Pourquoi devrait-on apprendre à communiquer ?

Force est de constater qu’en matière de communication interpersonnelle nous ne sommes pas tous enseignables au même degré.
Schéma d'indice d'enseignabilté

Force est de constater qu’en matière de communication interpersonnelle nous ne sommes pas tous enseignables au même degré.

« Pourquoi devrait-on apprendre à communiquer ? » s’offusque Léon, 59 ans, au cours d’un débat participatif en mai 2014 autour de la question de « la relation toxique ». « Communiquer, c’est naturel, dit-il. On fait cela comme on respire depuis que nous sommes nés. » « Je dirai même que c’est inné », surenchérit Bernadette, 68 ans, retraitée de la fonction publique.

En matière de communication interpersonnelle, Léon et Bernadette font partie de la catégorie des gens inconsciemment incompétents. De janvier à mai 2014, notre collectif « coup de jeune » a réalisé une étude auprès de mille cent citoyens âgés de 16 à 89 ans. La première question que nous leur posions était la suivante : « Pensez-vous qu’il soit nécessaire d’apprendre à communiquer ? » À cette question, 65 % des sondés ont répondu par la négative.

Une majorité d’individus sont donc inconsciemment incompétents en la matière. Autrement dit, ils ne savent pas qu’ils ne savent pas. À quoi les reconnaît-on ? Ils se divisent en trois catégories facilement repérables à leurs réactions.

Les premiers disent : « Je sais. » Il est intéressant de constater combien les ignorants en la matière sont prompts à dire « je sais ». Quand une personne vous assène un « je sais », prenez-le avec circonspection.

La seconde catégorie regroupe les individus qui méprisent, et qui, par conséquent, peuvent se montrer vindicatifs lorsqu’on leur parle d’apprendre à communiquer. Certains vont même jusqu’à se mettre en colère et exprimer leurs croyances négatives.

Dans la troisième catégorie, la plus nombreuse, on retrouve ceux que la question indiffère complètement. Comme si ce n’était pas leur affaire. Ils ne se sentent pas concernés. Parlez-leur du Championnat de France de foot, ils seront intarissables, du dernier tour de chant de leur artiste fétiche, leur œil va s’illuminer, des dernières frasques du people à la mode, ils vont prêter une oreille attentive. Mais pour ce qui conditionne 99 % de leurs choix existentiels, ils n’ont aucun temps à accorder.

Les individus « tankés » à ce degré d’ignorance et de certitude sont très difficilement enseignables.
Que l’immense majorité des individus soit inconsciemment incompétente en matière de communication inter  et intrapersonnelle revêt un degré de toxicité phénoménal.

Néanmoins, ces personnes situées tout en bas de l’échelle peuvent évoluer. Il n’existe pas une fatalité à demeurer toute sa vie un « ignorant ».

Comment procéder ? En lisant un ouvrage, en écoutant une émission de radio, en regardant un reportage à la télé, en se rendant à une conférence, ou encore au cours d’une discussion passionnante entre amis, un déclic peut se produire, et Léon, que nous évoquions tout à l’heure, prend conscience qu’il ne sait peut-être pas tout en matière de communication : il devient « consciemment incompétent ». À présent, il sait qu’il ne sait pas. Léon se montre nettement plus enseignable. Il se met à dévorer des livres de développement personnel, de psychologie, il s’ouvre à ce monde nouveau pour lui, il explore ce continent qu’est le « connais-toi toi-même ». Il se forme, s’investit, participe à des séminaires, partage dans des groupes de réflexion. Il apprend à communiquer avec les autres et avec lui-même. Il y consacre du temps. Jour après jour, Léon devient consciemment compétent. Pour toute personne exerçant le métier de « transmetteur », Léon est devenu très enseignable.

Lors d’une étude menée par l’INRP (Institut national de recherche pédagogique), 79 % des enseignants s’interrogent aujourd’hui sur le degré de motivation des élèves. Ils disent que certaines classes sont devenues « inenseignables ». Les professeurs voient juste. Nombre d’élèves ne souhaitent pas apprendre. Mais leur enseigne-t-on ce qu’il serait intéressant qu’ils apprennent ? Les méthodes d’apprentissage ont-elles suffisamment évolué ? Sont-elles en phase avec leur époque ? Nous l’avons dit, la communication est un savoir fondamental, aussi important que lire, écrire et compter.

« Je n’ai connu aucun divorce qui était provoqué par le fait qu’on n’avait pas appris tel ou tel problème de maths à l’école », explique le psychologue américain Jack Canfield. « On devrait enseigner ces choses essentielles dès la plus tendre enfance. »

Sans verser dans la caricature, et sans remettre en cause l’apprentissage des savoirs fondamentaux que sont les mathématiques, le français et les sciences, il serait judicieux de s’interroger : pourquoi un tel déni de l’importance de la communication interpersonnelle existe-t-il, alors que c’est le pivot du vivre- ensemble et que nous ne faisons que cela toute notre existence ?

Retrouvons notre ami Léon. Il a poussé plus avant ses investigations. Léon aime désormais prendre la parole en public, parler devant un auditoire ne le stresse plus du tout.

Quand il communique avec d’autres individus, il est capable de déceler ce qui se passe durant l’échange, tant au niveau des mots employés que des émotions et des gestes. Léon a développé une grande intelligence relationnelle. Il est devenu inconsciemment compétent.

C’est un virtuose de la communication. Est-il plus enseignable pour autant ? Pas évident. Nombre d’individus arrivés tout en haut de l’indice d’enseignabilité pensent qu’ils n’ont plus rien à apprendre. Eux aussi disent : « Je sais. »

Un vieux maître en arts martiaux, ceinture noire quatrième dan, expliquait un jour que, lorsqu’il avait le désir de progresser encore, il se rendait sur les tatamis et observait... les débutants. C’est ainsi qu’il pouvait découvrir de nouvelles façons de procéder.

« Derrière chaque ceinture noire se cache toujours une ceinture blanche, expliquait-il. Ne jamais l’oublier est l’antidote à l’infatuation, à la vanité et à la stagnation qui guettent tout virtuose. »

On croise, hélas, beaucoup de « surdoués » devenus toxiques à force de trop savoir qu’ils excellent.
Une chose est sûre, pour faire en sorte qu’au niveau de la masse le nombre de personnalités toxiques diminue, nous devons tout mettre en branle pour éduquer les masses en matière de communication inter- et intrapersonnelle. Autrement dit, faire en sorte que le nombre d’individus inconsciemment incompétents diminue chaque jour.

La parabole des trois poissons
Pour illustrer l’indice d’enseignabilité, j’ai souvent recours à la parabole des trois poissons.
Un jour, un vieux poisson, sage et mature, croise dans la « rivière HQR » deux jeunes poissons. La rivière HQR est composée d’une eau pure, non polluée, limpide et tout à fait potable. C’est une jolie rivière de montagne.

« Bonjour. L’eau est bonne, n’est-ce pas ? dit le vieux poisson aux deux jeunes poissons. Il fait bon y nager, elle est douce, transparente, à bonne température, sans déchets d’aucune sorte.
– C’est quoi, l’eau ? demandent alors en chœur les deux jeunes poissons. »
Dans cette brève histoire, la rivière est une métaphore de la communication à dominante Haute Qualité Relationnelle®.

En résumé : on croise énormément de personnes toxiques au cours de son existence car une immense majorité des êtres humains sont inconsciemment incompétents en matière de communication inter et intrapersonnelle. Une des raisons à cela est que l’Éducation nationale n’enseigne pas ce savoir fondamental et qu’une majorité d’individus sont persuadés que communiquer, cela ne s’apprend pas.

 

Christophe Medici

 

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