Par Sebastien Chary dans Newsletter - CQFPSY
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Conférence inaugurale CFP 2015 :
Conférence plénière de Daniel ZAGURY : La banalité psychique du mal
Les experts psychiatres sont assez consensuels : des actes criminels comportant des pratiques qualifiées de « monstrueuses, inhumaines, barbares » ne sont pas nécessairement le fait de personnes présentant une pathologie mentale avérée – c’est même une éventualité rare.
Points forts
Même en incluant la notion de trouble de la personnalité, aux limites floues, il faut convenir qu’une grande partie de la criminologie ne relève pas de la psychiatrie, en tant que discipline clinique rattachée à une nosologie. Si on se réfère aux actes commis à grande échelle -crimes nazis, génocides, attentats suicides-, le nombre de criminels impliqués montre qu’il ne peut s’agir d’une soudaine agrégation de malades mentaux, mais qu’entrent en jeu des mécanismes psychiques particuliers qui peuvent affecter chacun d’entre nous.
D. Zagury décrit précisément les mécanismes de ce « devenir monstre », la chosification des victimes, l’indifférence et la froideur plus que la haine, l’absence de culpabilité, allant jusqu’au renversement total des valeurs lorsque, pour des raisons idéologiques ou religieuses, le crime et son horreur sont présentés comme des actes légitimes et bienfaiteurs.
LLorsque se pose la question du sol psychique sur lequel germent ces passions tristes, il est plus difficile de se représenter comment appréhender les failles qui en favoriseraient l’émergence. Récusant une terminologie qu’il qualifie de structurelle (alexithymie, carence élaborative, pensée opératoire), souvent utilisée pour décrire certains « profils » criminels, D. Zagury évoque malgré tout des petits voyous fragiles, avec un sentiment de vide existentiel, un vécu de blessure, d’humiliation et de ressentiment.
Ou doit-on se retourner vers ce passé désolé, faire des recherches sur ce temps perdu ? Du côté du psychiatre de l’enfant, du psychologue scolaire, de l’éducateur de prévention, de l’enseignant, du chercheur en sciences sociales, en sciences de l’éducation, en psychologie de l’attachement ou du développement, on peut s’efforcer de mieux comprendre la genèse de cette vacuité existentielle, tenter d’y remédier en définissant les moyens nécessaires, sans opposer les moyens individuels (psychologie) aux moyens collectifs (politique sociale, être ensemble à l’école,…). Une goutte dans l’océan des misérables miracles auxquels adhèrent de plus en plus de jeunes d’une société désenchantée ? Peut-être… pas sûr, et quand bien même.
Christophe Recasens,
Boissy-St-Léger
Christian Spadone,
Paris