L’origine du Bouddhisme


 

Gautama Shakyamuni, descendu des cieux Tushita (paradis bouddhique), est né au VIème siècle avant notre ère, en Inde du Sud, non loin de la frontière népalaise, à Kapilavastu, au nord de Bénarès. Sa naissance est marquée par des  phénomènes miraculeux et insolites. À peine sorti du ventre de sa mère, il fait sept pas vers chacun des points cardinaux : à l’est, au sud, à l’ouest et au nord. Le chiffre sept symbolise la réalisation spirituelle et le centre, l’Absolu d’où partent les rayons divins. Il a déjà réalisé les dimensions horizontale et verticale de l’être, ainsi que le centre non duel de l’Absolu. Les premières paroles énoncées varient dans en forme suivant les écoles, mais non en fond : l’enfant lève la main droite, pointe le doigt vers le ciel et proclame son état de Bouddha, à savoir celui qui a réalisé l’Éveil, l’être dont l’esprit est purifié de toute souillure, dont les qualités spirituelles (l’amour, la  compassion, la  joie altruiste, la sagesse transcendante et omnisciente, l’équanimité...) sont pleinement  épanouies. Il affirme également l’universalité de son enseignement. Des lotus fleurissent sous ses pas et les arbres se couvrent de fleurs à son passage.

À dater du jour de sa naissance, il lui reste à grandir en tant qu’être humain ordinaire, car il est à la fois pleinement homme et pleinement Bouddha. Le Bouddha est Celui qui a parcouru le chemin de l’Éveil jusqu’ à la réalisation ultime  des trois corps: le dharmakaya, qui est le Corps Absolu de la Claire Lumière de l’Esprit ; le Sambhogakaya, qui est le Corps de Gloire, pouvant apparaître dans les terres pures (paradis bouddhiques) et aux êtres avancés spirituellement ; et le nirmanakaya, qui est le Corps d’Émanation, la manifestation pure en ce monde, tel le Bouddha historique Shakyamuni, qui enseigna pour le bien de tous les êtres, afin de les libérer de la souffrance et de l’ignorance et les mener à l’Éveil spirituel. Le Corps absolu (dharmakaya) est comme un soleil dont les rayons sont les deux corps formels (sambhogakaya et nirmanakaya), qui sont l’expression spontanée de la compassion pure. Les rayons jaillissent du soleil de l’Esprit et en sont inséparables. C’est l’indivisibilité des trois corps du Bouddha, le triple corps en un.

Le Bouddha choisit de naître dans une famille de la noblesse, les Gautama. Sa future mère, la reine Maya, rêva qu’un éléphant blanc (symbole de pureté en  Inde) pénétrait son corps par le sommet de la tête. Peu de temps après, la reine ressentit un état de paix et de sérénité. Elle pria son mari, le roi Suddhodana, de l’envoyer dans un endroit où elle pourrait méditer dans la solitude. Le souverain  accéda à sa requête et Maya se trouva dans un état de profonde félicité, durant neuf mois et six jours. Venant d’achever sa retraite, elle était en train de se promener dans la forêt, lorsqu’elle ressentit les premières douleurs de l’enfantement. Tout en prenant appui sur la branche d’un arbre, elle donna le jour à l’enfant Bouddha Shakyamuni, sorti de son flanc droit. Ses parents le prénommèrent Siddharta. La reine devait mourir d’une fièvre maligne sept jours après cette naissance divine. « Contrairement à la légende, écrit André Bareau, qui fait de lui le prince héritier d’un roi riche et puissant, vivant dans l’opulence et l’oisiveté, se livrant à tous les plaisirs et ignorant tout des souffrances et des peines, le futur Bouddha dut connaître une jeunesse fort rude, exposée à de multiples dangers. Cela eut pour heureux résultat de tremper son caractère et de lui permettre d’acquérir les qualités grâce auxquelles il devint par la suite le fondateur de l’une des plus importantes religions du monde.»

À 16 ans, il se marie avec la princesse Yasodhara qui mettra au monde un fils prénommé Rahula. À 29 ans, Siddharta décide de quitter le palais, afin de mieux connaître les conditions d’existence du peuple de son royaume. En l’espace de quatre jours, il se rend compte de la précarité de l’existence humaine : naissance, vieillesse, maladie et mort. Il sait désormais que son pouvoir royal sera impuissant à libérer les gens de cette douloureuse situation. Une nuit, alors qu’il n’a pas encore trente ans, il quitte définitivement le palais afin de se rendre dans la forêt et pratiquer la méditation. Il fait le vœu d’arriver à l’Éveil pour libérer les êtres de la souffrance : « Tant  que je ne serai pas devenu capable de libérer les êtres du samsara –  le cycle conditionné de la naissance, de la vieillesse, de la maladie et de la mort – et de les conduire au nirvana, je ne retournerai pas à mon palais. » En chemin, il rencontre un mendiant auquel il offre sa tenue  royale. Il revêt les guenilles du pauvre et s’adonne à une vie ascétique extrême durant six ans.

Au bout de cette période de jeûne, il est devenu bien faible. Un jour, deux jeunes paysannes lui offrent un  peu de nourriture, qu’il accepte. Il retrouve peu à peu ses forces en se nourrissant avec modération. Près de la rivière Niranjana, il entend des pêcheurs chanter que « la corde du luth doit être ni trop tendue ni trop détendue ». Il comprend alors que la voie du juste milieu est celle qui mène à la réalisation spirituelle. Renonçant à toute forme de mortification, Siddharta se rend à Bodhgaya, au sud de Bénarès. Là, assis en lotus sous un figuier pipal, il entre dans le profond état de méditation vipassana et fait ce vœu : « Dès ce moment où je m’assieds jusqu’à ce que j’ai  obtenu l’illumination complète, je ne bougerai ni mon corps ni mes jambes. » Mara, le prince de ce monde, s’inquiète de voir ce jeune prince méditer ainsi. Il se dit que si Siddharta parvient à l’Éveil absolu, c’en est fini de sa domination ténébreuse sur les êtres. Tout comme Jésus lors de sa retraite dans le désert, le démon (Mara) tente d’empêcher par tous les moyens la réalisation spirituelle de Siddharta. La plus grande tentation que Siddharta doit affronter est l’égoïsme spirituel, visant à garder uniquement pour soi les fruits de l’Éveil. Après avoir été tenté de différentes manières (volonté de puissance, enfermemen dans l’ivresse sensuelle...), il met en fuite Mara par l’amour et la compassion qu’il porte à tous les êtres.

Après 49 jours (7  semaines) de méditation intense, il obtient la parfaite illumination par une nuit de mai 531 avant notre ère. Une voix du ciel proclame : « Nous avons trouvé le plus grand maître de tous, celui qui fera le bien d’innombrables êtres dans les temps à venir. » Le dieu Brahma, créateur du ciel et de la terre, lui prie de faire tourner la roue du Dharma (l’enseignement de la voie bouddhique). Le Bouddha accepte, après avoir hésité un court instant devant l’énormité de sa tâche. Certains auteurs ont décrit l’illumination du Bouddha comme une foudre éclairante. Or, d’après Hans Wolfgang Schumann, dont la biographie sur Bouddha fait autorité dans le monde entier, l’illumination s’est développée sur trois ltiers de nuit (environ neuf heures) et fut ainsi un processus graduel. Cela est en accord avec sa propre déclaration  selon laquelle, dans sa doctrine, le progrès est graduel et qu’il n’y a pas de compréhension soudaine (...). En outre,  l’expérience de l’illumination lui donna le sentiment d’appartenir, en tant que Bouddha, à une catégorie distincte d’êtres, n’ayant que les apparences extérieures en commun avec les êtres non libérés. La connaissance que la douleur pouvait certes encore le toucher physiquement mais ne pouvait plus l’affecter mentalement, et que rien ne pourrait inverser sa libération, lui conférait cette supériorité détachée qu’il exposa durant les quarante-cinq années de son enseignement  aux rois et aux mendiants, aux amis et aux adversaires. »  L  tradition orthodoxe considère cette illumination (Bodhi) comme une expérience de compréhension qui révéla au Bouddha tous les éléments de son enseignement sous sa forme finale et complète. En d’autres termes, elle prétend qu’obtenir la bouddhéité transforma Siddharta en possesseur de la vérité. Heureusement, il peut être prouvé que la pensée créatrice de Gautama continua même après sa Bodhi. Pour lui, en tant que personne, l’illumination était la fin de sa quête de l’émancipation, mais pour son enseignement, elle fut le début d’un long développement. Le  Bouddha va parcourir  endant plus de quarante ans les régions du Gange moyen, en prêchant sa voie spirituelle à tous, en fondant une communauté de moines mendiants et de laïcs pieux (Sangha), comprenant aussi bien des hommes que des femmes, issus de toutes les classes sociales. Vers 486 avant Jésus-Christ, miné par la fatigue et la dysenterie, il se couche sur le flanc droit et s’endort dans la paix bienheureuse du  nirvana.  Ses nombreux disciples vont poursuivre son œuvre...

Dominique Lormier*

 

 

 

 

Pour en savoir plus, lire :
Le Bouddhisme vu par la science
*Dominique Lormier
www.editions-oxus.fr