvent, avec les Églises orthodoxes, au sein du Conseil œcuménique des Églises. Cette institution, qui siège à Genève, prône l’harmonie entre les chrétiens. Elle comporte déjà à elle seule 349 membres, et l’Église catholique n’y a qu’un statut d’observateur. Mais de nombreuses Églises évangéliques ainsi que la multitude d’Églises pentecôtistes et charismatiques qui a émergé depuis les années 1970 n’y adhèrent pas. Résolument prosélytes, ces dernières connaissent une forte expansion, en particulier dans les pays en voie de développement. Ce qui compense largement l’érosion que l’on observe dans les Églises protestantes plus anciennes et traditionnelles. Enfin, indépendamment d’être en concurrence entre elles et avec l’Église catholique, en particulier en Amérique du Sud, elles le sont de plus en plus avec l’islam, en particulier en Afrique et dans certaines régions d’Asie.
Fort de ces éléments, on peut affirmer sans risque que le nombre d’Églises, sectes et mouvements spirituels divers qui se revendiquent de l’enseignement du Christ est largement supérieur au millier. En fait, il en comporte certainement bien davantage. Mais le recensement précis des nouvelles formes d’expression religieuses chrétiennes est impossible, puisque bon nombre de ces nouveaux mouvements spirituels ne sont affiliés à aucune fédération. Il est vrai qu’ils sont souvent liés à un leader charismatique, ou animés par des entrepreneurs en spiritualité qui cultivent une théologie de la prospérité. Celle-ci fait opportunément coïncider l’excellence religieuse avec la santé et la réussite matérielle, ce dont certains leaders se targuent d’être l’illustration pour encourager leurs adeptes à les suivre. Des multinationales religieuses se constituent, indépendantes des instances fédératrices traditionnelles. Elles se livrent, pour certaines, à une véritable compétition dans laquelle la vieille Europe, par un iro- nique retour des choses, redevient même un enjeu et une terre de mission.
• L’islam
De son côté, l’islam, avec une audience reconnue auprès de 1,6 milliard de personnes, n’est pas en reste en matière de divisions, pour la simple raison qu’« il n’existe en islam nulle instance religieuse autorisée à statuer sur le dogme et à rejeter ou excommunier les courants jugés déviants9 ». Sa branche la plus importante, le sunnisme, qui regroupe 800 millions de fidèles, est elle-même divisée en quatre traditions majeures. Celles-ci se sont développées à partir de la fin du viiie siècle, soit 250 ans après la mort du prophète Mahomet. On peut les qualifier, en quelque sorte, d’écoles juridiques. Leurs jurisprudences sont reconnues par les musulmans pour leurs prescriptions relatives aux modalités d’application du culte, du droit pénal et de celui de la famille, chacun étant ensuite libre ou non de se les approprier. Le courant le plus important est le hanafisme, qui est considéré comme le plus libéral. On le trouve dans l’ex-Empire ottoman, en Asie centrale, dans le sous-continent indien et en Chine. C’est ensuite l’École chaféite, que l’on trouve en Égypte, dans l’océan Indien ainsi qu’en Indonésie et en Malaisie. C’est encore l’École malékite que l’on trouve au Maghreb et en Afrique de l’Ouest. C’est enfin le hanbalisme, dont l’influence est prépondérante en Arabie Saoudite et qui a vu son influence croître depuis les années 1970.
La seconde branche de l’islam, le chiisme, dispose de 220 millions de fidèles, en particulier en Iran, Irak, Syrie, Liban, mais aussi en Azerbaïdjan et au Pakistan. Il est probablement le courant religieux le plus ancien de l’islam. Contrairement au sunnisme, il dispose d’un clergé qui s’est formé avec le temps et dont le pouvoir s’est accru significativement, comme en témoigne l’instauration, en 1979, d’une république théocratique en Iran. Le chiisme est lui-même subdivisé en trois courants majeurs. En premier lieu, le chiisme duodécimain, qui est majoritaire en Iran et en Irak. Puis l’alévisme, qui représente près de 20 % de la population turque, et dont les adeptes sont proches de leurs cousins alaouites de Syrie. Ce sont ensuite les ismaéliens, très dispersés dans le monde, et dont les communautés d’origine se situent au Pakistan et en Syrie. Enfin, il convient de citer les zaydites dont la principale communauté se situe au Yémen.
Une troisième ramification, le kharidjisme, subsiste à Oman, chez les Berbères en Algérie et sur l’île de Djerba en Tunisie10. À ces trois subdivisions, il convient d’ajouter, pour être exhaustif, les nombreux mouvements mystiques et initiatiques qui se sont développés autour de l’islam, comme les confréries soufies qui ont influencé de nombreuses dissidences chiites, ou encore les Druzes libanais, eux-mêmes dissidents de la branche ismaé- lienne. C’est aussi la grande diversité des confréries présentes en Afrique, au Moyen-Orient ou au Maghreb, qui ont développé leur propre doctrine. Les plus importantes sont le mouridisme, la al-qâdiriyya, et la madaniyya.
Enfin et comme pour le monde chrétien, l’islam a vu émerger de nouvelles formes d’expression au xxe siècle, qui reposent sur des croyances parfois éloignées de l’islam orthodoxe. Ce sont par exemple les Frères musulmans au Moyen-Orient, ou encore Nation of Islam, qui a été créée aux États-Unis et qui est réservée aux Noirs. Enfin, on peut citer le Djama’at al-tablîgh11, créé dans les années 1920. Cette association cosmopolite s’attache à revita- liser la foi des populations musulmanes expatriées. Comme nous avons pu l’observer dans la mouvance chrétienne avec les mou- vements charismatique ou pentecôtiste, on observe l’émergence d’une multitude d’imams ou de leaders musulmans qui, par leur charisme, entraînent à leur suite des adeptes dans des interprétations personnelles du corpus et de l’expression de la foi musulmane.
• L’hindouisme et le bouddhisme
Pour ce qui est de l’hindouisme pratiqué par 14 % de la population mondiale, il se divise en trois branches principales. Le vishnuisme, le shivaïsme et le shaktisme, elles-mêmes subdivisées en une multitude de sectes, souvent établies autour d’un guru ou maître spirituel, ce qui les rend difficiles à dénombrer tant elles sont nombreuses.
Le bouddhisme, avec 6 % des croyants, se subdivise pour sa part en quatre branches majeures. Tout d’abord le bouddhisme theravāda, la voie la plus ancienne, qui domine en Asie du Sud et du Sud-Est. Puis le bouddhisme mahāyāna, ou du « grand véhicule », que l’on trouve en Extrême-Orient, et qui prétend surpasser son prédécesseur par davantage de rigueur. Enfin, le bouddhisme vajrayāna, la « voie du diamant » ou encore tantrisme, qui se pratique dans le nord de l’Inde et autour de l’Himalaya. Pour illustrer notre propos, on peut souligner que le seul bouddhisme tibétain, qui appartient au courant bouddhisme vajrayāna, est lui-même divisé en quatre écoles, dont la plus connue, Gelugpa, est celle qui est animée par le Dalaï-Lama. En fait, chacun des courants bouddhistes majeurs est donc, comme pour l’hindouisme, divisé en une multitude d’écoles ou sectes qui sont animées par une très grande diversité de guru.
Pour être exhaustif, il nous faut aussi mentionner les religions chinoises, qui regroupent environ 400 millions de pratiquants. Difficiles à cerner, car dépourvues de dogmes et la plupart du temps de clergé, elles s’apparentent davantage à des écoles phi- losophiques qui unissent un maître et des disciples plutôt qu’à des cultes organisés. Elles sont d’ailleurs souvent référencées dans les statistiques religieuses dans des rubriques diverses, telle que celles du taoïsme, du bouddhisme, ou encore du confucianisme.
• Une exception singulière : le zoroastrisme
L’objectivité nous oblige à dire quelques mots du zoroastrisme. Non à cause de son importance puisqu’il s’agit d’une religion en voie d’extinction, mais parce que celle-ci fait exception à la règle. D’une part, parce que cette religion semble être restée unitaire jusqu’à nos jours, tandis que son corpus est resté stable. Si l’on en croit de récentes découvertes archéologiques, son apparition se situerait entre les xxe et xve siècles av. J.-C., ce qui en ferait la religion monothéiste la plus ancienne, ou pour le moins contemporaine de la doctrine mosaïque. D’autre part, on ne peut qu’être est frappé par la modernité de ses conceptions. Jugez plutôt. Non contente de proscrire il y a trois à quatre mille ans toute forme de sacrifice, d’idolâtrie ou d’intermédiaire entre le croyant et son Dieu, le zoroastrisme proposait déjà une doctrine basée sur le libre arbitre et la responsabilité individuelle. Selon elle, chacun sera, en effet, jugé dans l’au-delà selon ses mérites. Sur le plan des principes moraux, le zoroastrisme recommande la droiture, la justesse et la bienveillance dans les actes. Et bien plus tôt que toute autre doctrine, il prône l’égalité entre les hommes et des femmes ! Enfin, cette religion, qui promeut un profond respect de la nature et de ses créatures, comblerait, encore de nos jours, nos écologistes. Cette spiritualité, qui semble donc être restée fidèle à ses conceptions initiales sans avoir connu de schismes majeurs, a de plus eu une influence déterminante sur de nombreux penseurs et philosophes, comme nous le verrons un peu plus loin. Il est donc paradoxal que cette religion, probablement la plus ancienne, soit en voie d’extinction, puisqu’elle ne dispose plus, avec les parsis, que de quelques dizaines de milliers d’adeptes, alors qu’elle nous interpelle par la modernité de ses vues !
Pour être à peu près exhaustif, il conviendrait de citer un cer- tain nombre de mouvements religieux minoritaires, tels que les témoins de Jéhovah, les mormons, ou encore, des courants contemporains de pensées, tel le bahaïsme, créé en Iran dans les années 1860, et qui se veut la dernière religion monothéiste. Il revendique 7 millions d’adeptes à travers le monde, tandis que ses croyances sont une combinaison de celles issues des enseignements de Krishna, Zoroastre, Moïse, Bouddha, Jésus et Mahomet. On peut aussi mentionner la théosophie, dont le mahatma Gandhi disait que « c’est l’hindouisme dans ce qu’il a de meilleur ». Ou encore, dans l’environnement chrétien, le culte antoiniste. On peut aussi parler de l’anthroposophie, dont les principes ont été établis par Rudolf Steiner. Celui-ci, se refusant à parler de religion, s’attachait à développer en l’homme les forces nécessaires pour appréhender ce qui existerait au-delà des sens. À ce titre, il proposa des applications très pratiques en matière d’éducation, de médecine ou encore d’agriculture, dont l’expression biodynamique est à l’origine, dès les années 1920, de bon nombre de pratiques agricoles que l’on qualifie d’écologiques de nos jours. Enfin, rappelons que la mouvance New Age a elle-même suscité un très grand nombre d’initiatives éclectiques en matière de spiritualité. Mais celles-ci sont, pour la plupart, le fait d’individus ou de leaders entourés de quelques fidèles, ce qui les rend impossibles à répertorier.
Derrière les qualificatifs de juif, d’hindouiste, de bouddhiste, de chrétien ou encore de musulman, nous pouvons avancer que l’héritage des grandes figures spirituelles que nous avons citées est revendiqué par plusieurs milliers, et probablement plutôt dizaines de milliers, d’Églises, de sectes, écoles et autres mouvements religieux et associations ayant pignon sur rue. Elles se livrent, plus ou moins subtilement, une concurrence parfois féroce sur le « marché de la croyance et de la spiritualité ». Comment avons-nous pu arriver à une telle cacophonie ? Quelles sont les raisons de ces divisions mais aussi comment expliquer les profondes divergences dans l’interprétation des enseignements des guides auxquels se réfèrent ces organisations ou dont elles revendiquent la filiation ? Comment expliquer l’infinie diversité des préceptes, dogmes et rites dans des traditions religieuses qui n’ont pourtant de cesse de proclamer leur légitimité par le fait qu’elles puiseraient à la source la plus pure ? Comment justifier que des rapports différents soient entretenus et codifiés avec son Dieu, selon que l’on soit clerc, moine ou laïc ? N’est-il pas enfin troublant de constater que bon nombre de reli- gions ont été en toile de fond de guerres qui, de tout temps, ont ensanglanté notre monde ? Quand elles n’ont pas elles-mêmes, parfois, justifié les pires exactions !
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1. Seuls quelques points de repère en relation avec le propos seront ici donnés. Le lecteur qui souhaite développer sa connaissance des différentes religions pourra puiser dans la bibliographie jointe ou se référer à l’ouvrage de C. Queruau Lamerie, Réincarnation et lois cosmiques. Et si nous étions maîtres de notre destinée ?, Paris, Dangles, 2012.
2. Outre le patriarcat œcuménique de Constantinople, qui a une préémi- nence honorifique, ce sont les Églises orthodoxes d’Alexandrie, d’Antioche, de Jérusalem, de Géorgie, de Chypre, de Serbie, de Russie, de Grèce, de Roumanie, de Bulgarie, d’Albanie, de Pologne, de Tchéquie et Slovaquie.
3. Les Églises monophysite et nestorienne qui se réfèrent aux conclusions des deuxième et troisième conciles.
4. Les Églises maronite, copte, arménienne, syriaque, grecque-melkite et chaldéenne.
5. Les Églises grecque ukrainienne, syro-malabare, suro-malankare et roumaine.
6. Les Églises grecque ruthène, éthiopienne, érythréenne, slovaque et hongroise.
7. Les Églises Bulgare, croate, serbo-monténégrine, macédonienne, tchèque, russe, biélorusse, italo-albanasie, italo-grecque, hellène et géorgienne.
8. Les rites copte, syriaque occidental, syriaque oriental, maronite, byzantin, arménien et guèze.
9. Amir-Moezzi Ali Mohammad, Petite histoire de l’islam, Paris, Gallimard, coll. « Librio », 2007, p. 10. Les kharidjites se divisent eux-mêmes en une multitude de groupes, dont les principaux sont les mouhakkimites, les azraqites, les najadites, les thaalabites, les ajradites, les ibadites et les Sifrites.
11. L’association pour la prédication.
12. Réformateur protestant suisse (1484-1531)
13. Chrismation chez les orthodoxes
14. l’Annonciation, la Nativité, la Fuite en Égypte, la Présentation au temple,
les Noces de Cana et la Passion.
15. Īsā ibn Maryam, Jésus fils de Maryam.
16. Coran, Sourate 19,
17. Olivier Clément, Croire, 15-07-2015
18. Exode 20: 4-6 « Tu ne feras aucune image sculptée, rien qui ressemble à ce qui est dans les cieux la-haut, ou sur la terre ici-bas, ou dans les eaux au-dessous de la terre.
19. Voltaire (1694-1778), L’Ingénu, Paris, Garnier-Flammarion, 1966.
Christophe Queruau Lamerie
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