Arrêter de s'énerver

Parce que nous sommes entre nous, c’est-à- dire entre gens charmants mais légèrement colériques, reconnaissons cette cruelle réalité. On s’énerve, on s’agace, on râle, on se crispe, on s’exaspère, on se fâche, on peste, on s’emporte... pour un rien. À la moindre contrariété. Pour des broutilles. Du matin au soir, 365 jours par an. Même en vacances lorsque le soleil brille. Même malades, quand la fièvre nous terrasse. Nous trouvons toujours d’excellentes raisons pour nous contrarier, maugréer et maudire.

Et c’est plus fort que nous. Nous savons évidemment que ce n’est pas bien. Pas bien du tout, même... Pour notre entourage, qui subit régulièrement les affres de notre courroux ; pour nous-mêmes, qui ne sortons jamais vraiment indemnes de ces tsunamis émotionnels ; et peut-être bien pour le monde dans son ensemble si l’on considère le nombre et la puissance de mauvaises énergies que nous nous permettons d’envoyer, comme ça, dans l’univers. Quant à notre karma, l’avenir nous le dira, mais il nous semble plutôt mal engagé.

Que voulez-vous ? Nous sommes nés énervés. Et nous savons combien vous nous comprenez, vous qui fulminez régulièrement, en votre for intérieur parfois, avec force et fracas souvent. Vous nous comprenez parce que vous connaissez parfaitement cette oppression, cette sorte d’onde, faite d’excitation et de tension, qui vous parcourt le dos, puis se répand dans la mâchoire et les bras. Comme vous êtes quelqu’un de bien, vous tâchez de tempérer, de gérer, de canaliser. « Calme-toi, vous dites-vous, ça va aller. »

Oui, ça va aller. Sauf que là, ça ne va pas vraiment. Parce que votre fils traîne pour mettre son manteau alors qu’il est déjà 8 h 12. Parce que, dans le métro, un usager vous bouscule et prend vos pieds pour un paillasson. Parce qu’il pleut alors que vous comptiez commencer un entraînement intensif en vue du prochain marathon. Parce que, malgré tous vos efforts, le marché des Chinois est passé à la concurrence. Parce qu’il n’y a plus de shampooing et que vous êtes sous la douche. Parce que vous venez de renverser votre café. Parce qu’un ami vous taquine – vous, vous diriez qu’il vous critique, mais bon... Parce que vous avez appuyé sur la mauvaise touche de l’ordinateur et que le fichier a disparu. Parce qu’à la caisse, un client passe ostensiblement devant vous. Parce que le monde est fou et que des milliers de gens meurent de faim. Parce qu’on vous refuse la priorité au carrefour. Parce que votre conjoint tarde à répondre, alors que vos trois précédents SMS ont bien été « lus ». Parce que l’imprimante n’a plus d’encre. Parce que vous n’avez pas fini la moitié des tâches de votre to do list. Parce que votre mère vous rappelle de ne pas prendre froid alors que vous êtes majeur et vacciné depuis longtemps. Parce que le produit que vous vouliez acheter est en rupture de stock. Parce que le téléphone sonne alors que vous êtes déjà débordé.

Et dans ces moments-là, bien sûr, comme nous, vous sentez la moutarde vous monter au nez.

Certes, vous savez comme il est vain de vous mettre en colère. Épuisant. Pénible. Mais comment apaiser cette agitation intérieure qui va bientôt se transformer en une émotion douloureuse, puis donner lieu à des pensées négatives, pour finalement engendrer un comportement tout à fait inapproprié ? La spirale infernale est lancée, comme à l’insu de votre plein gré, sans qu’il semble possible d’appuyer sur pause.

Parce que, comme vous, nous nous en voulons de nous mettre en colère, nous avons eu une bonne idée : arrêter. Et pour arrêter, nous avons voulu comprendre et tester. Après une enquête au pays des raisons de la colère, nous vous livrons des clés efficaces (sinon à quoi bon ?) et simples (à défaut, l’échec est assuré) pour mieux accueillir la tension intérieure. Vous ne deviendrez probablement pas un maître zen – quoique nous vous le souhaitions de tout cœur. Mais vous éviterez l’écueil d’être dépassé par la colère et de perdre vos moyens. L’idée est d'éviter que le corps, le cœur et l’esprit ne s’emballent pas à la moindre déconvenue, à la plus petite des contrariétés du quotidien – cf. la liste précédente.

Quel est le programme ? Il s’agit d’abord de faire le tri ! Parce que, bien souvent, sous l’effet de l’émotion, nous mélangeons tout, la bonne et la mauvaise colère. Cessons de culpabiliser et redonnons à l’émotion ses lettres de noblesse pour pouvoir désormais l’entendre et réagir à bon escient (étape 1). Cela nous permettra d’apprendre à reconnaître les colères toxiques, celle que nous exprimons mal comme celle qui, malgré nous, est devenue chronique (étape 2). Nous comprendrons alors notre erreur : notre exigence vis-à-vis de nous-mêmes, des autres et de l’extérieur en général alimente notre insatisfaction sans pour autant combler nos besoins (étape 3). Nous agirons après sur le corps : car oui, physique et psychisme fonctionnent de concert ; or, mieux on se porte, moins on s’emporte (étape 4). Ensuite, parce que les émotions et les pensées douloureuses s’auto-alimentent et s’entretiennent les unes les autres, il s’agira d’apprendre à penser différemment pour enrayer la spirale infernale (étape 5). Viendra alors le temps de l’investigation : munis d’un stylo et d’un journal de bord de notre colère, armés de tout notre courage, nous traquerons les éléments déclencheurs, ceux qui nous mettent dans tous nos états, nous mènerons l’enquête sur ce que nous ressentons vraiment, nous chercherons comment mieux anticiper les situations délicates et nous nous lancerons un défi afin d’amorcer le changement (étape 6). Puis, nous apprendrons à rester calmes quand il est encore temps, puisqu’une évidence s’impose : mieux vaut prévenir que guérir (étape 7). Cela étant, parce que parfois la situation dégénère et nous échappe, nous exposerons les astuces efficaces pour stopper net la crise de nerfs quand elle est déclarée (étape 8). Enfin, nous savourerons ensemble notre sérénité toute neuve et la cultiverons avec bonheur (étape 9).

Qu’en pensez-vous ? C’est alléchant, non ? Avouez que si vous parvenez à garder le sourire dans tous les moments délicats précités, vous serez radieux. Et votre avenir le sera d’autant. Arrêtons de voir rouge : baissons d’un ton et voyons la colère en rose !




Aurore Aimelet

 

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