Intégration de la micro-mobilité dans la prise en charge des cas chroniques


Faisant partie d’une des écoles du dos de Paris à cette époque, je croise beaucoup de patients souffrant de cette région de façon chronique. J’aimerais m’appuyer sur deux catégories de prises en charge pour exprimer cette distinction d’indications et de résultats entre la macro-mobilité et la micro-mobilité. Dans la première catégorie d’atteintes, nous recevons des patients présentant, dès leur plus jeune âge, des scolioses (déformation rachidienne hélicoïdale dans les trois plans de l’espace) ou des cyphoses thoraciques constitutionnelles (maladie de Scheuermann : déformation en flexion de la colonne thoracique). Une double prise en charge en macro et micro-mobilité est ici salvatrice dans la grande majorité des cas.

Le travail en macro-mobilité et la kinésithérapie permettent un entretien gymnique au long cours contrecarrant la déformation visible. Celui-ci est indispensable, notamment pendant les périodes de forte évolution de la structure comme l’adolescence, où la pose d’un corset peut être une solution dans les cas de scoliose marquée. Le travail en micro-mobilité, quant à lui, engendre un impact beaucoup plus franc sur la douleur en montrant bien la relation de complémentarité des deux types de mobilité. Dans la seconde catégorie d’atteintes, nous recevons des patients qui présentent des colonnes vertébrales souffrant depuis si longtemps que de francs déséquilibres dans la macro-mobilité apparaissent. Pour des raisons ergonomiques environ- nementales, dans les pays industrialisés, 90 % de ces patients perdent les amplitudes d’extension rachidienne (capacité à se pencher en arrière au niveau lombaire et/ou thoracique). Ils en éprouvent les conséquences en exprimant la difficulté à dormir sur le ventre ou à nager la brasse. Une surcharge de contraintes vient alors comprimer le disque intervertébral, qui finit par s’user et se détériorer dans sa structure. Ici, comme dans la première catégorie d’atteintes, c’est grâce au travail en micro-mobilité que nous pouvons diminuer les douleurs et les inflammations locales, permettant ensuite de mettre en place un travail de rééducation pour améliorer la macro-mobilité (qui n’aurait pas pu être effectuée en amont à cause de la douleur). Cela me fait penser à l’expression « avoir un caillou dans sa chaussure ». Imaginons ne pas prendre conscience de ce caillou (comme un déséquilibre de micro-mobilité). Notre appui au sol est déséquilibré et c’est l’ensemble de notre démarche qui doit s’adapter. Quelques années après, le bassin et la colonne vertébrale ont pris l’habitude de fonctionner de la sorte, rendant la démarche visuellement déséquilibrée (macro-mobilité). En travaillant directement et uniquement sur la démarche, nos résultats ne sont pas satisfaisants puisque l’étiologie du problème (le caillou) n’a pas été soulevée. En travaillant uniquement sur la micro-mobilité (enlever le caillou), les résultats ne sont pas francs non plus puisque le système nerveux central a intégré la démarche compensatrice comme étant sa norme (habitude ancrée). Même en l’absence du caillou, le corps garde son nouvel équilibre contraignant. Une double démarche commençant par la micro-mobilité et poursuivant par la macromobilité permet d’enlever l’étiologie, le caillou, et de rééduquer la démarche de l’individu.

Patrick Ghossoub

 

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