La notion de perturbateur endocrinien (Pe)


Un peu d’histoire
L’expression « perturbateur endocrinien » a été créée en 1991 par Theo Colborn, zoologiste et épidémiologiste américain (1927-2014) pour désigner toute molécule ou agent chimique composé, xénobiotique ayant des propriétés hormono-mimétiques et décrit comme cause d’anomalies physiologiques, et notamment reproductives. L’appel de Rachel Carson, en 1962 dans Le Printemps silencieux traitait déjà des effets négatifs des pesticides sur l’environnement. Rachel Carson déclarait à l’époque que le DDT se révélait être la cause de coquilles d’œufs plus fines chez les oiseaux, et occasionnait une hausse de la mortalité ainsi que des problèmes de reproduction. Elle accusait également l’industrie chimique de pratiquer la désinformation et les autorités publiques de répondre aux attentes de l’industrie chimique sans se poser de questions. À l’époque, le livre provoqua une prise de conscience du public des problèmes liés aux pesticides et à la pollution de l’environnement et contribua à l’interdiction du pesticide DDT ou dichlorodiphényltrichloroéthane aux États-Unis en 1972.

Une exposition permanente
Bisphénol A, phtalates, retardateurs de flamme polybromés, composés perfluorés, parabènes..., nous sommes exposés à des centaines de molécules chimiques. Nous sommes cernés ! Elles ont pénétré notre quotidien, mais connaissez-vous les pesticides perturbateurs endocriniens ? Certaines études estiment à plus de 120 le nombre de perturbateurs endocriniens qui nous environnent au quotidien : dans les produits d’entretien ménager, les emballages alimentaires, nos boissons, l’eau en bouteille ou du robinet, les parfums, nos vêtements, nos cosmétiques et produits de soins personnels, l’air que nous respirons. Dans notre environnement professionnel et personnel...
Depuis une trentaine d’années, des questions se posent quant aux conséquences à long terme de l’exposition de l’homme à ces substances chimiques présentes dans son environnement.

Ont-elles un impact sur l’organisme ? Lequel, lesquels ?
De très nombreuses études scientifiques montrent les risques de l’accumulation de ces substances, en particulier sur le développement des organes et la fonction de reproduction. Selon des études épidémiologiques, la fréquence des pathologies qui touchent les organes de reproduction, altèrent la fertilité et menacent le développement du fœtus lorsque la mère a été exposée durant la grossesse, est en augmentation. En résumé, pour les scientifiques, les organismes de recherche indépendants, les associations, de très forts soupçons pèsent sur ces substances dites « perturbateurs endocriniens » (PE). La dégradation de l’environnement pourrait être une menace pour la santé humaine en induisant une multiplication de maladies mais aussi pour la survie de l’espèce, en attaquant les facultés de reproduction.

Action ?
Au niveau européen, le débat sur les PE a commencé dans les années 1990, après une constatation de signes alarmants du déclin de la fertilité masculine et des effets sur les poissons. Même si, dans leur livre Our Stolen Future, Theo Colborn, Dianne Dumanovski et John Peter Meyers, dénonçaient en 1996 la présence et les effets des perturbateurs endocriniens, ce n’est qu’en 2006 que la notion de perturbation endocrinienne a été acceptée. De très nombreuses études restent à réaliser pour bien comprendre à la fois les effets de chacune de ces substances toxiques, mais aussi ceux du cocktail chimique que nous absorbons depuis près de quatre-vingts ans. Si l’on ignore à l’heure actuelle l’ampleur potentielle de l’enjeu de santé publique des PE, les connaissances disponibles, bien que lacunaires, sont suffisantes pour enclencher des procédures de précaution et même, dans certains cas, de prévention. La recrudescence des problèmes d’infertilité, des anomalies du sexe masculin, des cancers du sein, de la prostate et des testicules, des cas d’autisme, d’obésité et de diabète pourrait être liée à l’exposition à certains produits. Seulement voilà, l’Union européenne qui se doit d’établir des règles pour encadrer l’usage de ces substances avance lentement. Sous la pression des lobbies industriels.

Les perturbateurs endocriniens ? Un enjeu sanitaire pour le xxie siècle puisqu’il s’agit de protéger non seulement la santé de l’homme en s’attaquant à l’épidémie de maladies chroniques mais aussi celle de l’écosystème.


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Des écologistes aux Pe !
L’ONG Générations Futures a passé à la moulinette PE, les cheveux de sept écologistes « célèbres ». Et les résultats chimiquement positifs* posent une interrogation : si nos femmes et nos hommes verts sont « imbibés » de PE, qu’en est-il de nous ?

Qui l’eût cru : celle qui remporte la palme de la contamination n’est autre que la navigatrice Isabelle Autissier avec des quantités de PE 17,5 fois plus élevées (dont 68 PE retrouvés et une concentration de 158,643 pg/mg) que chez l’ex-ministre de l’écologie, Delphine Batho (36 PE retrouvés et une concentration de 9,031 pg/ mg). Si l’on ignorait la pollution des mers, aujourd’hui, on voit l’étendue des dégâts... Yann Arthus-Bertrand, lui, le grand écologiste, que faisait-il avant de découvrir les beautés de la nature ? Car ce que montre cette étude, c’est que « l’exposition des personnes n’est pas uniforme mais varie considérablement en fonction de l’environnement dans lequel elles évoluent ou ont évolué ». Toutes les personnalités ont au moins un des trois bisphénols recherchés, certaines en ont deux : des phtalates de 8 à 11, des PCB entre 14 et 30 et, enfin, des pesti- cides entre 9 et 25 !

* L’analyse réalisée pour Générations Futures a porté sur 4 familles de PE : les bisphénols, les phtalates, les PCB et les pesticides.
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Couverture de livre

 

 

Patricia Riveccio est une journaliste spécialisée dans le domaine de la santé et de l’alimentation depuis plus de 30 ans. Elle est également l’auteur de nombreux livres sur le thème de la santé et du bien-être dont Le Grand livre de l’hypnose et de l’autohypnose (coécrit avec Jean-Jacques Garet).