Une passerelle génomique entre l’homme et les poissons

 

Le génome du gar vient d’être séquencé par un consortium international, impliquant l’Inra. La structure du génome de ce poisson est aussi proche de celle de l’homme que de celle du poisson zèbre, une espèce modèle utilisée en recherche biomédicale. Publiée dans Nature Genetics, cette découverte ouvre des perspectives inédites dans la compréhension de la biologie humaine.

Publié le 15/03/2016
Mots-clés : BIOLOGIE - poisson - génome

Le gar (Lepisosteus oculatus) est un poisson ancien avec des écailles dures en forme de diamant et une longue bouche remplie de dents semblables à des aiguilles. Son génome, qui évolue lentement, est structurellement proche des génomes du poisson zèbre et de l’homme. Il peut ainsi servir de lien entre l’homme et les poissons téléostéens1 et ouvrir la voie à d’importants progrès dans la recherche biomédicale. Le génome du gar a été séquencé dans le cadre d'une étude internationale, menée par l'Université de l'Oregon, en collaboration avec le Massachusetts Institute of Technology et l'Université Harvard, et impliquant le laboratoire de physiologie et génomique des poissons de l’Inra de Rennes.

Une structure génomique ancestrale bien conservée

Les chercheurs ont mis en évidence que le gar conserve des caractéristiques ancestrales perdues par d'autres poissons et par l’homme. De nombreux gènes trouvés chez l'homme, mais pas chez le poisson zèbre, sont présents chez le gar. De la même façon, on retrouve chez le gar des gènes de poisson zèbre qui ne sont pas présents chez l’homme.

L’histoire remonte il y a quelques 450 millions d'années, lorsque les vertébrés se sont divisés en deux grands groupes : la lignée qui allait devenir celle des tétrapodes, incluant les oiseaux et les mammifères dont l’homme, et la lignée des poissons osseux. Suite à la duplication complète du génome, la lignée des poissons osseux a évolué vers les poissons téléostéens : le poisson zèbre, l’épinoche, le saumon, la truite, le thon, le flétan et la plupart des poissons d’aquarium. La famille du gar a divergé du reste des poissons osseux avant l’apparition des poissons téléostéens, et n’a pas subi de duplication complète du génome comme les poissons téléostéens. Ainsi le génome du gar, contrairement au génome du poisson zèbre par exemple, a conservé une structure génomique ancestrale, dont de nombreux chromosomes entiers similaires à ceux de l'ancêtre des vertébrés.

Une clé de compréhension de l’évolution des gènes après duplication

Les comparaisons entre l'homme et le gar sont ainsi simplifiées car le gar n'a pas toutes les copies de gènes supplémentaires trouvées chez le poisson zèbre suite à la duplication du génome chez les poissons téléostéens. Les chercheurs de l’Inra de Rennes ont comparé l’évolution de l’expression des gènes chez le gar et le poisson zèbre. Après duplication, soit les deux gènes résultant se partagent les fonctions ancestrales, soit l’un des deux gènes se trouve disponible pour acquérir une nouvelle fonction, alors que l’autre conserve les fonctions ancestrales.

Cette connaissance de l’évolution de la fonction des gènes dupliqués est cruciale pour accroître la compréhension de la biologie d’évolution et pour une bonne utilisation des modèles poisson en recherche biomédicale.

Le gar constitue une passerelle génomique entre les téléostéens et l’homme en permettant l’alignement des séquences de l’homme et des téléostéens sur son génome.. © Nature Genetics
Le gar constitue une passerelle génomique entre les téléostéens et l’homme en permettant l’alignement des séquences de l’homme et des téléostéens sur son génome. © Nature Genetics

1Le groupe des Téléostéens (apparu il y a environ -350 millions d’années) est le groupe de poissons le plus important, avec plus de 30 000 espèces, soit à peu près autant que tous les autres Vertébrés réunis.

Référence :
Ingo Braasch et  al. The spotted gar genome illuminates vertebrate evolution and facilitates human-teleost comparisons. Genetics, 7 mars 2016, doi:http://dx.doi.org/10.1038/ng.3526

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