Energie : Donner un nouvel élan à la politique énergétique et climatique européenne




Parmi les dix priorités de la nouvelle Commission européenne présidée par Jean-Claude Juncker figure en bonne place la volonté de donner un nouvel élan à la politique énergétique et climatique européenne. De fait, l’Europe de l’énergie est aujourd’hui en crise, au point de devenir une pomme de discorde entre États membres, dans un contexte marqué par le conflit russo-ukrainien, par la crise des marchés de l’électricité et du carbone et par une absence de coordination entre les politiques nationales.

Ce constat a été détaillé dans un premier rapport de France Stratégie paru en janvier 2014, qui regroupait les analyses de trois économistes européens : Marc Oliver Bettzüge, directeur de l’Institut de l’économie de l’énergie à l’université de Cologne ; Dieter Helm, professeur de politique énergétique à Oxford ; et Fabien Roques, professeur associé à l’université Paris-Dauphine et vice-président de Compass Lexecon.

Cette nouvelle étude, qui inclut les contributions des mêmes experts, propose un certain nombre d’actions pour corriger les défaillances du système actuel et pour construire une nouvelle politique européenne de l’énergie. Il part des constats suivants, désormais largement partagés :

> la crise économique et l’essor de nouveaux moyens de production, en particulier les énergies renouvelables (EnR) intermittentes, rémunérées en dehors du marché, mais aussi les centrales thermiques, ont conduit à une situation de surcapacité, à un effondrement des prix sur le marché de gros et à la fermeture, par manque de rentabilité, de centrales à gaz, menaçant la sécurité d’approvisionnement électrique ;
> les prix constatés aujourd’hui sur le marché de gros de l’électricité et les incertitudes sur leur évolution ne permettent pas le déclenchement des investissements nécessaires pour assurer la production à l’horizon 2030 ;
> dans le même temps, les prix de l’électricité pour les consommateurs, particuliers et industriels, ont fortement augmenté, accentuant la précarité énergétique, accroissant les écarts entre pays européens et le reste du monde, et fragilisant la compétitivité des acteurs industriels dans un climat économique déjà morose ;
> l’Union européenne est très proche de son objectif de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre de – 20 % à horizon 2020 (par rapport à 1990), mais cette baisse est en grande partie attribuable à la mutation de son économie vers les services, aux prix élevés du pétrole (jusqu’à la fin du premier semestre 2014) à l’augmentation des prix des énergies fossiles (jusqu’en 2014) et à la crise économique ; dans certains États membres, les émissions de CO2 ont même recommencé à augmenter suite à un recours accru au charbon pour la production d’électricité ;
> certains États membres sont très dépendants du gaz russe, ce qui conduit à une relation asymétrique dans la négociation des contrats gaziers.

La création d’une véritable Union de l’énergie est donc plus que jamais à l’ordre du jour. Dans sa séance de mars 2015, le Conseil européen a choisi de la faire reposer sur cinq piliers, hérités des politiques qui ont façonné l’Europe de l’énergie depuis une vingtaine d’années : la pleine intégration du marché européen de l’énergie, avec pour corollaire la construction de réseaux gaziers et électriques transfrontaliers ; la décarbonisation de l’économie ; l’efficacité énergétique comme moyen de modérer la demande ; la sécurité énergétique ; et enfin la recherche, l’innovation et la compétitivité.

L’Union européenne cherche ainsi à se positionner en bon élève de la lutte contre le changement climatique à l’approche de la COP21, à développer la solidarité entre ses membres en matière d’approvisionnement en gaz et à relancer son industrie. On ne peut qu’approuver de telles orientations. On peut douter cependant qu’elles donnent l’impulsion suffisante à la renaissance de cette Union.

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