Une empreinte qui arrête la vie et empêche d’être présent à soi et aujourd’hui

« Une empreinte qui arrête la vie et empêche d’être présent à soi et aujourd’hui. » C’est en ces termes que je définissais le traumatisme en introduction à mon ouvrage sur le sujet 1. Cependant, au fil des jours et après avoir décortiqué le traumatisme, il m’a semblé qu’il restait encore bon nombre de zones d’ombre. Rien de plus normal, compte tenu de la nouveauté de cette approche. Certaines caractéristiques me sont apparues à l’évidence comme des constantes constitutives de la notion de trauma. Les traumatisés vivent les événements avec des perceptions 2, des ressentis identiques ou presque. Eux, les incompris qui ont tant de mal à traduire et exprimer ce qu’ils ressentent, pourraient aisément communiquer avec les autres victimes dans un langage « codé ».

Dès lors, notre investigation va débuter par un questionnement. Qu’est-ce que le présent ? Notre cerveau le vit-il de la même façon pour tous ? Le présent des enfants est-il semblable au nôtre ? Et les stoïciens, qu’en disaient-ils ? Que devient le temps lors de la méditation, de la pleine conscience ? Le souvenir est-il inclus dans le présent ? Ou le souvenir traumatique a-t-il, seul, cette capacité à être un passé présent ? Mais le trauma ne se contente pas d’introduire le passé dans le présent, il déclenche aussi un arrêt. Un arrêt de qui, de quoi ?

Être présent ne peut être une notion purement intellectuelle. Notre perception de ce que nous allons traduire par le présent ou l’arrêt implique aussi notre corps. Est-il un objet ? Est-il pensant, le lieu de la parole perdue, de la douleur, le temple de la mémoire, un contenant ? Autant de questions à se poser pour s’imprégner au mieux de la pluralité des composantes. Et ainsi constater que la vie est avant tout mouvement. Perdre le mouvement est synonyme de mort. Car celui-ci n’est-il pas l’expression d’une synthèse ? D’un acte volontariste qui regrouperait perception, émotions et sentiments ?

Mais alors, si l’absence de mouvement se traduit par l’immobilisme, la sidération, le figé, l’effroi, la stupeur... l’incapacité d’agir ou de réagir alors que rien ne fait obstacle, alors on est en droit de se demander si la seule réponse possible et efficace ne serait pas de remettre du mouvement là ou les choses se sont arrêtées. Bonne idée ! Mais comment ?

Je ne reviendrai pas sur l’échec cuisant de la psychanalyse en ce domaine. Simplifier le traumatisme à la sexualité est pour le moins réducteur et comprendre n’a jamais suffi à réparer. Pas plus qu’at- tendre du patient qu’il parle spontanément, précisément de sujets qu’il a enfouis au plus profond de son être – allant même jusqu’à l’amnésie –, et le plus souvent à la recherche de l’esquive et de l’évitement.

Tout ce cheminement me conduit à une conclusion. Seule les thérapies qui :
• prennent en compte le sujet dans sa globalité (corps-émotions- esprit),
• font appel à la représentation et au mouvement
sont en mesure d’avoir une action thérapeutique efficace.

Ce sont des techniques qui permettent une déprogrammation multisensorielle d’un événement vécu sur le mode traumatique. Car, comme le dit très justement Peter Levine, « si vous ne pouvez ni fuir ni combattre, vous gelez votre vie psychique » et j’ajouterais que, ce faisant, le mouvement de vie est lui aussi arrêté.

Quelles sont ces techniques ? L’hypnose et l’EMDR1 ont fait leurs preuves et je constate quotidiennement leur efficacité. Initiée à l’EFT2 de Gary Craig et à la SE3 de Peter Levine, j’ai trouvé dans ces approches des ouvertures qui contribuent à ma pratique thérapeutique quotidienne. J’ajoute l’HTSMA4, que l’on pourrait appeler « hypno-EMDR », ainsi que la respiration holotropique de Stefan Grov. Il en existe de nombreuses autres, peut-être moins répandues et connues, mais allant dans un sens identique, sur lesquelles chacun pourra se renseigner.

Nous terminerons par ce que l’on appelle aujourd’hui les EMI1. Seraient-elles des états proches de l’hypnose ? Des traumas ? Et pour- quoi pas une thérapie ?

Tout au long de ce développement nous chercherons à démontrer le bien-fondé de ces approches et à ainsi encourager les chercheurs de demain à oser « penser à côté ». Acceptons avec humilité de ne pas tout comprendre et de simplement faire et constater. Einstein ne disait-il pas : « La théorie, c’est quand on sait tout et que rien ne fonctionne. La pratique, c’est quand tout fonctionne et que personne ne sait pourquoi. Si la pratique et la théorie sont réunies, rien ne fonctionne et on ne sait pas pourquoi ! »

Gardons à la pratique toute sa force et sa pertinence. C’est en observant que l’on peut créer le renouveau.

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1. Sénèque, Apprendre à vivre, Lettres à Lucilius, lettre no 1, éditions Arléa, 2001, p. 19.
1. Eye Movement, Desensitization and Reprocessing.
2. Emotional Freedom Techniques, technique de libération émotionnelle élaborée par Gary Craig dans les années 1980-1990.
3. Somatic Experiencing©, méthode thérapeutique développée par Peter Levine pour le traitement des désordres émotionnels post-traumatiques.
4. « Hypnose, thérapie stratégique et mouvements alternatifs », méthode conçue par le docteur Eric Bardot à partir de l’EMDR.
 

Corinne Van Loey    
                                                                              

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