10 IDÉES REÇUES SUR LA SANTÉ DE VOTRE CŒUR

Commencer à s’occuper de son cœur, quel que soit son âge, permet d’améliorer ses facteurs de risque, et de diminuer le risque de faire un infarctus
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1. « COMMENCER À ENTRETENIR SON CŒUR À 50 OU 60 ANS, CELA NE SERT À RIEN. »
FAUX. Commencer à s’occuper de son cœur, quel que soit son âge, permet d’améliorer ses facteurs de risque, et de diminuer le risque de faire un infarctus. Ainsi, chez les personnes de 80 ans, un ré-entraînement régulier permet de faire baisser la tension, d’augmenter les capacités cardiaques et musculaires, de faire baisser le cholestérol. De plus, le mécanisme de néo-angiogenèse (la création de nouvelles artères, permettant à votre organisme d’améliorer le passage du sang et de l’oxygène, voir aussi p. 65) existe à tout âge. Il n’est donc jamais trop tard pour commencer ! Bien sûr, l’activité sportive conseillée ne sera pas la même à 40, 50 ou 80 ans : la prise en charge doit être individualisée. Plus on avance en âge, plus les activités en endurance et non traumatisantes (comme l’aquagym, l’aquabike...) seront préconisées, surtout quand il s’agit de reprendre le sport. Ce qui n’empêche pas de continuer à courir à 80 ans quand on a fait du sport toute sa vie. Enfin et pour finir, l’activité physique, quand elle est pratiquée régulièrement et précocement, permet de réduire le risque d’apparition des principaux cancers de l’ordre de 30 %.

2. « LES FEMMES SONT PEU TOUCHÉES PAR LES PROBLÈMES CARDIAQUES. »
FAUX. En France, une femme sur trois meurt d’une maladie cardio-vasculaire. Depuis vingt ou trente ans, le nombre d’accidents cardiaques chez les femmes augmente de manière considérable. Aujourd’hui, c’est même la première cause de mortalité chez la femme, avant le cancer (alors que c’est la deuxième cause chez l’homme). Les raisons de cette évolution sont nombreuses. Elles sont notamment liées au changement de mode de vie : le stress, le tabagisme, la sédentarité, la prise de la pilule... sont autant de facteurs qui augmentent les risques. Ainsi, le fait de fumer par exemple annule la protection naturelle contre les maladies cardiaques dont disposent les femmes grâce à leurs hormones.

Autre problème : les femmes sont généralement dépistées plus tard car les symptômes des troubles cardiaques sont parfois très différents de ceux des hommes. Par exemple, la douleur dans la poitrine, typique à l’effort, n’est pas toujours présente ; les troubles digestifs sont plus courants, associés à de la pâleur ou une grande fatigue. Les médecins eux-mêmes pensent moins à ce diagnostic car ils sont restés sur l’idée que les femmes sont protégées grâce à leurs hormones. De plus, les maladies cardiaques féminines sont souvent plus graves car les artères des femmes sont plus fines et plus petites ; les dégâts potentiels sont donc plus importants.

LES INFARCTUS DE PLUS EN PLUS FRÉQUENTS CHEZ LES FEMMES, ET NOTAMMENT CHEZ LES PLUS JEUNES !
Selon la Fédération française de cardiologie, le nombre d’infarctus chez les femmes de moins de 50 ans a triplé entre 2000 et 2015. Aujourd’hui, plus de 54 % des victimes de maladies cardio-vasculaires sont des femmes.

Selon l’Institut de veille sanitaire (InVS), le nombre de personnes hospitalisées pour un infarctus du myocarde a baissé entre 2002 et 2008 en France. Toutefois, chez les personnes de moins de 65 ans, ce taux a augmenté de 19 % chez les femmes (et de seulement de 9,9 % chez les hommes). Et selon le Bulletin épidémiologique hebdomadaire no 7-8 de l’InVS (mars 2016), 25 % des infarctus chez la femme surviennent avant 65 ans (contre 15 % en 2002).

3. « POUR PRÉVENIR LES PROBLÈMES CARDIAQUES, IL FAUT ARRÊTER TOUTES LES MATIÈRES GRASSES. »
FAUX. Il existe certes un rapport entre le cholestérol, la consommation de matières grasses et la fréquence des accidents cardiaques. Mais certaines matières grasses sont bénéfiques pour l’organisme. Ainsi, le « bon » cholestérol est un élément constitutif indispensable des hormones et des cellules. Parmi les bonnes graisses, citons les oméga-3, qui sont des outils de construction des cellules cardiaques. Ils ont un effet bénéfique sur la santé cardiaque car ils permettent une régulation du cholestérol total et une augmentation du bon cholestérol. De manière générale, il est important de retenir que toutes les matières grasses ne se valent pas. Celles qu’il faut réduire en priorité, ce sont les matières grasses saturées, contenues dans le beurre, la crème, les charcuteries, les pâtisseries industrielles...

4. « LES ARTÈRES QUI SE BOUCHENT, C’EST UN PROBLÈME DE VIEUX ! »
FAUX. Il y a plus d’accidents cardiaques au fur et à mesure du vieillissement car, plus l’organisme vieillit, plus les artères se calcifient et se rigidifient. Le cholestérol et le calcaire ont ainsi tendance à se déposer davantage dans les artères, ce qui peut induire un rétrécissement, voire un bouchon. Mais ce problème peut aussi toucher les jeunes, dès l’âge de 35 ou 40 ans. Cela est principalement dû à une augmentation du stress et de l’obésité, qui ont des conséquences graves sur vos artères. Résultat : les infarctus chez les jeunes sont souvent plus graves que ceux des personnes plus âgées. Chez les jeunes, il n’y a pas encore d’artères de « suppléance » (on en revient au mécanisme de la néo-angiogenèse cité ci-dessus et expliqué p. 65). De plus, il faut savoir qu’on peut commencer à accumuler des dépôts dans les artères dès l’âge de 20 ans. Plus on avance en âge, plus ce phénomène est important. D’où l’importance de prendre soin de ses artères sans attendre ! Le tabagisme (90 % des patients), l’hypercholestérolémie (50 % des patients) et les antécédents familiaux d’infarctus (50 % des patients) sont les trois facteurs de risque majeurs de cette population jeune touchée par les problèmes cardiaques.

5. « LES MALADIES CARDIO-VASCULAIRES, C’EST GÉNÉTIQUE. IL N’Y A RIEN À FAIRE... »
FAUX. Il existe bien une base génétique aux problèmes cardio-vasculaires : certaines personnes sont génétiquement « programmées » pour avoir un taux de cholestérol élevé, pour en déposer plus dans les artères, pour souffrir d’hypertension... Le facteur génétique fait donc partie de l’évaluation du risque mais il n’est pas à la base du risque. Ce n’est pas parce que le risque est présent génétiquement que vous allez le développer. De nombreux autres facteurs vont jouer à l’échelle des gênes pour stimuler ou au contraire inhiber ce risque. On sait par exemple que l’activité physique est un élément de régulation génétique : elle est capable d’inhiber certains gènes du risque cardio-vasculaire. Autre exemple : certains médicaments (comme les statines) peuvent permettre de réguler le risque chez les gens qui déposent du cholestérol dans leurs artères. En clair, il existe un terreau fertile au développement des maladies cardio-vasculaires, mais tout dépend comment on arrose ce terreau ! La génétique agirait comme un amplificateur de risque supplémentaire. Bref une bombe à retardement qui n’attend qu’une chose : qu’on allume la mèche (diabète, cholestérol, hypertension artérielle...).

6. « CELA FAIT VINGT ANS QUE JE FUME. PAS LA PEINE D’ARRÊTER, CELA N’AURA AUCUN EFFET BÉNÉFIQUE POUR MON CŒUR, C’EST BEAUCOUP TROP TARD. »
FAUX. Des études ont montré que, quel que soit l’âge à partir duquel on arrête de fumer, le risque cardiaque diminue. Les effets bénéfiques sont également réels même si on arrête de manière transitoire (un ou deux ans, par exemple) ou si on diminue sa consommation quotidienne car, ce qui est important, c’est la dose cumulée. Au bout de quelques jours après l’arrêt du tabac, on peut ressentir un effet bénéfique sur ses bronches ou même sur le plan cutané et des phanères (cheveux, ongles). Sur le plan cardio-vasculaire, il faut compter entre cinq et sept ans en moyenne pour « récupérer le risque » d’une population normale. Différentes études ont montré que les seniors qui s’arrêtent de fumer retrouvent, au bout d’un an, un risque de faire un accident vasculaire cérébral identique à celui des non-fumeurs ; celui d’être victime d’un infarctus du myocarde diminuant de 50 % environ. Arrêter de fumer avant 40 ans élimine 90 % du risque, avant 30 ans presque 100 % du risque. Donc le message principal à retenir tout de même est le plus suivant : le plus tôt sera le mieux.

7. « LES MÉDICAMENTS D’AUJOURD’HUI, TRÈS EFFICACES, SUFFISENT À DIMINUER LES FACTEURS DE RISQUE. »
VRAI... et FAUX. Les médicaments permettent de diminuer les facteurs de risque, mais en partie seulement. Il est évident qu’un médicament antihypertenseur va permettre de faire baisser la tension ou qu’un médicament anti-cholestérol va agir sur la réduction du taux de mauvais cholestérol. Mais les médicaments ne sont que des béquilles. Si on peut faire sans, c’est mieux ! Si on adopte une hygiène de vie propice à la réduction du facteur de risque (par exemple, si on arrête de fumer, si on change ses habitudes alimentaires ou si on bouge davantage), cela évitera l’installation de ce facteur de risque. Il est incohérent de prendre des médicaments si on ne gère pas par ailleurs ses facteurs de risque de façon non médicamenteuse. À l’échelle de la nation, cela peut même amener à s’interroger : pourquoi rembourser ces médicaments de la même façon à tout le monde, par exemple aux fumeurs et aux non-fumeurs ? Le « principe de solidarité » était compréhensible autrefois, quand on ne connaissait pas les facteurs de risque. Mais aujourd’hui, ce principe mériterait d’être discuté...

8. « MANGER TROP SUCRÉ N’A AUCUNE INCIDENCE SUR LE BON FONCTIONNEMENT DU CŒUR. »
FAUX. Bien sûr, ce n’est pas parce que vous mangez une barre chocolatée que vous allez faire un infarctus. Mais le fait de manger régulièrement trop sucré peut augmenter votre risque cardiaque sur le long terme. L’excès de sucre a un effet délétère sur le fonctionnement cardiaque de manière indirecte : il peut entraîner une surcharge pondérale, une augmentation des triglycérides et de la graisse viscérale (celle qui entoure vos organes et qui est la plus dangereuse), favoriser le diabète... Autant de facteurs de risque importants dans le déclenchement des maladies cardio-vasculaires !

9. « C’ÉTAIT MIEUX AVANT ! AUTREFOIS, LES GENS NE SOUFFRAIENT PAS DE MALADIES CARDIO-VASCULAIRES... »
FAUX. L’idée communément admise est de dire que, autrefois, on mangeait plus sainement et on vivait mieux. Effectivement, les pesticides et autres produits potentiellement dangereux n’étaient pas utilisés dans l’agriculture. Et l’industrie agro-alimentaire n’existait pas... Mais il faut savoir que les problèmes d’athérosclérose ne datent pas d’hier : on a retrouvé des traces de dépôts dans les artères des momies égyptiennes. Certes, l’alimentation et l’hygiène de vie sont des éléments à surveiller de près, mais il existe aussi des facteurs individuels et génétiques immuables. Certains déposent plus que d’autres, et cela existe depuis la nuit des temps.

10. « LE SPORT PEUT ÊTRE DANGEREUX POUR LE CŒUR ! »
FAUX... ET VRAI. De nombreuses personnes pensent que l’activité physique augmente le risque d’accident cardiaque. Ce qui est en partie vrai. Ce risque est multiplié par 2,7 quand on fait un sport sans s’entraîner. Le sport va agir alors comme le révélateur d’une maladie cardiaque qui était jusqu’alors méconnue. En revanche, ne pas bouger est beaucoup plus dangereux. Le sédentaire qui va courir derrière son bus pour le rattraper voit son risque multiplier par plus de 100 par exemple. Cela permet de comprendre 1) l’importance de réaliser un bilan cardiaque avant de commencer toute activité sportive si vous avez arrêté depuis trop longtemps, et 2) l’intérêt de pratiquer une activité physique régulière. Le risque existe principalement au redémarrage : c’est pourquoi il est important de se faire accompagner par un médecin, un coach (et/ ou de suivre les recommandations que nous vous donnons dans la suite de cet ouvrage !). Mais on constate que plus on s’entraîne, plus on fait baisser le risque. Que l’on soit cardiaque ou non, quel que soit son âge ou quel que soit son niveau d’activité, le risque cardiaque diminue à l’horizon de cinq ou dix ans.

Dr Laurent Uzanl


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