Culture : le portrait du roi George III par Allan Ramsay

Allan Ramsay est un peintre écossais, né à Edimbourg en 1713, il porte le même nom que son père poète Allan Ramsay. Sa carrière se déroule pour l’essentiel en Angleterre. Il est considéré comme faisant partie d’une génération qui va profondément marquer la peinture anglaise et préparer celle de Reynolds et Gainsborough. En 1729, il fréquente l’Académie de Saint-Luc de Edimbourg. Il va ensuite se former, en 1734, à Londres dans l’atelier du suédois Hans Hysing.
Gravure décrivant un  Portrait de Georges 3
d'après une peinture d'Allan Ramsay © istock

 

Allan Ramsay est un peintre écossais, né à Edimbourg en 1713, il porte le même nom que son père poète Allan Ramsay. Sa carrière se déroule pour l’essentiel en Angleterre. Il est considéré comme faisant partie d’une génération qui va profondément marquer la peinture anglaise et préparer celle de Reynolds et Gainsborough. En 1729, il fréquente l’Académie de Saint-Luc de Edimbourg. Il va ensuite se former, en 1734, à Londres dans l’atelier du suédois Hans Hysing. Après un rapide retour dans la capitale écossaise en tant que peintre, il effectue son voyage en Italie de 1736 à 1738, il va à Rome puis à Naples. Il revient à Londres en 1739 où il s’établit comme portraitiste, le cosmopolitisme de sa formation transparait dans ses toiles et il acquit un grand succès. Il effectue un second voyage, de 1754 à 1757, en Italie. Il fréquente alors l’Académie de France à Rome. Ce séjour lui permet d’étudier, entre autres grands maîtres, l’œuvre du Dominiquin. A son retour en Angleterre en 1757, il réalise des portraits royaux, notamment de George III. Lors de l’accession au trône de ce dernier, Ramsay devient peintre du roi et l’auteur des effigies du souverain. Il réalise alors le Portrait de George III en costume de couronnement en 1761. Il serait donc intéressant de se demander pourquoi ce portrait du roi George III est-il un parangon de l’effigie royale.

 
 Ce tableau est la première version du portrait de George III (1738-1820) en costume de couronnement par Ramsay. L’artiste écossais avait déjà peint ce modèle lorsque ce dernier était prince de Galles en 1758, pour John Stuart, troisième comte de Bute, le mécène le plus important de Ramsay à Londres ainsi que tuteur et mentor de George III. Le succès de ce portrait et d’un portrait de Lord Bute, ont mené à cette commande majeure.
 
  Le portrait de George III en costume de couronnement exécuté pour Saint James’s Palace (maintenant au Buckingham Palace) contraste avec le portrait en pied du roi lorsqu’il était prince de Galles, peint trois ans plus tôt, dans sa plus grande formalité et sans manque relatif d’intimité, comme il était approprié aux portraits d’Etat d’un souverain régnant. La composition est à la fois imposante et gracieuse. La figure du roi s’inscrit dans une forme pyramidale ce qui lui donne beaucoup de stabilité et de dignité. Le portrait de couronnement de George III reflète son aspiration à diriger son royaume et son empire tel un monarque éclairé. La composition accentue sa jeunesse et sa vigueur et sa pose détendue, malgré la richesse de son attirail, suggère la détermination d'être un monarque accessible. Certains symboles de l’autorité royale, la masse, le sceptre et l’orbe, sont remarquablement absents tout comme le trône. La couronne est à peine visible dans l’arrière-plan. La pose élégante accentue à la fois la dignité et la retenue du jeune roi. La dette de Ramsay envers l’art en français de cette période est évidente, particulièrement envers Jean-Marc Nattier et Louis-Michel van Loo. Dans la peinture de Ramsay de George III, le visage est peint avec assurance, utilisant des sous couches de gris, la chair est animée par des petites touches de vermillon et l’épaisseur et la texture du costume sont brillamment suggérées, incluant la lumière reflétée sur l’hermine (ces reflets suggèrent les œuvres du peintre Antoine van Dyck, peintre d’effigies royales anglaises présentes dans les collections royales). La richesse et le détail dans le costume du roi et l’hermine du costume de couronnement reflètent le prestige de la fonction monarchique et une maîtrise technique incomparable parmi les innombrables copies produites par son atelier. Horace Walpole mentionne avoir vu la peinture (probablement celle-ci) en mars 1762 : « peinte exactement à partir du costume que le roi a porté à son couronnement ».  
 
Après 1766, Ramsay ne peint que des portraits de George III et de la reine Charlotte (1744-1818). La période qui commence après 1767, quand il reçoit sa seconde nomination, en tant que « Principal Painter in Ordinary to Their Majesties », voit la création d’un nombre considérable de répliques de son chef-d’œuvre, plusieurs sont commandées par des membres de la famille royale, qui continuent de l’employer jusqu’à son retrait forcé de la peinture.  
 
Le roi était satisfait de son portrait. Horace Walpole, un contemporain et un connaisseur d’art, l’a comparé favorablement à des portraits royaux antérieurs, mais avait émis des réserves notant que : « Cela a plus d’aura, et c’est peint exactement comme le costume que le roi a porté à son couronnement. Les objets dorés et l’hermine sont finement détaillés ». Cette combinaison réussie de grâce et de majesté fut suivie par d’autres commandes de la famille royale. Pendant les douze premières années du règne de George III il a été mécéné pour peindre environ une douzaine de portraits royaux. Son atelier à Soho Square était décrit comme étant "bondé de tableaux de sa Majesté dans toutes les étapes de leur réalisation". La demande de copies de ce portrait d'Etat officiel était immense, elle venait des membres de la famille royale, de souverains, de gouverneurs coloniaux, d'ambassadeurs, de corporations, d'institutions et de membres de la cour. 150 commandes de paires, 26 du roi seul, 9 de la reine seule, sont listées. Ramsay était résolu à "donner les dernières peintures à tous de ma propre main" mais employait plusieurs assistants, les meilleurs d'entre eux étaient David Martin et Philip Reinagle. L’atelier était continuellement bondé avec des copies du portrait de couronnement jusqu’à la mort de Ramsay en 1784.   
 
Le portrait de couronnement de George III était un des portraits les plus familiers dans le monde anglophone dans les quatre dernières décennies du XVIIIe siècle et une des images les plus connues du roi dans l’Amérique révolutionnaire. Des copies du portrait furent délivrées à des gouverneurs coloniaux et étaient exhibées dans chacune des capitales coloniales. Des reproductions imprimées, à la fois des gravures grand format mais aussi des plus petites, étaient vendues des deux côtés de l’Océan Atlantique. L’exemple des collections de la National Portrait Gallery de Londres, a été gravé par William Wynne Ryland et publié par ce dernier à Londres en 1769. Il jouissait du mécénat de la couronne et du statut de graveur du roi, mais fut néanmoins reconnu coupable pour contrefaçon et exécuté en 1793.  
 
  Ce tableau est la première version d’une série de portraits royaux du roi George III et de son épouse la reine Charlotte. Même si Allan Ramsay avait déjà peint George III alors prince de Galles, ici la fonction est différente, l’artiste cherche à rendre de la dignité et de la puissance du statut royal de la figure. Ce tableau est une représentation officielle sur laquelle devront s’appuyer toutes les répliques de l’image du roi. Ce tableau va être l’objet d’un très grand succès, et des dizaines de copies seront commandées à Ramsay. Pendant près de deux décennies, Ramsay et son atelier ont produit des dizaines de portraits du roi George III et de son épouse, la reine Charlotte, dans leurs tenues de couronnement. Ces copies seront dispersées dans tout l’Empire Britannique et par-delà les océans. C’est pourquoi dans le cas de ce tableau, on peut conclure qu’il incarne la réussite et la fortune critique d’une effigie officielle remplissant sa fonction de propagande royale, finalement il est un véritable parangon des effigies royales.  
 

Pierre-Louis Calatayud

Etudiant en histoire de l'art et archéologie à l'Ecole du Louvre, Paris

e-mail : pierre.calatayud06@gmail.com