Que faire de tout ce temps ?


Jean Viard est un sociologue français connu, directeur de recherche au CNRS. Il cite : « Avant 1914, on vivait 500 000 heures, on travaillait 200 000 heures, on dormait 200 000 heures. Il restait à une personne normale 100 000 heures pour faire tout le reste : apprendre, militer, aimer, se promener...

Aujourd’hui en France, l’espérance de vie moyenne est de 700 000 heures. La durée légale du travail est de 63 000 heures. Nous étudions 30 000 heures, dormons deux heures de moins par jour.1
400 000 heures pour faire quoi ? J’ai coutume d’énoncer le sujet de cette façon : « Quelle est votre Création ? » Nous sommes venus sur terre pour continuer la création. Contrairement à ce qui se raconte souvent, nous avons beaucoup de temps. Qu’est-ce que nous créons ?
Méfions-nous de notre ego

« Houlala ! Je suis surbooké ! » On le raconte, on se le raconte... on finit par le croire Et on programme son cerveau ainsi : on finirait par devenir inefficace, surbooké avec « trois fois rien ». Bon nombre de retraités vous ressassent qu’« ils n’ont le temps de rien ». Quand ils vous racontent leur matinée dans le détail, vous entendez qu’ils sont allés chercher du pain, qu’ils ont lu le journal, et qu’un escargot les suit depuis la gare tellement ils marchent doucement...

C’est bien souvent une brosse à reluire de l’ego que de raconter partout qu’on est débordé. C’est se donner de l’importance.

La retraite
Quel vilain mot ! À quoi me fait penser ce mot « retraite », si ce n’est, entre autres, à un événement historique, à savoir lorsque les Français se sauvèrent de Russie, vaincus. Les synonymes du mot « retraite » sont : repli, évacuation, arrêt de travail bien sûr, mais aussi non-activité, asile, éloignement...

Une enquête publiée en 2010 dans le Journal of Economic Literature et menée par deux chercheurs, Susan Rohwedder et Robert Willis, de l’Université du Michigan, conclut que le travail stimule le cerveau et qu’une inactivité l’affaiblit. Cette étude a été faite grâce à un appareil analytique et statistique et prouve que le travail renforce les fonctions de la pensée et tout ce qui va avec (gestion des émotions, notamment), alors que l’inactivité diminue ces facultés. Ces deux scientifiques vont encore plus loin dans leurs conclusions : ils précisent « qu’il n’y a aucune preuve scientifique montrant que faire des «exer- cices mentaux» régulièrement (mots croisés, sudokus, jeux de cartes...) empêche nos capacités cognitives de s’étioler à mesure que nous vieillissons. En revanche, le travail aurait cet effet de stimulation. »

Moïses Naim, de la fondation Carnegie, explique que « cette conclusion s’appuie sur l’analyse de données statistiques et sur les résultats de tests psychologiques, réalisés chez des personnes âgés de plus de 60 ans, aux États-Unis, au Royaume-Uni et dans onze autres pays européens ». Les chercheurs ont constaté, par exemple, que dans les pays où les hommes travaillent plus longtemps, les résultats des tests cognitifs sont largement supérieurs que dans des pays où la population active part à la retraite plus tôt. Aux États-Unis, au Danemark, en Suède ou en Suisse, où l’âge de la retraite est supérieur, ces résultats sont par exemple deux fois meilleurs que ceux de pays comme la France, l’Autriche, la Belgique et la Hollande, qui ont un âge de la retraite plus bas. L’Italie et l’Espagne occupent une position intermédiaire, se situant entre ces deux extrêmes.

Susan Rohwedder et Robert Willis ont non seulement comparé les résultats des tests cognitifs entre des pays où l’âge de retraite est différent, mais aussi ceux, entre personnes du même pays et du même âge, d’individus à la retraite et d’autres encore en poste. Les retraités (pour être plus précis, les « personnes qui ont cessé leur activité et perçoivent tout de même une rému- nération ») obtiennent des résultats 20 % inférieurs à ceux des personnes du même âge qui travaillent encore.
Que faisons-nous de notre vie ?

Parmi les principaux suicides en France, on note qu’ils concernent surtout les retraités et les personnes au chômage.

Lorsque je reçois en thérapie des retraités, je leur demande ce qu’ils font de leur temps. Ils m’expliquent qu’ils s’occupent, vont chercher leurs petits-enfants à l’école, font partie d’associa- tions, partent en vacances dans des clubs pas chers pour tuer le temps, préparent les repas, lisent, marchent, jardinent, bricolent. Quand je leur demande s’ils sont globalement heureux, ils tournent souvent autour du pot et répondent : « on s’occupe comme on peut (pour ne pas s’ennuyer) ». Ils viennent me voir avec des douleurs et des pathologies diverses. Or la maladie est une information qu’il faut décoder. Je leur explique alors que s’occuper, ne pas s’ennuyer, ce n’est pas cela être heureux. Il faut être actif pour être en bonne santé.

Il faut donner un sens à sa vie grâce à une activité de travail.
Il est indispensable pour être heureux d’exercer ses talents.

La retraite se prépare dès 50 ans. Je connais des amis qui, dès leur cinquantième anniversaire, ont préparé leur retraite : ainsi certains ont convenu avec leur employeur de travailler en free-lance (travailleur indépendant - conseil), pour eux, au moment de leur retraite. Prenez des contacts, réfléchissez à ce que vous allez faire, le plus tôt possible.

J’ai moi-même pris un tournant à mes 50 ans... De la direction de grosses usines pour « rentabiliser » mon diplôme d’ingé- nieur, je suis passé, à temps plus que plein, à l’aide à la guérison. Mon credo est que la vie doit être riche et que l’argent ne peut pas être un critère de choix.

Un fait sérieux nous frappe : le taux de mortalité augmente quelques mois après le départ en retraite. C’est incontestable.

                                                                                         
Nathalie & Jean-Marie Delecroix 

 

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La puissance de votre cerveau