Bière dans les stades : « Après la publicité, le lobby alcoolier passe au stade supérieur », dénonce l’ANPAA

 

Grand gagnant de la loi Touraine avec la mise à mal de la loi Evin sur le volet publicité en faveur des boissons alcooliques, le lobby de l’alcool n’en a manifestement pas assez puisqu’il s’y attaque à nouveau avec cette fois la question de la vente d’alcool dans les stades.

Déjà écorné en 1999 par la possibilité de mettre en place des buvettes à raison de 10 fois par an au maximum, l’objectif de la loi Evin ne pas promouvoir l’alcool à travers les activités sportives semble en grand danger. Ceux-là mêmes qui ont réussi à faire basculer la Mairie de Saint Denis s’agissant de la finale de la coupe de France entendent bien pousser leur avantage et étendre la possibilité de vendre de l’alcool pour tous les matches de la ligue 1 souhaitent « qu’il soit admis une fois pour toute que la bière est autorisée dans les stades », autorisation qui représente un fort enjeu financier pour les clubs professionnels.

Cette revendication est dangereuse : tout ce qui facilite l’accès à l’alcool et sa consommation favorise les excès, les risques et les débordements, particulièrement dans les foules. Rappelons le précédent du Mundial 2014 : sponsors obligent, la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) a imposé la vente de bière dans les stades au Brésil qui l’avait interdite en 2003 pour y endiguer la violence. Jérôme Valcke, secrétaire général de la FIFA, a dû constater les dégâts au point de déclarer : « J’ai été impressionné et suis préoccupé par le niveau d’ébriété de nombreux supporteurs qui ne se comportent pas bien à cause de cela», et de se dire « préoccupé par le nombre de supporteurs ivres dans les stades. »

La Ligue de football professionnel (LFP) avance en France l’argument que les supporters arrivent déjà ivres et que par conséquent l’interdiction ne sert à rien. Il s’agit d’un raisonnement par l’absurde, car avoir la possibilité de continuer de boire ensuite n’arrangera certainement pas le problème. En revanche mettre en place des actions de prévention et de réduction des risques (comme par exemple le fera l’ANPAA 33 en partenariat avec Bordeaux Métropole dans les fanzones de Bordeaux lors de l’Euro 2016) semblerait une piste nettement plus responsable.

La Ligue de football professionnel (LFP) avance également l’argument qu’ « il est beaucoup plus facile de contrôler les populations une fois qu’elles ont passé les contrôles et sont dans l’enceinte. » mais oublie le constat du secrétaire général de la Fifa : le contrôle de la vente est difficile à  mettre en œuvre «car il est toujours difficile de dire – je vais te vendre la première bière et pas la deuxième -, parce que quand tu commences à vendre, tu dois vendre».

Souvenons-nous que l’Assemblée nationale avait en 2015 voté contre les amendements à la loi Macron qui visaient à rendre possible la vente d’alcool dans les stades. En effet, une telle disposition aurait eu pour effet de faire passer les fédérations sportives sous la coupe du lobby alcoolier.

La loi Evin n’a jamais été une loi de prohibition, elle a pour objectif premier de protéger la jeunesse et des publics fragiles en limitant les incitations à consommer de l’alcool. La restriction de la vente d’alcool dans les stades y contribue, pour la jeunesse et le public masculin adulte qui constitue la majorité des consommateurs excessifs. Mais le lobby de l’alcool et ses alliés, une fois de plus, démontre que la santé publique importe peu devant la perspective de gros profits.