Expo / Timothy Archer Contre-sorts

Pour sa seconde exposition personnelle à la galerie Polad-Hardouin, Timothy Archer entend bien se saisir de la singularité du lieu pour donner pleinement un sens à l’espace. Les toiles et les dessins de grand format qui occuperont le rez-de-chaussée, vifs, lumineux et énergiques répondront à la série de dessins à fonds noirs et aux masques peuplant le sous-sol. L’artiste nous invite à descendre dans ce monde souterrain pour y découvrir notre part d’ombre. Loin de s’opposer, les forces de ces deux univers communiquent et s’interpénètrent; sorts et contre-sorts forment l’envers et le revers d’une même médaille.

La plupart des œuvres présentées ont été réalisées à Berlin, ville où l’artiste s’est installé il y a maintenant deux ans. « J’ai quitté Lille pour Berlin, pour sortir de ma zone de confort, questionner ma peinture, et l’imprégner de mes expériences, explique-t-il ». Si l’on décèle dans son travail un goût pour le primitivisme cher aux expressionnistes, Timothy Archer s’est rendu dans la capitale allemande pour puiser à la source de la peinture contemporaine dont il s’est nourri, comme les toiles d’André Butzer, de Jonathan Meese ou d’un Bjarne Melgaard. Mais avec une scène artistique en constante évolution, Berlin, n’a semble-t-il, pas été le lieu de cette rencontre tant attendue.

Ce séjour aura cependant été l’occasion pour Timothy Archer de recentrer sa peinture, loin de son univers familier. Au contact de l’effervescence berlinoise, celle- ci s’est renouvelée formellement, délaissant la matière pour s’ouvrir à une palette chromatique plus vive, acide et fluorescente. Avec l’utilisation de la bombe qui donne à ses toiles un aspect parfois mat et poudré, le peintre a intégré dans son travail des éléments picturaux issus du Street Art dont Berlin est une des villes phare. Ses multiples rencontres avec la scène artistique et les collectionneurs locaux lui auront également donné la possibilité d’exposer à plusieurs reprises.

Malgré leur opulence et leur foisonnement, les œuvres de Timothy Archer n’ont rien d’impulsif. Elles naissent au contraire avec patience et réflexion, la nuit, dans l’atelier. Les fonds savamment préparés, parfois entièrement couverts d’un noir profond permettent aux formes et à la lumière d’émerger. C’est le rythme de la main, qui impose ensuite son mouvement et fait apparaître, à l’huile et au pastel gras, les figures autour desquelles va s’organiser la composition. Celles-ci s’imposent alors avec évidence, comme ce grand oiseau aux tonalités électriques vertes et rouges, cerné de masques et d’ondes qui captent son oxygène, ou ce chapelet d’yeux qui semble dériver naturellement du regard du personnage principal dans La Graine et l’Abondance. Formes, sens et couleurs se réunissent ainsi en une alchimie unique qui confère aux peintures de Timothy Archer l’énergie bouillonnante d’un philtre.