ASTÉRIX LE GAULOIS


LES COULISSES DE LA CRÉATION Textes tirés du dossier spécial inclus
dans l’Édition Luxe d’Astérix le Gaulois

 

Couverture de livre

LES ORIGINES DU PETIT GAULOIS
Se différencier, proposer « autre chose », tel est le projet du publiciste François Clauteaux, qui en 1959 lance Pilote, « le journal des jeunes de l’an 2000 ». À une époque où la presse publie des bandes dessinées principalement américaines, il sent qu’il faut offrir aux jeunes lecteurs quelque chose de nouveau. Il conçoit un journal grand format, avec des actualités, des articles de vulgarisation scientifique, des textes signés par des vedettes de tous horizons et des bandes dessinées. Pour la création de celles-ci, il s’appuie sur Jean-Michel Charlier, René Goscinny et Albert Uderzo, cofondateurs de l’hebdomadaire. Sa seule consigne : s’inspirer du patrimoine français. Pour le reste, c’est carte blanche !

Dans l’appartement d’Albert Uderzo, situé face au cimetière de Pantin, René Goscinny et son ami se creusent la tête, lors d’une séance de « tempête de cervelles » désormais historique. En un rien de temps nos deux complices jettent les bases de l’univers du person- nage. « En deux heures, tout a été fait, décidé... », raconte le scénariste en 1976.

Pour René Goscinny, pas question qu’Astérix ressemble aux Gaulois des livres d’Histoire, grands, blonds et costauds. Petit, rabougri, teigneux, voilà le personnage qu’il imagine ! « Pour moi, il était important que le personnage soit en lui-même marrant. » Les premières esquisses d’Albert Uderzo témoignent des recherches du dessinateur : « René a voulu faire un anti-héros, c’est pourquoi le personnage est si petit, et d’ailleurs, au départ, je n’en voulais pas. On a eu une petite discussion où je lui ai dit : “Tout de même, l’archétype du Gaulois, c’est Vercingétorix.“ Un anti-héros, un « nabot, aussi perceptible qu’une ponctuation », telle est l’idée de René Goscinny. [...] Mais Albert Uderzo est têtu... Quelque peu frustré de n’avoir pas dessiné avec Astérix un Gaulois aux larges épaules, le dessinateur suggère de lui adjoindre un grand et fort guerrier, plus proche des impressionnants personnages tout en muscles qu’il excellait déjà à dessiner (comme Belloy, ou Oumpah-Pah, créé quelques années auparavant avec René Goscinny).

« Vois-tu un inconvénient à ce que je rajoute un personnage comme ça ? – Bien sûr que non, à partir du moment où il devra forcément apparaître d’autres personnages dans le village. » « J’ai eu l’idée d’en faire un livreur de menhir » expliquera Goscinny, qui décide de l’appeler Obélix. En un après-midi à Bobigny, René Goscinny et Albert Uderzo sèment les graines d’une révolution de la bande dessinée dont ils seront les initiateurs en même temps que les hérauts, et dont ils feront profiter plusieurs générations d’auteurs.
« Les éditeurs, à l’époque, avaient un principe qui était que le héros d’une histoire devait être tel que le lecteur puisse s’identifier à lui. Le héros devait être jeune pour que les jeunes se reconnaissent en lui et que les plus âgés retrouvent à travers lui ce qu’ils avaient été. Il fallait qu’il soit beau parce que, tant qu’à faire, on préfère s’identifier à quelqu’un qui est beau. Il fallait aussi qu’il ait des tas de qualités morales et graphiques. Par réaction, nous avons décidé de créer un personnage auquel on ne peut pas s’identifier. Quand un héros est trop beau, les gens qui sont moins beaux que lui lui en veulent un peu ! Moi, j’en veux à peu près à tout le monde, d’ailleurs !

Alors là, quand je les regarde, on est heureux d’être comme on est ! »
Le talent d’Astérix, c’est de savoir faire preuve d’à-propos, d’être ingénieux en toutes circonstances. « J’ai quelques idées ! », « J’ai une idée ! » sont les dialogues qui le distinguent au fil des albums. « Pour moi, Astérix, c’est tout simplement (...) la caricature du Français moyen. Elle n’est pas un symbole. Je veux que ce soit un petit teigneux représentatif du Français d’aujourd’hui, malin plutôt qu’intelligent, débrouillard, système D, etc. » dira René Goscinny. En résulte un héros en qui les lecteurs se reconnaissent
plus sûrement, plus profondément qu’ils ne s’identifient à un bellâtre de plus.

LE PREMIER ALBUM
« On va transposer à l’époque gauloise les problèmes de la société française contemporaine, et on devrait obtenir des effets comiques. » Tel est, en 1959, le pari de René Goscinny et Albert Uderzo. Riche d’une docte documentation, à commencer par les Commentaires sur la guerre des Gaules de ce cher vieux Jules, après discussion avec Albert Uderzo, René Goscinny rédige le synopsis et le scénario de la première aventure d’Astérix,

Seul à sa machine à écrire, Goscinny tape son synopsis, rédigeant toute l’intrigue du début à la fin. « C’est l’histoire très détaillée et très complète de mon prochain album. Chaque paragraphe représente une page que nous appelons une planche. » raconte René Goscinny qui précise « C’est à Vercingétorix que nous avons pensé, Uderzo et moi-même, quand nous avons inventé notre Astérix. D’ailleurs, nous avons tenu à faire figurer le vaincu d’Alésia sur la deuxième image de notre premier album, déposant rageusement ses armes sur les pieds d’un César surpris et endolori. Oui, je dis bien ”sur” les pieds, et non pas ”aux” pieds de César ».
À partir de son synopsis, René Goscinny établit le découpage des futures planches de l’album : « Avant de taper le découpage, je fais un croquis dans lequel je place mes dessins, plus ou moins les personnages. C’est très rudimentaire, ce n’est que pour moi. Et où je mets les dialogues. Et après, cela me permet de taper un découpage. Je sais exactement le nombre de dessins qu’il y aura, comment sera le découpage. [...] Je me suis aperçu, par exemple, que j’avais fait un dessin de trop qui m’empêche d’aller jusqu’au bout de la page. Donc, je supprime ces dessins, je “recase” tout le reste, jusqu’à ce que ma page soit bien composée, et que l’on tombe, si vous voulez, sur un minuscule suspense ou un gag. Tout ça doit être très, très bien étudié, bien placé. » Goscinny conçoit l’histoire case par case sur deux colonnes. Son scénario est réglé comme une partition : à gauche il décrit la case, à droite il tape les dialogues. Une fois chaque planche découpée, le scénariste raye sur son synopsis le paragraphe correspondant, avant de passer à la suivante.

Dès ce premier opus, l’épisode se conclut sur le banquet final aujourd’hui devenu un classique. Si les principaux personnages du Village, encore peu nombreux à ce stade, sont réunis autour de la table sous un ciel étoilé, on note, sacrilège, la présence du barde, qui plus est en train de s’exercer avec
passion au violon. Assurancetourix devrait pourtant se méfier, car les réactions de ses deux voisins directs laissent augurer de ses futurs déboires...
À gauche, si un chien blanc dévore bien sa ration d’os en retrait du banquet, ce n’est pas Idéfix, qui n’apparaîtra que dans le cinquième opus, Le Tour de Gaule d’Astérix. Hormis ces quelques détails, tous les ingrédients de la potion magique Astérix sont déjà présents, prêts à être en permanence réinventés par les deux auteurs au gré de futurs albums.
Fidèles à leur mot d’ordre : « se marrer et faire marrer les gens » « À chaque fois qu’un nouvel album est publié, on me pose la question : “Est-ce que vous croyez pouvoir faire aussi bien la prochaine fois ?” Cela fait trente ans que cela dure. Pour un feu de paille comme on le prétendait, ce n’est pas mal. » René Goscinny ne croyait pas si bien dire : 60 ans après sa création, son petit gaulois n’a jamais été aussi grand.

 

ASTÉRIX LE GAULOIS
ÉDITION LUXE
Parution le 23 janvier
Indispensable pour tous les fans du personnage !
Le 23 janvier, les lecteurs pourront découvrir pour la première fois dans cette Édition Luxe les 44 planches originales en noir et blanc encrées par Albert Uderzo ainsi que l’album en couleurs, accompagnées d’un dossier exclusif de 32 pages sur les cou- lisses de la création de l’album reprenant les documents de travail inédits des deux auteurs : une plongée dans la genèse de la saga dessinée la plus célèbre au monde !
La première leçon d’Histoire que l’on apprend en classe,
ce sont les Gaulois, par conséquent, nous savions que tout le monde était au courant. Il est bon en humour de prendre quelque chose qui a toujours été traité sérieusement.
René Goscinny
• Album grand format
• Dos toilé tranchefile
• 128 pages
• 2 différents types de papier :
- papier couché pour les planches en couleur
- papier offset pour les planches
originales
39 € TTC / 5500 ex